mardi 15 novembre 2011

Psychothérapie intégrative (2)


Photo A. Gourhant

Ce n'est pas un signe de bonne santé d'être bien adapté à une société profondément malade. Krishnamurti
Dans le billet précédent, nous présentions le site Psychothérapie intégrative d’Alain Gourhant dédié à l’esprit intégratif et à ses diverses applications à la création et à la thérapie. Dans celui-ci, nous présenterons certains éléments du contexte culturel et épistémologique permettant une nouvelle approche de la psyché qui se traduit notamment par l’émergence de la psychothérapie intégrative.

La psyché comme objet

Le paradigme abstrait de la modernité a inspiré une approche objective et spécialisée qui applique au champ psychique une épistémologie et une méthodologie utilisées pour la connaissance des phénomènes physiques. C’est ainsi que la modernité a voulu faire de la psychologie une science en réduisant la psyché à un objet d’observation et les phénomènes psychiques à leurs expressions comportementales. Comme si pour comprendre l’amour, on se contentait de répertorier et de classer les positions de l’accouplement !...

Dans Science and Human Behaviour, B.F. Skinner, un des papes du comportementalisme, écrivait ceci : « Puisque l’on affirme que les évènements mentaux ou psychiques ne se prêtent pas aux mesures de la physique, nous avons une raison de plus pour les rejeter ». C’est ainsi qu’«intelligence » et « idées » lui apparaissaient comme des mots vides « inventés dans le seul but de fournir des informations fausses » !...

Autrement dit, la conception moderne de la psyché est littéralement obscène : focalisée sur ce qui est observable et donc mesurable, elle nie l’essentiel qui ne peut l’être. En voulant faire de la psyché un objet, on fait l’impasse sur ce qui constitue l’essence même du sujet : une faculté créatrice participant intimement à la dynamique évolutive qui est au cœur de la vie.

Le réductionnisme abstrait tend à dénier cette dimension qualitative et dynamique que les traditions, les mythes et la littérature exprimaient à travers la figure centrale de la métamorphose. Qu’est ce donc que la métamorphose si ce n’est ce courant intégratif de la psyché qui trans-forme l’individu à travers une série de stades évolutifs de plus en plus complexes et intégrés comme la chenille se transforme en papillon et l’enfant en adulte à travers divers stades : fusionnel, égocentrique, ethnocentrique et universaliste « mondocentré ».

Une vision caricaturale de la psyché


Alors que le rôle de l’intellect est de distinguer et de séparer, la psyché est un agent de liaison entre l’être humain et les divers milieux où il évolue. Au cœur de cette dimension relationnelle propre à la psyché : son caractère dynamique et associatif, adaptatif et évolutif. Vouloir appréhender la dynamique relationnelle propre à la psyché à travers une approche abstraite et une logique de spécialisation, c’est vouloir vider l’eau d’une baignoire avec une fourchette.

Parce qu’il s’avérait incapable de connaître toute la profondeur, la dynamique et la complexité de la psyché, l’ancien paradigme en imposait une vision à la fois réductrice et caricaturale, castrée de son enracinement archaïque et ancestral, de son implication collective, à la fois sociale et culturelle, comme de sa connexion intuitive aux états supérieurs de conscience.

On a ainsi formaté un individu abstrait et déraciné - sans tradition, sans appartenance et sans transcendance - correspondant aux normes fonctionnelles de la pensée technocratique. Tous ceux qui ne se reconnaissent pas dans cette vision réductrice de la psyché sont considérés comme de doux dingues ou de dangereux hérétiques qui remettent en question « l’esprit scientifique » au cœur de la pensée dominante.

Un processus de normalisation

Cette approche réductionniste a inspiré nombre de thérapies, toutes plus ou moins décalquées d’un modèle médical profondément mécaniste. Comme le firent les prêtres avant eux, les « psy » ont souvent exercé un rôle de normalisation qui consiste à adapter à une société malade des sujets qui souffrent d’être trop vivants pour une culture mortifère déniant leur créativité singulière.

Tout processus de normalisation est un dispositif de conditionnement à travers lequel l’individu intériorise les comportements, les ressentis et les références correspondant aux valeurs et aux normes dominantes, souvent au détriment de ce qui est le plus vivant en lui : son originalité et son imaginaire personnels ainsi que ses intuitions et son inspiration créatrice.

Or, comme le dit Krishnamurti : « Ce n'est pas un signe de bonne santé d'être bien adapté à une société profondément malade. ». Ce que l’on pourrait traduire de la manière suivante : plutôt que de vouloir adapter l’individu à une société et à une culture en crise, c’est un signe de bonne santé que de participer à la création de nouvelles formes culturelles et sociales inspirées par la dynamique de l’évolution. L’émergence d’un paradigme correspondant au nouveau stade évolutif apparaît dès lors comme un signe de régénération.

Le mouvement créateur de la vie

Alors que les institutions et les mentalités inspirées par l’ancien paradigme sont en train de s’écrouler sous le poids d’une crise systémique, le paradigme émergeant s’annonce comme un profond mouvement de régénération vitale et créatrice. Selon Alain Gourhant : « La psychothérapie intégrative appartient au mouvement de la vie qui aime se déployer en une créativité absolue et insolente...
Les quatre cent techniques de psychothérapies différentes, annoncées par les médias, font partie de ce mouvement de créativité ininterrompue, de cette psychothérapie intégrative qui combine à l'infini les différentes techniques provenant des courants les plus importants de la psychothérapie
. »
Il est bien entendu qu’un tel mouvement de régénération se heurte toujours à la résistance des préjugés dominants qui mène des combats d’arrière garde pour garder les avantages liés à leurs positions dogmatiques. Mais qu’importe !... Le mouvement créateur de la vie est plus fort qui invente toujours des formes nouvelles adaptées à la dynamique de son évolution alors que les anciennes formes se désintègrent progressivement parce qu’ayant fait leur temps, elles ne sont plus du tout adaptées à celui qui vient.

Ceux qui participent à cette dynamique évolutive trouveront dans le site d’Alain Gourhant de nombreuses réflexions sur cette nouvelle approche de la psyché qui inspire la psychothérapie intégrative. Ils pourront notamment se référer au cours qu’il donne sur la psychothérapie intégrative pour le Diplôme Universitaire de la faculté de médecine et de pharmacie de Dijon consacré aux troubles neuro-fonctionnels et à la médecine intégrative. Pour le journal Santé Intégrative, Alain Gouhrant a aussi écrit de nombreux articles, entretiens et critiques de livres concernant à la fois la psychothérapie intégrative et la médecine intégrative.

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