mercredi 16 décembre 2020

SOMMAIRE 6 (2020) Joyeux Confinoël !

 
Malheur à l’homme qui, au moins une fois, n’a pas tout remis en question. Pascal 

A l’occasion du dixième anniversaire du Journal Intégral, nous avons proposé au début de l'année une série de cinq billets qui constituent le sommaire des 355 textes postés durant la décennie écoulée. Une manière d'effectuer un bilan en jetant un regard sur le chemin parcouru afin d’aborder la nouvelle décennie de manière créative. Et créative, cette année 2020 ne manqua pas de l’être pour faire face et s'adapter, de manière individuelle et collective, à une pandémie virale qui a changé certains de nos modes de vie et de pensée. 

Nous finirons 2020 comme nous l’avons commencé : en proposant un sommaire, en l’occurrence celui des billets de blog écrits durant cette année "extra-ordinaire". Une occasion pour le lecteur de suivre une réflexion qui vise à dépasser aussi bien l'hégémonie du techno-capitalisme que les délires complotistes qui expriment le désir de s'en libérer sans avoir les moyens (cognitifs et intellectuels) pour le faire. Conformisme idéologique et complotisme paranoïaque sont en fait les deux faces d'une même monnaie de singe totalement dévaluée.

Comprendre le sens profond de cette crise sanitaire c'est la considérer, de manière globale, au-delà de la diversité de ses manifestations, comme un signe des temps nous alertant sur l'urgente nécessité d'un saut évolutif. Ces temps troublés que nous vivons nécessitent d'établir de nouvelles cartographies pour se repérer dans la complexité multidimensionnelle d'une monde en mutation, puis de les partager avec ceux qui ont des oreilles pour entendre et des yeux pour voir !...

Joyeux Confinoël !

Ce Noël en temps de pandémie peut-être une occasion inespérée de s’interroger sur le délire consumériste d'une société qui a perdu le sens cosmique et initiatique propre à une période de l'année où, depuis des temps immémoriaux, le solstice d'hiver était l'occasion de célébrer la victoire de la lumière sur les ténèbres, de la puissance créatrice de la vie/esprit sur les forces inertielles et destructrices de l'entropie. 

Au fil du temps nous avons progressivement glissés de la participation cosmique propre aux fêtes païennes à la liturgie religieuse des célébrations chrétiennes pour aboutir aux rituels marchands d'aujourd'hui fondés sur la destruction du vivant à travers, notamment, le massacre de sept milliards d'animaux. C'est ainsi que nous sommes passés d'une vision cosmique et astronomique au règne marchand de la gastronomie et des cosmétiques comme nous sommes passés insensiblement de la foi et du sacré au foie gras et au sucré !... 

L'épreuve de la pandémie et du confinement peut être, pour certains, l'occasion de réfléchir et de se libérer de cette colonisation de l'imaginaire par la marchandise pour retrouver le sens sacré et initiatique des fêtes du solstice, symboles de renouveau et de renaissance. Après l'emprise ténébreuse de la nuit advient l'aurore lumineuse d'un nouveau jour, plein de promesses.

 Chaque titre correspond à un lien avec le texte d'origine.

356 - SOMMAIRE 1 (2010) -  07/01/20 

Face au monde qui vient, mieux vaut penser le changement que changer le pansement. Francis Blanche 

357 -  SOMMAIRE 2 (2011) -  21/01/20 

Nous sommes les abeilles de l’univers. Nous butinons éperdument le miel du visible pour l’accumuler dans la grande ruche d’or de l’invisible. Rainer Maria Rilke 

358 -  SOMMAIRE 3 (2012/2013) - 04/02/20 

Le feu meurt par la compagnie des cendres. Rumi 

359 - SOMMAIRE 4 (2014/2015/2016) - 18/02/20 

Et ceux qui dansaient furent considérés comme fous par ceux qui ne pouvaient entendre la musique. Nietzsche 

360 - SOMMAIRE 5 (2017/2018/2019) - 03/03/20 

Les révolutions éclatent quand elles sont déjà terminées. Talleyrand 

361 - UN PROJET EDITORIAL - 17/03/20 

Mais tout ce qui est précieux est aussi difficile que rare. Spinoza 

Dans le carrefour spatio-temporel où nous vivons, nous pouvons subir la dynamique régressive qui conduit à un effondrement global ou participer à une dynamique créatrice vers un nouveau stade du développement humain. Cette dernière nous fait cheminer sur la voie d'une "synthèse évolutionnaire" qui, dans une approche non-duelle, réunit deux visions du monde - l'une spirituelle et l'autre matérialiste - qui peuvent apparaître contradictoires alors même qu’elles sont complémentaires. Aujourd'hui, l'approche spirituelle peut être incarnée par un mouvement intégral, héritier de la contre-culture, qui cartographie les divers stades du développement humain dans le domaine de la conscience et de la culture, à partir d'une épistémologie inclusive qui redonne à l'intuition et à la spiritualité leur rôle fondamental. (Cf. Introductions à la vision intégrale)

Héritière du progressisme européen, l'approche matérialiste peut être incarnée par une critique sociale radicale qui déconstruit avec rigueur les grandes catégories  du capitalisme pour "sortir de l'économie". Une telle déconstruction permet de se libérer du paradigme dominant pour participer à l'émergence de nouvelles formes de relations humaines et d'organisations sociales profondément connectées au milieu naturel et au monde du vivant.  C'est ainsi que la cartographie du développement humain d'un côté et la compréhension de l'évolution sociale de l'autre permettent de mieux comprendre le saut qualitatif à effectuer dans les champs de la conscience, de la culture et de la société pour résister au déchaînement des forces entropiques à l’œuvre dans l'effondrement en cours.

362 - L’ECONOMIE OU LA VIE - 07/04/20 

Remerciez-moi : je vous place au pied de la bifurcation qui structurait tacitement vos existences : l’économie ou la vie. Monologue du Virus 

 En son temps, dans un livre intitulé Nous qui désirons sans fin, le situationniste Raoul Vaneigem avait résumé ce carrefour évolutif de la manière suivante : " Nous sommes dans le monde et en nous-mêmes au croisement de deux civilisations. L'une achève de se ruiner en stérilisant l'univers sous son ombre glacée, l'autre découvre aux premières lueurs d'une vie qui renaît l'homme nouveau, sensible, vivant et créateur, frêle rameau d'une évolution où l'homme économique n'est plus désormais qu'une branche morte". 

