mardi 27 décembre 2016

Incitations (5) Les Droits de l'Ame


Il faudrait avoir des dons de prophète pour être en mesure de faire la distinction entre marche, dérive et chute. Peter Sloterdijk 


Dans notre avant-dernier billet, nous proposions des extraits de la twittérature d’Edgar Morin qui partage ses réflexions sous la forme de ces gazouillis que sont les "tweets". Dans ce billet, comme nous le faisons régulièrement dans la série des "Incitations", nous proposerons, sous forme d'aphorismes et de fragments, des éléments de réflexions qui font écho aux idées développées de manière plus analytique dans Le Journal Intégral. Inspirées par l'esprit du temps, ces "Incitations" nous invitent donc à la méditation, à la réflexion... et à l’action.

L'urgence impérative aujourd'hui, dans nos sociétés complexes, consiste à développer nos facultés intuitives et visionnaires pour opérer la distinction entre marche, dérive et chute. C'est une question de survie. Le clivage n'est donc plus entre la gauche et la droite, entre les progressistes et les conservateurs, mais entre les visionnaires et les désenchantés.

Deviens ton propre prophète en confiant à ton intuition le soin de te guider par-delà la masse des conformismes et des préjugés.

Tout peut être écrit dans une société où plus personne ne lit (ou si peu). D'ailleurs "Tout est écrit" comme dit le proverbe, mais qui sait encore interpréter les signes du temps dans un monde réduit à un espace quantifiable, soumis aux lois abstraites de la mesure et de la comptabilité ?

Notre tradition rationaliste associe l’intelligence à la désillusion et la désillusion au pessimisme comme elle associe la joie à la naïveté et la naïveté à la bêtise. Le grand auteur français se doit d’être neurasthénique, voire suicidaire, pathologies transmuées en "qualités" par les chiens de garde de la culture dominante qui font - et défont - les réputations. La profondeur d'une œuvre est évaluée en fonction des névroses du créateur ! Tout ceci explique sans doute cette ambiance à la fois mortifère, arrogante et compassée qui fait des français la population la plus pessimiste au monde comme le confirment toutes les études internationales. Et pourtant peu d’observateurs opèrent cette corrélation évidente entre idéologie rationaliste, pouvoir technocratique et angoisse collective, au cœur de l’exception française. 

Dans nos sociétés capitalistes, le crédit a remplacé la croyance qui avait elle-même remplacé la Connaissance. 

Le monde contemporain est une insulte à cette part d’humanité qu’il n’a pas encore réussi à étouffer. 

Dans nos sociétés de l’information règne une forme d’"algoligarchie" née des relations incestueuses entre algocratie (pouvoir culturel des algorithmes) et oligarchie (pouvoir économique du capital). 

Nietzsche parle du désir de reconnaissance comme d'un désir d’esclave quêtant l'approbation d'une autorité extérieure. Dans nos sociétés capitalistes qui font du travail un fétiche, l’esclave désire être reconnu comme tel : un laborieux, si affairé qu’il en a perdu jusqu’au goût de l’Otium, ce loisir studieux auquel se consacraient les aristocrates dans l’antiquité. Selon Nietzsche, toujours : « Celui qui ne dispose pas des deux tiers de sa journée est un esclave. »


Il n'est qu'une aristocratie - celle de l'esprit - polarisée entre service et transmission. Se mettre au service de ce qui nous précède et nous inspire c'est devenir responsables vis à vis de ce qui nous suit et que nous inspirons. Telle est la chaîne initiatique et chevaleresque qui fonde l'aristocratie de l'esprit, la seule qui vaille parce qu'elle est fondée sur une vision sacrale de l'être humain.

Dans L’éducation sentimentale, lors de la veillée funèbre autour du cadavre du banquier Dambreuse, Flaubert décrit celui-ci "chérissant le pouvoir d’un tel amour qu’il aurait payé pour se vendre". Une telle description colle parfaitement à l’homme contemporain : prêt à payer – et cher – pour se vendre. La marchandisation généralisée réduit l'être humain à une valeur d'échange monétaire qui l'oblige à se vendre pour exister. 

Tel un ogre, le Capital gère ses affaires comme il digère les individus à travers la mécanique infernale de l’intérêt et du profit où chacun est transformé en comptable pointilleux et cynique de ses intérêts égoïstes. 

Le Capital obéit aux règles de l'égo, ce Je d'enfant d'autant plus mégalo qu’il est effrayé par son impuissance et par la mort. Transcender l’égo, c’est participer au Grand Jeu fondateur des communautés post-capitalistes.