Paru sur le site Lundi Matin, un texte intitulé Monologue du virus fait écho à celui de Vaneigem. L’auteur (anonyme) voit dans la pandémie actuelle à la fois la manifestation d’un système aussi délirant que destructeur (qui conduit à l’effondrement) et la possibilité de dépasser ce système pour bifurquer vers une autre voie qui est tout simplement celle de la vie dans toute sa plénitude et dans la diversité de ses expressions.

363 - L’ART DE LA CONVERSION -  23/04/20 

Le monde qui marchait sur la tête est en train de remettre ses idées à l'endroit. Coline Serreau 

Ce n'est pas parce qu'il marche cul par-dessus tête que ce monde est fou. C'est parce qu'il est fou qu'il marche cul par-dessus tête. Marcher cul par-dessus tête dans le champ de la conscience c'est positionner l'égo au-dessus de l'intuition spirituelle pour asservir celle-ci au lieu de la servir. Marcher cul par-dessus tête dans le champ de la culture c'est mettre la raison abstraite et analytique au-dessus d'une vision globale et synthétique en imposant ainsi une science sans conscience.

Marcher cul par-dessus tête dans le champ social c'est placer la valeur marchande au-dessus des valeurs communes en faisant de l'économie une idéologie totalitaire qui détruit les milieux sociaux et naturels. Conscience, culture et société sont ainsi l'objet d'une inversion systémique qui conduit de manière inéluctable à l'effondrement. A moins qu'un saut évolutif ne produise une conversion systémique - nommée Métanoïa par les anciens - qui consiste à remettre tout simplement l'envers à l'endroit. Un art de la conversion qui nous libère de la paranoïa ambiante où chacun - séparé de lui-même - voit dans l'autre son ennemi. 

364 - AUTODESTRUCTION OU DEVELOPPEMENT INTEGRAL - 12/05/20 

Que les choses continuent comme avant, voilà la catastrophe. Walter Benjamin 

Selon l’auteur du Monologue du Virus : « L’économie est le ravage. C’était une thèse avant le mois dernier. C’est maintenant un fait. » A cet état de fait, les individus les plus créatifs réagissent par un coup d’état d’esprit qui s’exprime à travers un mot d’ordre : sortir de l’économie. Dans la perspective intégrale qui est la nôtre, cette sortie de l’économie passe par un saut évolutif vers un nouveau stade du développement humain qui implique une transformation systémique de la conscience, de la culture et de la société. La sortie de l'économie ne pourra donc s'effectuer sans une évolution de la conscience à laquelle nous nous intéresserons dans ce billet à partir d'un texte de Gary Zemp, membre de "Politique Intégrale", un parti politique suisse et novateur. 

A l’alternative entre la vie et l’économie sur le plan social correspond une autre alternative sur le plan de la conscience et de la subjectivité, évoquée en ces termes dans cet article écrit en Juin 2019 et intitulé Auto-destruction ou développement intégral : « L’humanité se trouve devant un choix existentiel : ou elle persiste sur la voie de l’autodestruction tracée par le modernisme capitaliste ou elle se décide pour la voie intégrale, créative et constructive, une voie de développement personnel et social de la conscience. » 

365 - LES DEUX COURONNES - 04/06/20 

Le temps est venu d'appréhender l'ensemble des crises écologiques, climatiques, sociales, économiques et sanitaires comme une seule et même crise : une crise de l'excès. Nicolas Hulot

Quelques-uns ont eu la force et le courage de s'extraire de la roue où les hamsters sont condamnés à la course au profit. Ces destinées singulières et inspirées vont à contre-courant. Elles forgent dans l'épreuve la force de résister. L'expérience sensible et partagée du confinement leur a permis de comprendre la terrifiante absurdité d'une vie asservie à l'économie. Elles ont découvert un secret : la véritable pandémie c'est l'économie et la "valeur" est un virus mortel dont l'abstraction détruit ces organismes vivants et fragiles que sont les communautés humaines et leurs écosystèmes. 

On reconnaît ces sages au bandeau qu'ils portent sur la tête comme une couronne, symbole d'une souveraineté inaliénable. Dans la tradition indienne, Sahasrara, le "Chakra Couronne", au-dessus du crâne et au-delà de l'égo, ouvre sur l'immensité. Dans la Table d’Emeraude d’Hermès Trismégiste, il est écrit : "Ce qui est en bas est comme ce qui est en haut et ce qui est en haut est comme ce qui est en bas pour l'accomplissement des merveilles d'une chose unique". Ainsi entrent en résonance la couronne virale (Corona Virus) messagère de l'infiniment petit et la couronne vibrale (Chakra Coronal) qui ouvre sur l'infiniment grand. Comprenne qui pourra et pourra celui qui a vécu la crise sanitaire comme une crise salutaire. 

366 - L’ESPRIT DE VACANCE (12) VACANCE ET VACUITE - 5/08/20 

La vacuité est forme et la forme est vacuité. Sûtra du Cœur 

La série de billets consacrée à L'Esprit de Vacance propose, entre autres, une critique radicale et intégrale du travail. Par travail nous entendons non pas l'activité humaine en général, mais la forme qu'elle prend sous le capitalisme, celle d’un "travail abstrait" considéré en tant que quantité d’énergie humaine dépensée, mesurée par le temps de travail et destinée exclusivement à produire de la valeur marchande. Dans ce billet, nous mettrons cette forme de superstition moderne qu'est le culte du travail en perspective avec une sagesse millénaire ayant développée une toute autre dimension, sacrée, de l'esprit et de l'activité humaine. 

C'est ainsi que nous évoquerons l'expérience profonde de la Vacuité et du Non Agir, transmise par les plus hautes traditions spirituelles, notamment à travers les enseignements du Bouddha. C'est dans cette réalité fondatrice de la Vacuité et du Non Agir que l'Esprit de Vacance puise sa force libératrice de subversion sociale, culturelle et spirituelle. En dénaturalisant le travail, l'Esprit de Vacance permet d'imaginer et d'expérimenter de nouvelles formes de vie où l'activité humaine, dépassant son instrumentalisation par l'ego, s'intègre harmonieusement à son milieu humain et naturel. 

367 - INCITATIONS (11) CONTENTEZ-VOUS ! - 22/09/20 

La vie, ce n’est pas attendre que l’orage passe, c’est apprendre à danser sous la pluie. Sénèque 

Il y a dix ans le petit livre de Stéphane Hessel intitulé "Indignez-vous" est devenu un phénomène d’édition. Parce-que l’indignation est très insuffisante si elle n'est pas sous-tendue par une vision novatrice et parce que la résignation est inacceptable à une époque où la survie de notre espèce est menacée, l'engagement - toujours nécessaire - prend une forme nouvelle qui pourrait s'exprimer à travers un nouveau mot d’ordre : " Contentez-vous ! ". 

Ce mot d'ordre salutaire est le vecteur d'une éthique de la plénitude dans un monde en voie d'effondrement. Se contenter c’est savoir se contenir grâce à une maîtrise des limites qui conduit au contentement. Ce nouveau mot d’ordre exprime bien le lien organique entre conscience, maîtrise et plénitude : 1 - La conscience perçue comme processus de contention et de concentration de l’énergie intérieure (se contenir). 2 - La maîtrise des limites qui permettent ce processus de contention (se contenter). 3 - La sensation de plénitude qui résulte de cette maîtrise à travers le contentement (être content). 

368 - SAGESSE DU CONFINEMENT - 13/11/20 

On mesure l'intelligence d'un individu à la quantité d'incertitudes qu'il est capable de supporter. Emmanuel Kant 

Toutes les grandes traditions spirituelles ont effectué le même constat et l’ont enseigné à travers les siècles : quand, sur le plan individuel ou collectif, on devient incapable de maîtriser ses propres limites par un acte de conscience et de volonté, des limitations s’imposent de l’extérieur et font irruption, parfois de manière violente, pour freiner et stopper une extériorisation dissolvante et dangereuse pour notre intégrité physique, morale et spirituelle. Tel est le rôle fondamental d’un confinement sanitaire qui s’impose aujourd’hui à des sociétés qui transgressent les lois naturelles de la vie en imposant à leur milieu d’évolution une domination technologique éhontée et une exploitation économique profondément destructrice des ressources naturelles dont les zoonoses et les épidémies sont les conséquences mortifères. 

Le confinement est un remède qui peut s’avérer comme la meilleure ou la pire des choses. La pire quand il est vécu comme un emprisonnement qui nous confronte, de manière angoissée, à un vide existentiel que nous cherchons à éviter normalement à travers toutes sortes de diversions et de divertissements qui agissent comme autant d’addictions dont la privation nous déprime profondément. La meilleure des choses quand le confinement crée les conditions d’une conversion existentielle à l'origine d'un nouvel art de vivre fondé sur le retour aux sources de la vie et de l’esprit. 

Ressources

Dans Le Journal Intégral : Noël Evolutionnaire - Libération animaleVers une Synthèse Evolutionnaire - Introductions à la Vision Intégrale - La Métanoïa -

vendredi 13 novembre 2020

Sagesse du Confinement


On mesure l'intelligence d'un individu à la quantité d'incertitudes qu'il est capable de supporter. Emmanuel Kant 

Notre compréhension de la situation actuelle, marquée notamment par les crises sanitaires, sécuritaires et climatiques, est oblitérée par une vision disciplinaire et fragmentaire qui nous empêche trop souvent d’en saisir, de manière globale, son sens profond et essentiel. Nous avons tenté de développer cette vision globale dans nos différents billets depuis le printemps. Dans le dernier de ces billets nous évoquions le principe de sagesse qui doit être au cœur de la mutation actuelle : « Contentez-vous ! ». Se contenter c’est savoir se contenir grâce à une maîtrise des limites qui conduit au contentement

Toutes les grandes traditions spirituelles ont effectué le même constat et l’ont enseigné à travers les siècles : quand, sur le plan individuel ou collectif, on devient incapable de maîtriser ses propres limites par un acte de conscience et de volonté, des limitations s’imposent de l’extérieur et font irruption, parfois de manière violente, pour freiner et stopper une extériorisation dissolvante et dangereuse pour notre intégrité physique, morale et spirituelle. Ce processus de limitation s’exerce aussi bien pour l’individu que pour sa communauté, aussi bien pour l’espèce humaine que pour toutes les autres formes de vie. 

Tel est le rôle fondamental d’un confinement sanitaire qui s’impose aujourd’hui à des sociétés qui transgressent les lois naturelles de la vie en imposant à leur milieu d’évolution une domination technologique éhontée et une exploitation économique profondément destructrice des ressources naturelles dont les zoonoses et les épidémies sont les conséquences mortifères. Comme la prison est le devenir des délinquants et des criminels qui ne respectent pas les lois de la société, le confinement est le devenir de ceux qui, ne respectant pas les lois de la vie, se heurtent aux limites imposées par celles-ci. Pour le dire d’une manière beaucoup plus triviale : de nos jours, le confinement est un remède à la connerie humaine. 

Et ce remède peut s’avérer comme la meilleure ou la pire des choses selon la façon dont on le vit. La pire quand il est vécu comme un emprisonnement qui nous confronte, de manière angoissée, à un vide existentiel que nous cherchons à éviter normalement à travers toutes sortes de divertissements et de diversions (dont le travail et la consommation) qui agissent comme autant d’addictions dont la privation nous déprime profondément. La meilleure des choses quand le confinement crée les conditions d’une conversion existentielle qui permet un retour aux sources de la vie et de l’esprit. A l'origine d'un éveil de la conscience une telle conversion fut au cœur des initiations et des sagesses millénaires. Nous consacrerons ce billet à cette sagesse du confinement née d'une grande initiation collective dans une société matérialiste qui a oublié le sens même de l'initiation.

L'ère des pandémies

Pour comprendre la crise sanitaire que nous traversons, on peut se noyer comme le font les spécialistes sous une masse d’informations et de statistiques plus ou moins contradictoires, on peut analyser de manière fragmentaire tel ou tel aspect de la situation mais, pour en saisir la signification profonde, il faut prendre de la hauteur en développant une vision globale qui permet d’aller à l’essentiel. On ne comprend rien à cette crise sanitaire sans la situer dans le contexte qui est le sien : celui d’une crise de civilisation en voie d’effondrement. Cette crise sanitaire est la conséquence d’un développement technologique et économique dont nous avons totalement perdu la maîtrise. Et, selon un récent rapport de l’Onu intitulé Échapper à l'ère des pandémies, le pire reste à venir. 