Trump est un signe des temps qui n'aurait pas du se prénommer Donald mais Picsou. Parce qu'il incarne de manière caricaturale, jusqu'à la nausée, l'esprit du capitalisme, il en annonce aussi prophétiquement la fin programmée. Comme l'écrit Michel Onfray : " Trump est le nom du capitalisme nu. En ce sens les médias, les élites, les sondeurs, les penseurs comme il faut le haïssent parce qu'il montre la vérité du capitalisme cynique pour lequel l'argent est le fin mot de l'histoire. Ceux qui haïssent Trump lui reprochent de montrer ce qu'est le capitalisme sans fard et de leur gâcher le travail pendant qu'eux avancent masqués."

La victoire obscène de Donald Trump met à nu cette société du spectacle qui transforme chacun en voyeur de sa propre vie. Le triomphe de ce que le situationniste Guy Debord nommait la "séparation", pourrait annoncer l'émergence d'une nouvelle forme d'humanité, réunifiée à un niveau supérieur car "Là ou croît le péril, croît aussi ce qui sauve" (Holderlin).

Traditionnellement, dans les communautés organiques, l’activité humaine tissait sa valeur d’usage et sa valeur existentielle sur la trame des relations communautaires et symboliques qui lui donnait tout son sens c’est-à-dire le sens d'une totalité à laquelle elle participait de par sa force et sa créativité. Le capitalisme a transformé l’activité humaine en un "travail abstrait" réduit à une valeur d’échange pour en faire une marchandise comme les autres. La société capitaliste est ainsi devenue la seule forme historique où les rapports sociaux sont médiatisés par le "travail".

Parce qu'une vision évolutionnaire a pour objet le développement humain, elle a aussi pour projet l'avènement de communautés post-capitalistes fondée sur le dépassement des catégories de l'économie et l'abolition du "travail abstrait". Le scandale n'est donc pas le chômage mais le travail. L'urgence n'est donc pas de travailler plus mais de ne plus travailler pour redonner à l'activité humaine sa plénitude existentielle et sa richesse symbolique dans le cadre de communautés concrètes à la fois diverses et solidaires.

La citoyenneté universelle doit s'enraciner dans les profondeurs sensibles et spirituelles, charnelles et mémorielles, d'une communauté concrète. Sans quoi elle reste le fantasme abstrait d'un individu solitaire et désaffilié, prêt à être sacrifié sur l'autel du Marché.

La société capitaliste fut celle des travailleurs, les communautés post-capitalistes, dans leur pluralité, seront celles des créateurs. Tout nouveau projet politique doit être mesuré à cette aune radicale d'une refondation du lien social, sans quoi il n'est rien d'autre qu'un réformisme de plus, visant à tout changer pour que rien ne change.


L'homme aliéné de la modernité se reconnaît au fait qu’il se croit libre alors même qu'il vit sous l'emprise d’une époque paradoxale produisant à la chaîne ces oxymores vivants que sont des individus grégaires. 

La barbarie a deux visages : le fanatisme identitaire et le fondamentalisme marchand. Une partie de l’humanité est enchaînée par la tradition et l’autre déchaînée par le progrès. Ces deux parties se combattent l’une l’autre sans s’apercevoir qu’elles sont les deux faces d’une même pièce dont nous sommes les figurants angoissés et aliénés.

A quand l’organisation systématique de programmes de "démarchandisation" - comme il existe des programmes de "déradicalisation" - pour nous libérer du fétichisme de la marchandise et de son emprise mortifère ? 

Réenchanter le monde c’est accueillir et intensifier cette présence d’esprit dont la puissance créatrice décolonise l’imaginaire et démarchandise les relations. 

C’est dans les marges que l’on corrige les erreurs d’une époque. Prendre conscience c'est prendre ses distances avec une société suicidaire, absorbée par une transe économique qui détruit les liens unissant l'homme à son milieu - naturel, social et symbolique. 

On reconnaît un fou au déni de la maladie mentale dont il est atteint. Il en est de même pour les sociétés humaines qui, prenant leur délire collectif pour la réalité, considère comme pathologique ou criminel le refus de participer à celui-ci. François Roustang, ce grand thérapeute qui vient de mourir, disait : "Quand on constate qu'on est fou, on commence à guérir". On ne guérira jamais de l'économisme sans reconnaître d'abord que c'est une folie et sans décrypter les symptômes de son délire dans les évidences qu'il assène comme dans la pseudo-objectivité dont il se pare. Ce n'est pas parce qu'un malade se prend pour Napoléon qu'on est obligé de le suivre en se prenant soi-même pour un grognard.

La spiritualité est une chose trop précieuse pour être confisquée par les religions.

Parce qu'elle est cette expérience directe qui transcende le fétichisme des dogmes, des rituels et des clergés, la spiritualité est profondément irréligieuse même si elle considère la religion comme une forme socio-culturelle correspondant à une étape du développement psycho-spirituel.

Il faut être aveugle pour confondre l'illumination spirituelle et l'obscurantisme religieux qui instrumentalise celle-ci en réduisant la force transcendante de l'esprit à la lettre d'un dogme exclusif.

La véritable spiritualité ne fait pas l’économie de l’intelligence. Elle transfigure celle-ci en conscience éveillée. 