" Les conclusions du récent rapport de l’ONU sur les liens entre dégradation de la biodiversité et pandémies sont préoccupantes : elles montrent que les futures pandémies seront plus nombreuses, se propageront plus rapidement, impacteront davantage l'économie mondiale et feront plus de morts que la pandémie de Covid-19. Avec 45 millions de malades à travers le monde et 1,18 million de morts, la pandémie de Covid-19 ravage la santé et l’économie mondiales. Jusqu’à récemment jugé comme exceptionnel, un tel phénomène pourrait bien devenir récurrent, prévient l’IPBES - la Plateforme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité et les services écosystémiques de l’ONU - dans son rapport publié le 29 octobre. 

« Sans stratégie préventive, les pandémies vont émerger plus souvent, se propager plus rapidement, tuer plus de gens et affecter l'économie mondiale avec des impacts dévastateurs sans précédent. Il n'y a pas de mystère sur les causes de la pandémie de Covid-19, ou d'aucune autre pandémie moderne », analyse Peter Daszak, qui a dirigé ce rapport. « Les mêmes activités moteurs du changement climatique et de la destruction de la biodiversité stimulent les risques de pandémie en raison de leurs impacts sur notre environnement », explique-t-il. " (Pandémies : le pire reste à venir

Une initiation collective

Mais quelle est donc cette force insensée qui nous pousse sans cesse dans cette course suicidaire où nous perdons pied ? Pour Pascal : « Les hommes ont un instinct secret qui les porte à chercher le divertissement et l’occupation au dehors, qui vient de leur ressentiment de leurs misères continuelles. » Philosophe et enseignant de méditation, Fabrice Midal interprète ainsi cette pensée de Pascal : « Une soif nous pousse, comme malgré nous, dans une course en avant, nous empêchant de vivre notre expérience et de nous relier à la réalité. Elle rend impossible une spontanéité et une présence véritables. Je suis, mû par elle, toujours en train de fuir quelque chose au lieu de me rendre quelque part. Cette soif n’est jamais comblée car paradoxalement elle ne désigne rien de réel : rien ne peut donc réussir à la satisfaire. Elle s’intensifie même à mesure que je l’ignore. Voilà pourquoi un regard direct, sans jugement, sur ce qui est, est salutaire. » (Quel bouddhisme pour l’Occident ?) 

Cette pensée de Pascal doit être complétée par un autre, fameuse, répétée à l'envie durant le printemps dernier : « Tout le malheur des hommes vient de ne savoir pas demeurer en repos, dans une chambre. » Demeurer en repos dans une chambre, n’est-ce pas là une opportunité offerte par un confinement qui permet à chacun de s’arrêter quelques temps pour prendre conscience de la course suicidaire de notre civilisation. C’est ainsi que le confinement peut-être perçu et vécu comme une forme d’initiation collective, une période de retraite et d’introspection propice à la contemplation et à la création, à l’étude et à la méditation, loin des tumultes et des illusions spectaculaires générées sans cesse par le monde marchand (à sa perte) !

Anna Guégan pour la revue Troisième Millénaire

Dans un article intitulé Méditation : la grande évasion à l’heure du confinement, Le Monde évoque la façon dont la crise sanitaire a été l’occasion pour de nombreuses personnes de découvrir ou de pratiquer la méditation en participant à de multiples sessions proposées sur Internet. 4,8 millions de personnes sont inscrites sur l'application Le Petit Bambou dédié à la méditation. « Le nombre de nouveaux inscrits a décuplé depuis le début du confinement et celui des séances quotidiennes suivies a triplé selon son fondateur Benjamin Blasco : " Cela démontre une soif de résilience mais aussi un besoin de communion" ». Cet article évoque également l’allocution télévisée du 5 Avril dans laquelle la reine Elizabeth II elle-même se fait l’écho de cette démarche collective : « Un grand nombre de personnes, quelle que soit leur confession, se rendent compte qu’il y a là une occasion de ralentir, de réfléchir, dans la prière ou la méditation ».

Une telle « retraite » permet de se recentrer pour renouer avec une dimension plus profonde et plus essentielle de soi-même que nos sociétés du spectacle font tout pour occulter dans la mesure où, selon la célèbre formule de Bernanos, la civilisation moderne est un « complot universel contre toute espèce de vie intérieure ». De manière humoristique, l'écrivain Renaud Camus évoque la façon dont la crise sanitaire libère certains individus du carcan des habitudes imposé par les codes sociaux dominants : « Merci Saint-Covid qui nous avez libéré du bisou, de la poignée de mains, des mariages, des festivals de l’été, des réunions de famille, du tourisme de masse, de l’hyperconsommation, de la croissance économique. » 

Loin d’être une démarche égoïste, approfondir cette relation à soi-même, c’est poser sur les autres et sur le monde un regard épuré qui remet chaque chose à sa juste place et ordonne chaque place dans un vaste espace régi par un ordre intérieur. Cette vision globale et inspirée permet d’agir dans le champ social avec un esprit de sagesse fait de bienveillance et de courage. C’est ainsi que le confinement printanier a été pour certains une pause salvatrice permettant de prendre du recul en élaborant, de manière individuelle et collective, des projets pour le "monde d'après", en expérimentant d’autres manières de vivre et d’autres modes de pensée. D'où l'impression véhiculée par Coline Sereau et relayée par les réseaux sociaux : "Le monde qui marchait sur la tête est en train de remettre ses idées à l'endroit." (L'art de la Conversion)

Individuholisme

A l’occasion de cette crise sanitaire, l’individu moderne, bercé par l’illusion marchande de son autonomie et de son indépendance, découvre dans un mélange d’effroi et de soulagement qu’il est aussi – et surtout – partie intégrante d’une communauté (familiale, amicale, nationale, humaine et naturelle) auprès de laquelle il peut trouver refuge quand il doit faire face à un danger vital. L’odeur de la mort l’incite à rejoindre ces communautés en faisant le saut existentiel qui consiste à passer du Je au Nous et du Nous à l’Un. Lui qui se croyait seul, découvre qu'il fait partie d'un Tout multidimensionnel qui le dépasse et le transcende.