A la fois non-duelle et paradoxale, inclusive et intégrative, la plus haute des spiritualités considère que tout est son contraire. 

C’est honorer la vie que de prendre ses intuitions au sérieux en s'engageant pour elles.


La pensée du milieu émerge des milles liens qui nous unissent à lui. 

La raison ne peut ni tout comprendre, ni tout expliquer. Impliquée en Tout, l'intuition sensible participe au dévoilement de celui-ci de manière poétique et hermétique.

La gestion ou la vision, telle est aujourd’hui la question. L’expert est une autorité en la matière, le visionnaire, un auteur inspiré. 

Ce qu’on demande à un créateur, ce n’est pas tant une œuvre qu’une vision. La première doit être l'expression formelle de la seconde. Aujourd'hui, la scène culturelle est colonisée par des œuvres sans vision, telles des ombres qui ne renvoient à aucun rayonnement solaire. Conséquence : une foule de pseudo-artistes auto-proclamés et si peu de créateurs authentiques incarnant leur vision dans une œuvre vibrante qui ouvre sur un univers singulier.

Pour faire obstacle à la puissance insurrectionnelle de l'âme, les institutions culturelles ont cherché à la neutraliser en érigeant la rébellion en nouveau conformisme. C'est ainsi que, par le jeu dialectique de l'évolution, le conservatisme et le classicisme sont devenus aujourd'hui, de manière paradoxale, les vecteurs subversifs d'un nouvel anticonformisme. D'où l'émergence d'un néo-traditionalisme qui, dans tous les domaines culturels et cultuels, exprime une quête de fondations pour rependre pied dans le monde fluide et dissolvant des sociétés complexes en mutation constante. Comme l'écrit Alexandre Devecchio : "Les anciens sont devenus modernes et les modernes deviennent anciens". Pour ne pas le réduire à sa dimension régressive, ce néo-traditionalisme doit être conçu comme une étape dans l'émergence d'une Cosmodernité synthétisant l'intuition holiste de la tradition et la dynamique évolutionnaire de la modernité.

Les réseaux sociaux : un café du commerce, sans comptoir, sans café et, trop souvent, sans intérêt. Dans ce décor numérique se joue le théâtre mimétique d'une insignifiance où l'impuissance théorique se transforme couramment en fantasmes paranoïaques et délires complotistes. Mais dans cet océan d'insignifiance émergent de nouvelles significations sur des ilots discrets où se retrouvent ceux qui pulsent de la même vibration pour inventer ensemble le nouveau monde autour d'un imaginaire partagé. Cette conspiration est la seule qui vaille : une inspiration commune animée par l'esprit du temps.

Hier le monde était divisé entre celui qui croyait au ciel et celui qui n’y croyait pas. Aujourd’hui il l’est entre celui qui boit l’apéro et celui qui aime l’opéra !...

Certaines personnes gagnent à être inconnues.

Le con est au conformiste ce que le professionnel est à l’amateur. Si le con se reconnaît au fait qu’il ose tout, on reconnaît le conformiste au fait qu’il n’ose rien de peur de heurter les habitudes acquises de l'opinion sur rue.

Le conformisme de la règle s'insurge toujours contre l'exception quand celle-ci annonce l'émergence d'une règle nouvelle, plus complexe et inclusive. Assumer la solitude créatrice de l'exception c'est toujours affronter  le conformisme grégaire de la règle. L'inspiration créatrice effraie et rend agressif tous ceux qu'elle met face à leur impuissance, leurs limites et leurs illusions. Pour résister à l'emprise du conformisme, à l'ostracisme et à la violence générés par celui-ci, la pensée visionnaire nécessite autant, sinon plus de volonté que d'inspiration. Toujours inconfortable, la création doit dépasser la zone de confort qui conduit inéluctablement sur la pente fatale et inertielle du conformisme.


Le poète est cet artisan du verbe dont la matière première est l’esprit. Une singularité qui en fait le gardien éveillé de l’universel : le présent du poète c’est le futur du monde. 

Enfant de l'enthousiasme et de l'inspiration, le poète devient porte-parole de l’inouï et de l'inédit en libérant le langage de cette obscénité qui consiste à vouloir éradiquer le mystère en le définissant.

Sur les ailes de l’inspiration, la présence d'esprit vient se poser dans le nid de la poésie en nous offrant une pause vivifiante dans le rythme mécanique imposé à notre esprit par une société désenchantée. 

Science de l’immobile et de l’inutile, la méditation devient révolutionnaire dès lors qu'elle nous libère d’un monde utilitaire fondé sur le fétichisme de l’abstraction. 

Les technocrates ne sont rien d’autres que les tenanciers d’une raison close qui exploitent la logique à des fins marchandes : des maquereaux cyniques qui se prennent pour de savants marquis.