Sous la pression du danger, nos vies individuelles se synchronisent à la vie d’un immense organisme collectif rythmé par une pulsation biologique entre expansion et concentration : confinement, déconfinement, reconfinement. C’est ainsi que l’individualisme abstrait et hors sol de la modernité se métamorphose en une forme nouvelle : celle d’un "individuholisme" où l’individu concret est relié organiquement à son milieu social, naturel et spirituel. 

Le terme de holisme (du grec holos qui signifie entier) renvoie à la primauté du tout sur les parties qui le constituent. Alors que la modernité est fondée sur une rationalité abstraite et analytique qui fragmente le monde pour l’observer et le mesurer, la pensée holistique est globale et complexe : elle conçoit chaque phénomène comme une totalité indivisible, informant chacune de ses parties, reliées par un réseau d'interdépendances. Alors que le réductionnisme moderne est à l’origine d’un individualisme qui crée l'illusion d'une monade solitaire, séparée abstraitement de son milieu de vie, l’individuholisme considère la singularité individuelle comme le résultat d'une intégration des expériences et des informations issues d'un milieu multidimensionnel qui est à la fois naturel et social, culturel et spirituel. 

Le holisme conçoit l’être humain comme une totalité indivisible – physique, psychique et spirituelle – qui est elle-même intégrée à un Kosmos conçu comme une totalité multidimensionnelle en évolution. Dans cette perspective individuholiste, l’homme est ce que la philosophie intégrale définit comme un Holon : à la fois un tout irréductible et une partie d’un tout qui le transcende. L'émergence de l'individuholisme correspond à la mutation de l'Homo Sapiens en Holo Sapiens évoquée par Jean-François Noubel. Nous recommandons les Live évolutionnaires réalisés durant le confinement printanier - et plus tard - par ce penseur visionnaire qui explore la prochaine conscience et l'intelligence collective tout en expliquant, d'une manière simple et synthétique, les cartographies du développement humain permettant, entre autre, de mieux comprendre l'émergence de l'individuholisme.

2020, année de l’éveil spirituel ?  

Dans un article paru en Septembre dans Marie-Claire et intitulé 2020, année de l’éveil spirituel ? Géraldine Dormoy-Tungate évoque les transformations psycho-spirituelles qui se sont déroulées dans le contexte du confinement printanier et qui sont autant d’expressions de cet individuholisme en train d’émerger :

« Chez certain(e)s, le confinement a mis en lumière un authentique besoin de spiritualité. Simple effet de mode ou marque d'un changement profond dans notre société ? Témoins, sociologue et philosophe partagent leur analyse… "Je suis croyante mais je ne sais pas en quoi", estime Chloé, 31 ans. Cette jeune photographe parisienne a vécu le confinement comme "un accélérateur d'éveil". Privée de client(e)s, elle a été contrainte de lâcher-prise. "Je m'intéresse à la spiritualité depuis plus de quinze ans, mais d'habitude, le boulot et les sorties entravent mes pratiques. Pendant deux mois, j'ai pu lire, méditer, faire du yoga. Je me suis même formée en ligne pour pratiquer des soins énergétiques." 

Chloé n'est pas la seule à s'être récemment tournée vers son monde intérieur. Si la crise du Covid-19 est encore trop récente pour que l'on mesure l'ampleur d'un éveil collectif des consciences, Éric Vinson, chercheur et spécialiste du fait religieux et de la laïcité, a noté des signes : « En nous privant des divertissements extérieurs, le confinement a suscité une disponibilité qui incite à l'introspection. Même le chef de l'État, dans ses discours, a combiné un ton martial avec une invitation à se recentrer sur l'essentiel, sans ignorer la dimension religieuse. Le "Jour du Seigneur" a battu des records d'audience. Pour beaucoup, le ramadan s'est révélé moins convivial mais plus intériorisé. » 

Sur Internet, réseaux sociaux et outils tels que Zoom ont facilité l'accès aux guides spirituels. Pour José Le Roy, professeurs de philosophie et écrivain très actif en ligne, le changement était flagrant : " J'ai vu beaucoup plus de gens se connecter. Il y avait à la fois plus de propositions et plus de participants."  Lili  Barbery-Coulon, professeur de kundalini yoga, a même vu sa communauté exploser quand, mi-mars elle s'est mise à animer chaque soir une méditation en ligne sur Instagram.

Elle non plus ne s'étonne pas de cet enthousiasme : « On a vécu un grand moment de sidération collective. On a appris qu'on ne contrôlait rien d'autre que l'instant présent : une énorme leçon spirituelle. » Elle définit la spiritualité comme « tout ce qui nous relie à quelque chose qui nous dépasse ». José Le Roy y voit « une recherche de sens pas forcément tournée vers la religion ». Pour Éric Vinson, il s'agit de « la relation avec la réalité ultime qu'on l'appelle Esprit, Esprit saint ou dimension divine ». Enora, yogi depuis deux ans, se figure « une connexion entre le corps, le mental et l'âme »… 

Cette soif de spiritualité se vit dans un contexte de tensions politiques – rejet des institutions, montée des extrémismes – et sociales – mouvement Black Lives Matter. Un climat insurrectionnel qui n'est pas sans rappeler celui de la fin des années 60. Assiste-t-on au retour des hippies ? « La fin des années 60 correspond au moment où l'Occident s'est tourné vers l'Orient, concède José Le Roy. Ce fut le début de notre intérêt pour la méditation, la philosophie orientale avec la visite de maîtres hindous et bouddhistes. » Mais la comparaison s'arrête là. « Le contexte n'est pas le même. Il y a aujourd'hui moins de naïveté et plus d'action, poursuit-il. On est à la fois méditant et militant. » 

Le rejet de la société de consommation est passé par là : marginal il y a cinquante ans, il prend de l'ampleur. « Les gens ont l'impression d'être au bout d'un système. Ils se rendent compte qu'ils ne sont pas plus heureux avec leurs possessions, d'où leur élan spirituel. »… Quoi qu'il arrive, le changement climatique est devant nous. Le danger qu'il représente est plus grand que la crise que nous venons de vivre. Nous allons avoir besoin d'être sacrément connectés à nous-mêmes pour bien vivre demain. » 

Un Cauchemar Climatisé

Déconfinement... Tout le  monde descend !