La science devient fétiche dès lors qu’elle relève d’une croyance aveugle en une abstraction mentale réduisant la complexité créatrice des organismes vivants, sensibles et conscients aux déterminismes de ses lois mécaniques.

Méditer ce n’est pas faire attention, c’est être attentif à cette présence vivante et vibrante qui fait de nous des êtres sensibles et conscients. 

Paradoxe du méditant : l’attention nous libère des tensions en les accueillant. 

Méditer c’est, dans un souffle inspiré, participer à une présence d'esprit qui ne se laisse pas absorber par ses manifestations formelles.

L'Esprit génère les formes comme le capital ses intérêts.

Utile comme une limite dans le monde formel des apparences, l’identité est une habitude inutile au-delà, dans le monde subtil des transparences.

L'art de vivre consiste à répondre présent à l’appel intérieur. Une présence immédiate qui dévoile l’unité harmonique entre le plaisir du corps, le bonheur de l’âme et la joie de l’esprit. 

Promouvoir les droits de l’âme, c’est inventer de nouvelles formes politiques à partir d'une inspiration métaphysique. Tel est le chantier entrepris aujourd'hui par tous ceux qui ne se contentent pas d'observer l'évolution du monde mais qui cherchent à la vivre et à l'incarner.

Pascal Quignard écrit : "On ne peut être à la fois gardien de prison et un homme évadé". Ce qui revient à dire que l’on ne peut pas vivre hors du système tant que le système vit en nous. Une leçon à méditer pour tous ces pseudo-révolutionnaires qui confondent prise de pouvoir et prise de conscience pour éviter toutes les remises en question personnelles impliquées par cette dernière.


Paradoxe du développement humain : c’est en gardant le sens des limites que l’on peut transcender ses limitations. Comme l'écrivait Antonio Gramsci : " Il faut avoir une parfaite conscience de ses limites, surtout si on veut les élargir".

Toute démesure implique une régression. C’est pourquoi dans la mythologie grecque, la démesure – l’Hubris – est toujours punie par Némésis, déesse de la juste colère qui remet violemment l’individu à l’intérieur des limites qu’il a franchies. 

Schopenhauer considérait l’homme comme un animal métaphysique. La Vie est Une : tuer un animal c’est opérer un suicide métaphysique en détruisant notre instinct vital. 

Le débat qui oppose progressisme et conservatisme reste très superficiel. Il n’est pas d’évolution sans conservation c'est à dire sans mémoire. Conserver c’est retenir. Avant de les transcender de manière créatrice, tout saut évolutif retient et récapitule les étapes qui l'ont précédé. Chaque vie humaine ne peut se comprendre que dans la perspective d’une mémoire qu’elle honore et d’une tradition dont elle hérite pour la transformer au rythme juste de l’évolution universelle.

Toute véritable émancipation naît de la participation de la conscience individuelle et collective à la dynamique créatrice et intégrative de l’évolution. 

Comme un fleuve est plus que la somme de ses affluents, une vie humaine est plus que la somme des influences ancestrales qui contraignent son courant entre les rives de leurs déterminismes.

Plus l'individu évolue, plus sa conscience se développe et plus la vérité se dévoile. Évolution, développement et dévoilement sont trois expressions d'une même dynamique intégrative propre à la vie/esprit. 

La sagesse est ce point d’équilibre où l’intuition guide la raison sur la voie du milieu en opérant une synthèse supérieure entre des pôles à la fois opposés et complémentaires. 

Alors que la logique est exclusive, l'intuition est intégrative.

A tous les stades de sa manifestation, la vie est - fondamentalement - présence d’esprit. 

Rendre grâce au mystère qui nous habite autant que nous l’habitons. 

Quand on refoule la puissance créatrice de l’imaginaire, elle revient sous la forme dévastatrice de l'idéologie, ce fétichisme des idées auquel tant de vies ont été sacrifiées. 

Penser c’est proposer des réponses inédites à des questions inouïes. 

Résistant à l’entropie de la corruption, l’intégrité est cette cohérence interne d’où émerge toute création. 

La vérité archétypale du mythe subvertit toujours le mythe d’une vérité abstraite.

Le sens est à l'esprit ce que le sang est au corps : un flux vital. Une société insensée est exsangue jusqu à l'agonie.

Si on n'a pas développé une sensibilité intemporelle, le temps passe à travers nous comme une pluie acide qui mouille jusqu’à l’os.

S’élancer vers l’autre par amour et l’enlacer par désir au risque de s’en lasser par habitude.

Civilisation en péril cherche dans l'urgence des professeurs de l'être
capables de nous libérer des illusions morbides de l'avoir et du paraître.

Ressources


Abécédaire de la méditation (1) et (2) - Devoir de Vacance

Critique de la Valeur  Site dédiée à la théorie critique du capitalisme et à la "sortie de l'économie".

Les billets du Journal Intégral inscrit sous le libellé Sortir de l'économie

jeudi 8 décembre 2016

Libération Animale


La façon dont nous traitons ceux qui sont, comme nous, des êtres sensibles porte dans le monde un message d'obscurité et de mort ou un message de lumière et de vie. Matthieu Ricard 


Dans notre dernier billet, nous évoquions la twitterature d’Edgar Morin qui partage tout au long de l’année, sous formes de tweets, ses réflexions inspirées par une pensée de la complexité. Nous y faisions le lien avec les billets précédents qui traitaient de la Spirale Dynamique, en montrant comment le passage à la Seconde phase de la Spirale Dynamique correspond à l’émergence d’une pensée complexe - fondée sur la relation, le mouvement et la globalité - dont Edgar Morin est un représentant emblématique. A cette pensée complexe pour laquelle "tout est lié" correspond l'émergence d'une sensibilité empathique qui participe intimement et intuitivement à l’interdépendance et l’unité du vivant à travers tous les règnes.

Fondé sur l'antispécisme qui rejette toute forme de discrimination fondée sur l'espèce, le mouvement de libération animale participe de cette sensibilité émergente dont Edgar Morin se fait le porte-parole en écrivant le 24 Septembre deux tweets qui ont fait réagir les réseaux sociaux en suscitant un débat virulent : « L'humanité est nazie pour le monde animal. » « Animaux pour abattoirs, animaux pour laboratoires subissent des Auschwitz permanents. » La première de ces phrases est une citation d'Isaac Bashevis Singer (1904-1991), écrivain yiddish, lauréat du prix Nobel de littérature en 1978. En la reprenant à son compte, Edgar Morin dénonce la souffrance infligée à ces êtres vivants et sensibles que sont les animaux : chaque heure dans le monde 7 millions d'animaux terrestres et 115 millions d'animaux marins sont tués pour notre usage !... Ceux qui s'interrogent sur la pertinence d'une telle citation peuvent se reporter au livre de Robert Patterson "Un éternel Treblinka" (voir liens dans la rubrique Ressources).

Un profond mouvement de la conscience collective - particulièrement chez les jeunes générations - n’accepte plus l’évidence de la souffrance, de l'exploitation et de la maltraitance animales comme hier on n’a plus accepté celle de l’esclavage et de la torture, du racisme, du sexisme et de l'homophobie. Ce mouvement s’est exprimé le 22 Novembre à travers un manifeste signé par 26 organisations non gouvernementales (ONG) de protection animale réunies pour la première fois au sein d’un collectif baptisé Animal Politique. Ce manifeste formule 30 propositions visant à inscrire la condition animale dans le prochain débat électoral.

Ne mangeant plus de viande depuis plus de 40 ans, le drôle d’animal qui écrit ces lignes se sent donc concerné par la parution d’un tel manifeste qui est le signe évident de cette transformation des mentalités promue par Edgar Morin dans notre billet précédent. Pour mieux saisir le sens de cette évolution, nous proposerons un article paru dans Le Monde où Audrey Garric évoque le manifeste Animal Politique, suivi d'un article de Matthieu Ricard, paru dans Le Point  à l’occasion de ce manifeste, où le moine bouddhiste, docteur en génétique, pose un regard à la fois humaniste et spirituel sur la souffrance animale : « La façon dont nous traitons ceux qui sont, comme nous, des êtres sensibles porte dans le monde un message d'obscurité et de mort ou un message de lumière et de vie... Près de 20 % des étudiants américains sont végans... Un changement de société et de culture est en cours, même s'il prend du temps. » 

Célébrer la vie 

Dans un billet intitulé Matthieu Ricard, L’entraînement de l’esprit, nous évoquions notamment son ouvrage Plaidoyer pour les animaux, où l’auteur nous invite à étendre notre bienveillance à l’ensemble des êtres sensibles, dans l’intérêt des animaux mais aussi des hommes. Une telle vision jette un regard lucide et cru sur la période de Noël qui se réduit trop souvent aujourd’hui à une fête commerciale et gastronomique fondée sur le massacre de sept milliards d'animaux !

C'est ainsi que dans le billet intitulé Noël Évolutionnaire, daté du 23 Décembre 2014, nous analysions le paradoxe selon lequel les fêtes de Noël qui célébraient les forces créatrices de la vie et de la nature, révèlent aujourd’hui toute la morbidité d’un délire marchand fondé sur la souffrance animale. Cette folie consumériste nous a fait totalement perdre le sens cosmique et symbolique des fêtes qui, depuis des temps immémoriaux et bien avant le christianisme, célèbrent le solstice d'hiver. En effet, à travers la victoire de la lumière sur les ténèbres, le solstice d’hiver était traditionnellement l’occasion de célébrer la puissance créatrice de la vie/esprit sur les forces inertielles et destructrices de l'entropie. En suivant les diverses étapes qui furent celles des fêtes païennes, des célébrations chrétiennes et des rituels marchands, nous sommes progressivement passés du cosmique au cosmétique et de l'astronomie à une gastronomie qui, trop souvent, détruit la vie au lieu de la célébrer. Nous sommes passés de la célébration de la foi à celle du foie gras ! 