Il ne faut cependant pas trop se bercer d’illusions. Si cette émergence de l’individuholisme est qualitativement fondamentale, elle est encore quantitativement minoritaire. Suite au déconfinement, beaucoup ont abandonné - tels des chiens dans la forêt - leurs bonnes résolutions, leurs idéaux et leurs projets pour le "monde d'après". Nombre de ces visions d'avenir, inspirées par la peur et la proximité de la mort, se sont évanouies dans un lâche soulagement comme les promesses de sobriété d'un alcoolique devant le zinc. 

Ils ont été nombreux à retourner à leurs addictions sans s'être réveillés du cauchemar climatisé où se déroulent leurs vies de drogués à l'économie et à ses catégories : production et consommation, technique et croissance, travail et divertissement. Le confinement a été vécu par beaucoup comme l’épreuve d’un emprisonnement dont ils attendaient d’être libérés pour se diffuser à nouveau dans la galaxie de pulsions et sensations qui tournent en une spirale dispersive et régressive autour de leur vide existentiel. 

C'est ainsi qu'à l’heure du déconfinement, pour relâcher la pression, les jeunes, se croyant immortels, ont fait la fête en oubliant les gestes barrières et les adultes ont repris de manière quasi-hypnotique le chemin balisé par leurs habitudes. La sagesse c’est comme la culture et la confiture : moins on en a et plus on s’étale dans l’horizontalité d’une vie dépourvu de sens c’est-à-dire de signification et d’orientation. Le virus nous sommait collectivement de faire le choix entre L’économie ou la Vie. C’est l'économie qui a choisi beaucoup d’entre nous, rassurés de faire tourner en boucle, tels des Hamsters, la roue de leur aliénation.

Dans le contexte d’un effondrement global dont la crise sanitaire n’est qu’une des manifestations, chacun est tiraillé entre ces deux pôles que sont l’entropie individualiste d’une part et, de l’autre, l’évolution vers l’individuholisme. D’une part le laisser aller dans la dispersion et la dissolution, la diversion et le divertissement. D’autre part, un effort de centralisation, de concentration et de conversion intérieure pour remettre à l’endroit ce que l’emprise dissolvante du matérialisme a inversé. 

Paranoïa ou Métanoïa?

Diversion ou conversion ? Homo Sapiens ou Holo Sapiens ? Tel est en fait le choix que nous devons faire de manière individuelle et collective. Un choix correspondant aux deux voies qui s’offrent à nous actuellement : la dynamique régressive d’une spirale infernale qui engendre des situations de plus en plus chaotiques ou la dynamique créatrice d’une spirale évolutive vers un nouveau stade de développement. C'est dans cette perspective que pandémie et confinement participent d'une initiation à la fois individuelle et collective: cette crise sanitaire éprouve notre conscience et de cette épreuve nous pouvons sortir grandis ou soumis au désordre ambiant. 

La soumission aux forces chaotiques conduit à un ensauvagement généralisé ainsi qu'à l'explosion des maladies mentales et des consultations en service psychiatriques mais elle se manifeste aussi par une infodémie : une vague d'informations fausses ou délirantes véhiculées par un courant complotiste qui submerge des franges de plus en plus importantes de la population. Ce complotisme a pour origine une impuissance à appréhender la complexité du monde ainsi qu'une profonde angoisse face à l'effondrement en cours et à la nécessité vitale de se transformer pour y faire face. C'est ainsi que, privés de leurs repères et de leurs références habituelles, nombre d'individus préfèrent se réfugier dans un imaginaire à la fois victimaire et paranoïaque, en construisant des récits plus ou moins délirants où sont désignés des boucs-émissaires chargés d'expier l'angoisse collective. 

A l'encontre de cette paranoïa ambiante et mortifère, la dynamique évolutionnaire est porteuse de ce que la tradition nomme une métanoïa, c'est à dire une métamorphose à la fois cognitive et spirituelle qui, à travers un mouvement de conversion et de retournement, ouvre l'homme à plus grand que lui-même et sa conscience à ce qui la transcende. L'Holo Sapiens naît de cette  métanoïa en se libérant de la paranoïa ambiante propre à la monade solitaire et compétitive véhiculée par un paradigme en voie d'effondrement.

Les Tisserands

Selon plusieurs voix inspirées, l’épreuve du confinement aurait pour but de faciliter une mutation de conscience, synchrone avec l’effondrement du paradigme dominant. Dans un article intitulé Avant le coronavirus, nous étions déjà enfermés mais nous ne le savions pas, écrit durant le confinement printanier, Abdennour Bidar nous proposait de réfléchir au nouveau paradigme de civilisation qui accompagne l’émergence de l’individuholisme incarné par l'Holo Sapiens.

« Quel sera ce nouveau paradigme ? Quelle peut être son idée de base, simple, dont le sens, l'intérêt, seront immédiatement compréhensible par tous? Qui que nous soyons, où que nous vivions sur la planète, une même évidence et une même souffrance nous sautent aux yeux: nous avons rompu nos liens nourriciers, notre lien de proximité et de respect à la Mère Nature, notre lien de solidarité et de compassion aux autres à force de trop d’individualisme, et jusqu’à notre lien à nous-mêmes dans des vies absurdes ou superficielles. 

Voilà le dénominateur commun de toutes nos crises: la souffrance ou rupture de nos liens essentiels, notamment ce triple lien vital qui nous fait respirer, ouvrir grands nos poumons et notre cœur, grandir en humanité: le lien à soi, le lien à l’autre, le lien à la nature. Avec ce triple lien viennent naturellement pour nous le sens et la joie de la vie. Ni plus ni moins. Car le sens de la vie, n’en déplaise aux relativistes et aux nihilistes, est d’être en accord avec soi, de vivre en fraternité avec autrui et en harmonie avec la nature. Telle est la formule de la grande santé humaine. Voilà donc un nouveau paradigme possible: la vie bien reliée. Et voilà du même coup un objectif majeur pour les luttes de demain qui commencent aujourd’hui: réparer ensemble le tissu déchiré du monde…

À chacun de trouver sa façon, de mettre ou remettre sa vie dans l’alignement de son moi profond; de faire quelque chose pour le bien commun; de retrouver un contact vivant et régulier avec la terre, l’eau, les arbres, les animaux, le ciel. Et pendant ce temps du confinement qui nous est imposé, c’est peut-être la première question avec laquelle nous avons rendez-vous: quels sont les liens que je peux réparer? Là tout de suite, avec ceux en compagnie de qui je vis le confinement. Ce lien de sollicitude, de bienveillance, de partage, d’amour que j’avais un peu oublié ou négligé. Et demain, dehors, dans mon métier ou mon engagement bénévole, dans mon quartier ou sur mes réseaux, ce lien d’engagement et de combat qui va redonner à nos vies une belle et grande direction. Comment donc vais-je pouvoir rejoindre, dès aujourd’hui, l’armée des ombres, cette grande armée des Tisserandes et Tisserands qui ont entrepris de changer de vie pour changer la vie? Et qui œuvrent souterrainement au monde d’après? »

Le Frein d’Urgence 

Nous sommes d'autant plus d'accord avec Abdennour Bidar, que, depuis des années, Le Journal Intégral rend compte d’une évolution systémique qui concerne à la fois la conscience (Je, le lien à soi)), la culture (Tu, le lien à l’autre) et la société (Il, le lien au milieu social et naturel). Réparer ensemble le tissus déchiré du monde, c’est aussi développer une vision intégrale capable de penser le monde dans sa complexité en participant de manière intime à la dynamique évolutive d'une mutation intégrale. Une dynamique qui s’exprime simultanément dans le champ de la subjectivité personnelle, de l’intersubjectivité culturelle et de l’objectivité des structures socio-économiques qui déterminent le rapport à notre milieu de vie. 

Amis Tisserands, à la fois méditant et militant, le confinement pourrait être la matrice silencieuse d’une révolution des consciences qui se liguent pour tirer sur le frein d’urgence afin d’arrêter la course suicidaire de nos sociétés. Selon Walter Benjamin : « Marx a dit que les révolutions sont la locomotive de l'histoire mondiale. Peut-être que les choses se présentent autrement. Il se peut que les révolutions soient l'acte par lequel l'humanité qui voyage dans le train tire les freins d'urgence » Et si la sagesse du confinement était révolutionnaire dans la mesure où elle active les freins d’urgence d'une civilisation lancée à toute vitesse dans une course suicidaire ? 

Ressources 

Échapper à l'ère des pandémies Rapport de l'IPBES

Avant le coronavirus, nous étions déjà enfermés mais nous ne le savions pas. Abdennour Bidar - Huffington Post

Les Tisserands Réparer ensemble le tissus déchiré du monde. Abdennour Bidar

Le blog d'Abdennour Bidar 

2020, année de l’éveil spirituel ?  Géraldine Dormoy-Tungate. Marie-Claire. 

Éveil et Philosophie Le blog de José Le Roy

Méditation : la grande évasion à l’heure du confinement Le Monde

Prendre soin de son mental en période d'incertitude  Un e-book gratuit de 17 pages proposé par l'application Petit Bambou

Le Grand Livre de la pleine présence. Attentive, ouverte et bienveillante. Denys Rinpoche -  Chaîne You Tube de la Buddha University qui propose, entre autres, de nombreux enseignements de Denys Rinpoché.

Confinés, déconfinés. Et maintenant ? Revue Troisième Millénaire 

Blog de Anna Guégan, dessinatrice pour la revue Troisième Millénaire.

Les billets sur la crise sanitaire dans Le Journal IntégralL'Economie ou la Vie - L'Art de la Conversion - Autodestruction ou développement intégral - Les Deux Couronnes - Vacance et/ou Vacuité - Incitations (11) Contentez-vous ! - Sur la Méditation : Abécédaire de la méditation (1) et Abécédaire de la méditation (2) Une révolution silencieuse - Sur la Métanoïa : La Métanoïa -

Programme de méditation de Pleine Conscience et enseignements d'éveil durant le confinement ( Un choix subjectif à compléter suivant les informations et les expériences) :

Bouddha University - Shambhala Paris - Fabrice Midal - Altruistic Open Mindfulness (un entraînement online à la pleine conscience en français, à suivre selon son propre rythme) -

Vidéos à voir durant le confinement : 

Comment rester serein quand tout s'effondre 6 conférences de Fabrice Midal sur la chaîne You Tube de l’École de Méditation dont il est le fondateur. Les réflexions profondes  d'un philosophe sur la crise systémique que nous traversons, inspirées par la pratique et l'enseignement de la méditation.

Les Live évolutionnaires de Jean-François Noubel. Une série d'entretiens de une heure réalisées durant le confinement par un penseur visionnaire sur divers thèmes concernant l'évolution de la conscience, de la culture et de la société. A voir plus particulièrement les Live évolutionnaires de 9 à 12 sur les cartes de la conscience qui sont de très bonnes introductions, claires et synthétiques, à la théorie intégrale développée par Ken Wilber : L'Emergence - En route vers le Transrationnel - De l'Ego au Kosmos - La Spirale Dynamique.

Dans l'esprit des Live Évolutionnaires. Dans le blog de JF Noubel, une présentation de l'esprit qui préside à la série des Lives évolutionnaires hebdomadaires.

mardi 22 septembre 2020

Incitations (11) Contentez-Vous !


La vie, ce n’est pas attendre que l’orage passe, c’est apprendre à danser sous la pluie. Sénèque 


Dans ce billet, comme nous le faisons régulièrement dans la série intitulée "Incitations", nous proposerons, sous forme d'aphorismes et de fragments écrits au fil des jours, des éléments de réflexion et d’intuition qui font écho aux thèmes développés par ailleurs, de manière plus systématique, dans Le Journal Intégral. 

De par leurs concisions, aphorismes et fragments synthétisent la pensée et formalisent l’intuition en éveillant chez le lecteur une résonance intérieure qui peut mobiliser sa conscience et fertiliser son imaginaire. Inspirées par l'esprit du temps, ces "Incitations" nous invitent donc à la méditation, à la réflexion... et à l’action. 

Il y a dix ans le petit livre de Stéphane Hessel intitulé "Indignez-vous" est devenu un phénomène d’édition puisqu’en un an cet opuscule a été traduit en 34 langues et vendu à 4 millions d'exemplaires. Pour Stéphane Hessel, l’engagement et l’indignation représentent les ferments de l’ "esprit de résistance" face aux politiques néo-libérales qui creusent les inégalités et détruisent le lien social. Dix ans après, le monde a changé. Il doit faire face aux risques d’effondrement qui se manifestent à travers de nombreuses crises dont la crise sanitaire actuelle, expression d'une folie productiviste qui conduit à la destruction des écosystèmes naturels. 
 