En réaction à une telle dérive et pour sensibiliser les parisiens à la cause animale, Matthieu Ricard a collaboré avec la pâtisserie Hugo et Victor pour créer une bûche entièrement vegan :  " Ce qui m'a tenté, c'est l'idée de la fête, de la célébration. Le fait que tout le monde, sans exception, puisse se réjouir et parfaitement se nourrir sans que cela soit au prix de la souffrance et de la mort des animaux, me paraissait une belle façon de célébrer Noël."  Une partie des bénéfices tirés de cette opération sera reversée à Karuna-Shechen, l'association de Matthieu Ricard qui offre des prestations de santé et des service éducatifs et sociaux aux populations défavorisées en Inde, au Népal et au Tibet.

Les deux textes que nous vous proposons ci-dessous sont donc l’occasion de réfléchir à la façon dont nous pouvons célébrer la vie durant la période des fêtes en évitant de participer à l’exploitation et à la souffrance animales. C’est aussi l’occasion aussi de réfléchir sur la façon dont cette évolution des sensibilités, fondée sur un profond respect du vivant, correspond et participe à l’émergence d’une nouvelle vision du monde. Une réflexion que nous aurons l’occasion de développer dans un prochain billet. 

26 ONG lancent un manifeste pour inscrire la condition animale dans le débat politique. Audrey Garric

En France, chaque année, plusieurs milliards d’animaux sont utilisés pour leur chair, leur peau, leur pelage, leur plumage, mais aussi pour l’expérimentation scientifique, le divertissement ou pour tenir compagnie. Pourtant, malgré « l’enjeu sociétal majeur que représente leur sort et la manière dont ils sont traités », « l’engagement des politiques pour améliorer leur situation reste très insuffisant et en décalage avec les attentes de la majorité des Français ». Dressant ce double constat, 26 organisations non gouvernementales (ONG) de protection animale (CIWF, la Fondation Brigitte Bardot, la Fondation 30 millions d’amis, L214, Peta, la SPA, Sea Shepherd, etc.) se sont réunies pour la première fois au sein d’un collectif, baptisé Animal Politique.

Mardi 22 novembre, après six mois de travail, elles ont publié un manifeste du même nom, qui formule 30 propositions visant à inscrire la condition animale dans le débat politique des prochaines échéances électorales. Le document « est destiné aux candidats à l’élection présidentielle et aux élections législatives afin qu’ils prennent publiquement position sur son contenu », écrivent les associations. Les mesures sont classées en six catégories, selon l’usage qui est fait des bêtes – les animaux d’élevage, d’expérimentation, de divertissement et de spectacle, de compagnie, de la faune sauvage – ainsi que leur place dans la société


En ce qui concerne l’élevage, principal mode d’exploitation des animaux – un milliard d’animaux terrestres sont abattus chaque année en France à des fins alimentaires – les associations appellent à « favoriser le plein air » et à « interdire les cages ainsi que les conditions d’élevage incompatibles avec leurs besoins » physiologiques et comportementaux. Elles demandent également la fin des « pratiques d’élevage douloureuses (castration à vif, écornage, gavage) », et donc de la production de foie gras. Les associations souhaitent, en outre, « limiter la durée des transports d’animaux vivants », entre l’élevage et l’abattage, et « mettre un terme à leur exportation hors de l’Union européenne » – chaque année, des dizaines de milliers d’entre eux parcourent des milliers de kilomètres jusqu’à la Turquie souvent sans nourriture ni eau. 

Enfin, sur l’épineux sujet des abattoirs, visés par des enquêtes après les vidéos-chocs de L214 dénonçant des cas de maltraitance, les ONG demandent de « rendre systématique l’étourdissement avant toute mise à mort ». Cette pratique (par électronarcose, par tige perforante ou par gazage), obligatoire en France depuis 1964, fait l’objet d’une dérogation dans le cas de l’abattage rituel. Mais actuellement, ni le culte juif ni le culte musulman ne souhaitent revenir dessus. Elle n’est par ailleurs pas toujours respectée dans l’abattage conventionnel, les images filmées en caméra cachée montrent en effet de très nombreux cas d’animaux saignés en pleine conscience. Dans les autres domaines, les propositions sont tout aussi audacieuses : abolir les corridas et les combats de coqs, interdire la présence d’animaux sauvages et domestiques dans les cirques, reconnaître à l’animal sauvage le statut juridique d’être vivant doué de sensibilité – seul l’animal domestique en jouit actuellement –, réformer la chasse ou encore prohiber la cession d’animaux par les particuliers « sur les sites marchands et les réseaux sociaux » et les euthanasies « non justifiées médicalement ». 

Côté institutionnel, les ONG souhaitent la création d’une autorité administrative indépendante pour favoriser les méthodes de remplacement des animaux dans les protocoles d’expérimentation animale, ainsi que l’institution d’un « organe autonome dédié aux animaux, indépendant du ministère de l’agriculture », à l’image du ministère du bien-être animal en Belgique. Le 18 octobre, une vingtaine de personnalités scientifiques et juridiques – parmi lesquelles la philosophe Élisabeth de Fontenay, le psychiatre et éthologue Boris Cyrulnik, le moine bouddhiste et biologiste Matthieu Ricard – demandaient eux aussi la création d’un secrétariat d’État chargé de la condition animale

"Remettre en question les habitudes et les normes"

Un mouvement pour la cause des animaux est à l’œuvre dans l’Hexagone, porté par nombre d’intellectuels, de scientifiques, d’associations et de citoyens. Les livres et les colloques se multiplient sur le sujet, les cas de maltraitance animale sont vertement critiqués sur les réseaux sociaux, un diplôme universitaire en droit animalier a vu le jour et un parti animaliste a même été créé, le 14 novembre, rejoignant ainsi la quinzaine de partis qui se consacrent à la cause animale dans le monde. 

"Si la prise de conscience est massive, il manque des actions politiques et juridiques concrètes pour la traduire dans les faits", note Lucille Peget, coordinatrice du projet Animal Politique. De fait, en Europe, d’autres pays ont davantage politisé la question du bien-être animal. Elle est par exemple intégrée dans les Constitutions allemande ou autrichienne et le Parti pour les animaux néerlandais, créé en 2002, est représenté au Parlement européen depuis 2014. 

Reste que l’opinion publique est ambiguë sur ces questions. Chez la majorité des Français, chérir les animaux et ne pas leur vouloir de mal n’implique pas forcément de cesser de s’en nourrir, un phénomène théorisé sous le nom de « paradoxe de la viande », qui s’explique par le mécanisme psychologique de la dissonance cognitive. « L’intelligence de l’humain repose sur ses capacités à déconstruire et à remettre en question ses habitudes, ses traditions et ses normes, à évoluer, explique Lucille Peget. Mais on ne peut pas tout changer d’un coup : il serait irréaliste de demander à interdire totalement l’élevage ou l’abattage. » 

« C’est le prochain pas de civilisation, après l’abolition de l’esclavage, de la torture et la reconnaissance des droits des hommes et des femmes, juge Matthieu Ricard, présent lors du lancement du manifeste. Il n’y a aucun argument moral qui ne tienne pour infliger des souffrances non nécessaires et des tortures incessantes à des êtres vivants sensibles. » Et l’auteur de Plaidoyer pour les animaux, végétarien depuis quarante-cinq ans, de poursuivre : « Le nombre de chasseurs a diminué de moitié en vingt ans dans notre pays, plus de 70 % des Français veulent abolir la corrida et les jeunes sont de plus en plus nombreux à être végétariens. Un changement de culture et de société est en cours, même s’il prend du temps. » 

La souffrance d'un animal est plus importante que le goût d'un aliment. Matthieu Ricard

Matthieu Ricard à la conférence de présentation d'Animal Politique

Nous sommes tout, ils ne sont rien. La valeur de la vie humaine est, à juste titre, infinie. La valeur de la vie animale est-elle pour autant nulle ? Chaque heure dans le monde nous tuons 120 millions d'animaux terrestres et marins. Cela fait beaucoup : en une seule semaine, davantage d'animaux tués que toutes les victimes humaines de toutes les guerres ! Nous avons fait d'immenses progrès de civilisation. Nous n'acceptons plus ce qui a pourtant longtemps semblé normal : l'esclavage ou la torture. Nous avons adopté la Déclaration universelle des droits de l'homme. Nous continuons d'améliorer le statut des femmes et des enfants. Nous réduisons la pauvreté dans le monde. 

Mais quand nous en venons aux animaux, le massacre en masse reste la règle. Les 8 millions d'espèces qui peuplent encore notre planète sont nos concitoyens. Ils aspirent à vivre, à éviter la souffrance. Nous aimons les chiens, mais mangeons les porcs et nous nous vêtissons des vaches. Il y a là une incohérence fondamentale. La valeur des vies innocentes est non négociable. Il n'y a aucun excès de sentimentalisme à être choqué par les horreurs révélées par les vidéos tournées dans les abattoirs. Certains affirment que la production de viande est un mal nécessaire. Aujourd'hui, n'étant plus nécessaire, c'est un mal tout court. De fait, tout le monde y perd : la production industrielle de viande est la deuxième cause d'émission de gaz à effet de serre (15 %), après les habitations et avant les transports. Elle entretient la pauvreté dans le monde : 750 millions de tonnes de céréales, qui pourraient nourrir localement un milliard de personnes, sont expédiées d'Amérique latine et d'Afrique vers les pays du Nord, pour nourrir nos animaux destinés à devenir de la viande. Cerise sur le gâteau, plusieurs centaines d'études épidémiologiques montrent que la consommation régulière de viande est nocive pour la santé (source OMS 2015). 

Il m'est arrivé de demander à une assemblée : « Êtes-vous en faveur de la justice et de la morale ? » Tout le monde a levé la main. J'ai demandé ensuite : « Est-il juste et moral d'infliger des souffrances non nécessaires à des êtres sensibles ? » Personne n'a levé la main. En vérité, aucun argument moral ne permet de justifier nos comportements à l'égard des animaux.  Récemment, un dimanche matin un groupe de chasseurs fusil à l'épaule s'était rassemblé sur la place de l'église d'un petit village du sud de la France. Un enfant, fils d'amis, s'arrêta devant eux et leur demanda ingénument : « Vous allez tuer ? » Il n'eut droit qu'à un silence gêné, des sourires de connivence et des regards en coin. Tuer par plaisir, c'est préférer la mort à la vie. Est-ce là ce que l'humanité peut offrir de mieux ? Vingt millions de Français se promènent dans les bois. Il ne reste plus que 1,2 million de chasseurs. Pourtant, ce sont ces derniers qui font la loi. Sont-ils, comme ils l'affirment, les meilleurs protecteurs de l'équilibre biologique ? En 1974, l'interdiction de la chasse dans le canton de Genève fut approuvée par référendum par 72 % de la population. Malgré les cris d'alarme des chasseurs, tout s'est bien passé : la faune du canton a retrouvé sa richesse et sa diversité – fort appréciées par les promeneurs – et son équilibre naturel. Les sangliers et cervidés n'ont pas envahi les forêts et les champs cultivés.

Une Bonne Nouvelle

En incluant tous les êtres sensibles dans le cercle de la bienveillance, nous n'aimons pas moins les humains, nous les aimons mieux, car notre bienveillance est plus vaste. L'association humanitaire que j'ai cofondée, Karuna-Shechen, aide chaque année 300 000 personnes en Inde, au Népal et au Tibet dans le domaine de la santé, de l'éducation et des services sociaux. Le fait de m'occuper aussi des souffrances infligées aux animaux ne diminue en rien ma détermination à soulager les souffrances humaines. Bien au contraire. Et ne pas se soucier des animaux n'améliorerait en rien le sort terrible des victimes d'Alep en Syrie ou du Darfour.

La bonne nouvelle est que le végétarisme et le véganisme sont en plein essor parmi les jeunes. J'ai récemment déjeuné à la cantine de la grande université de Princeton : les 50 premiers mètres du self-service étaient surmontés de panneaux « Végan ». Près de 20 % des étudiants américains sont végans. Cette transition vers une alimentation non-violente est possible et économiquement viable. Considérez votre envie d'un steak saignant : elle aboutit à la production industrielle de viande.

À l'inverse, une pensée de compassion pour les animaux conduit à un monde meilleur et à une économie qui emploie tout autant de personnes, occupées à produire des aliments sans souffrance animale et préférables pour la santé humaine. Nous sommes à court d'excuses. La souffrance d'un animal est plus importante que le goût d'un aliment. La façon dont nous traitons ceux qui sont, comme nous, des êtres sensibles porte dans le monde un message d'obscurité et de mort ou un message de lumière et de vie. 

Ressources 

Animal Politique  Le Manifeste. Trente propositions pour mettre la condition animale au cœur des enjeux politiques.


La souffrance d'un animal est plus importante que le goût d'un aliment  Matthieu Ricard. Le Point

Animal Politique  La conférence de presse de présentation Vidéo You Tube

Une bûche signée Matthieu Ricard  Le Figaro -  Karuna-Shechen Association de Matthieu Ricard dédiée aux projets humanitaires dans les régions himalayennes.

A propos du tweet d'Edgar Morin : "L'Humanité est nazie pour le monde animal" lire : Un éternel Treblinka Résumé sur le Site Végétik. et  Eternal Treblinka  Anne Renon. Cahiers antispécistes

Éternel Treblinka de Charles Patterson, présentation de l'éditeur sur Amazon

Charles Patterson : l'abattage, un laboratoire de la barbarie Recension du livre de Charles Patterson : Un éternel Treblinka par Élisabeth de Fontenay dans Le Monde.

Les Cahiers antispécistes Une revue fondée en 1991 pour remettre en cause le spécisme et pour explorer les implications scientifiques, culturelles et politiques d'un tel projet.

La libération animale :  et après ? Conférence en vidéo avec Peter Singer, Matthieu Ricard et Aymerik Caron.  Organisée par L214 et les Cahiers Antispécistes

Plaidoyer pour les animaux  Matthieu Ricard

La littérature et la condition animale. Répliques, une émission d'Alain Fikielkraut. France Culture