Parce-que l’indignation est très insuffisante si elle n'est pas sous-tendue par une vision novatrice et parce que la résignation est inacceptable à une époque où la survie de notre espèce est menacée, l'engagement - toujours nécessaire - prend une forme nouvelle qui pourrait s'exprimer à travers un nouveau mot d’ordre : " Contentez-vous ! ". Ce mot d'ordre salutaire est le vecteur d'une éthique de la plénitude dans un monde en voie d'effondrement.
 
Contentez-vous !
 
Se contenter c’est savoir se contenir 
grâce à une maîtrise des limites 
qui conduit au contentement.  

Ce nouveau mot d’ordre exprime bien le lien organique entre conscience, maîtrise et plénitude : 
1 - La conscience perçue comme processus de contention et de concentration de l’énergie intérieure (se contenir) 
2 - La maîtrise des limites qui permettent ce processus de contention (se contenter
3 - La sensation de plénitude qui résulte de cette maîtrise à travers le contentement (être content). 

Pour être content de vivre, 
il faut savoir à la fois 
se contenir et se contenter. 

La conscience structure les données issues des perceptions et des sensations, des émotions et des représentations. Parce qu'elle est porteuse de sens, une telle structure permet de  contenir et de concentrer la force vitale d’extériorisation, de prédation et d’expansion infinie propre à l'instinct, aux désirs et à l’avidité de l’égo.

Cette contention et cette concentration opérées par la conscience permettent de centraliser l’énergie vitale et de la canaliser vers une dimension supérieure en transmuant progressivement la puissance de vie en présence d’esprit à travers l'ouverture du cœur et l'éveil intérieur.
 
 
Paradoxe : 
c'est seulement en maîtrisant ses limites 
que l'on peut dépasser ses limitations. 
 
La maîtrise des limites permet l'émergence et la perdurance d'une intégrité qui devient la référence à partir de laquelle on peut transcender conditionnements et préjugés.

Comment être content de vivre dans un monde en décomposition comme le nôtre si on n'exerce pas cette force de contention et de concentration qui permet de garder son intégrité face aux forces d’extériorisation qui ne cessent de projeter l’individu hors de lui-même ?

Dans un monde en voie d’effondrement, ces forces d’extériorisation sont celles de l’atomisation sociale et du totalitarisme marchand à l’origine d’un individualisme narcissique qui transgresse à son profit toutes formes de limites. A quoi il faut ajouter une pensée en miettes, incapable de vision globale, qui conduit à la perte du sens et de tous les repères symboliques. 

Face à ces forces d’extériorisation, la contention et la concentration de la conscience peuvent s'expérimenter à travers la méditation dans le champ de la conscience (subjectivité), par les médiations symboliques dans le champ de la culture (intersubjectivité) et via une intelligence collective dans le champ de l'organisation socio-économique (structures objectives). 

Si on est incapable de se donner à soi-même ses propres limites en maîtrisant son champ d’extériorisation par un acte de conscience, alors des limitations s’imposent de l’extérieur et font irruption, parfois de manière violente, pour freiner et stopper cette extériorisation délirante. 

Quand on ne sait plus 
ni se contenir ni se contenter, 
le confinement s'impose comme le seul horizon.

Comme la prison est le devenir des délinquants et des criminels qui ne respectent pas les lois de la société, le confinement est le devenir de tous ceux qui transgressent les lois naturelles de la vie en se heurtant aux limites imposées par celles-ci.
 
Il est évident que le confinement sanitaire n'est qu'une des multiples expressions d'une limitation qui s'impose par la force et dans la souffrance à tous ceux qui n'ont pas exercé la maîtrise de leurs limites. 
 
 
Plus on entre en soi, plus la conscience s’approfondit 
et plus s’amplifie un sentiment d’unité et d’harmonie. 

Rien de plus régressif que le développement personnel s’il n’est pas une étape sur une voie spirituelle. 

La spiritualité pourrait être universellement définie comme dépassement de l’égoïsme. Elle ne peut intégrer le développement personnel que si elle le dépasse dans une forme d’évolution transpersonnelle qui mène à un éveil impersonnel. 

C’est bien parce qu’elle nous échappe toujours que la vérité nous libère. 

La pornographie (qui montre) est à l’érotisme (qui voile), 
ce que la science (qui démontre) est la poésie (qui dévoile). 

Dans Eros, il y a oser. 
 
Le poète est celui qui ose sortir des habitudes mentales pour retrouver le souffle organique et originel de l’inspiration, seul à même de dévoiler la réalité pour faire apparaître le Réel dont elle est la manifestation. C’est ainsi que la réalité se réenchante en se révélant comme épiphanie du Réel (irréductible à nos perceptions) que l'on nomme, selon les traditions, Mystère, Vacuité, Ouverture ou Esprit. 

La matière est l’ombre portée d’un mystère 
qui est la matrice de tous les possibles. 

Il est des vies prisonnières des évidences et d’autres qui se conjuguent intuitivement au mystère qui les anime. Messagère de ce mystère, la parole hermétique du poète subvertit toute explication intellectuelle au profit d’une implication sensible et d’une intuition synthétique. 

Pour qu'il soit inspirant, un aphorisme doit être le vecteur d’une polysémie qui interroge le lecteur. En se posant la question « Qu’est-ce que l’auteur a bien voulu dire ? » le lecteur passif se transforme alors en herméneute et en interprète actif, participant ainsi, à travers le filtre de sa subjectivité, à l’inspiration créatrice de l’auteur. 

Pas de poésie sans vision 
et pas de vision sans contemplation. 
 
Voyant, Méditant et Poète, 
tels sont les trois attributs de l’homme reconnecté. 

Le méditant ne fait rien d’autre que suivre un entraînement spirituel au même titre que l’athlète suit de manière rigoureuse un entraînement physique. Là où l’athlète cherche la performance, le méditant, en ne cherchant rien, s'ouvre à la totalité. Il fait l’expérience d’une présence d’esprit vécue à travers une perception immédiate quand l’intellectuel crée des représentations mentales fondées sur des médiations conceptuelles. 

L’image 
est un langage symbolique 
de l’intuition 
comme le concept 
est celui
- logique et abstrait -
des médiations intellectuelles.

Alors que nous vivons, depuis cinquante ans, un changement de paradigme, le nouveau paradigme qui s’impose aujourd’hui est celui - dynamique - d'un changement qui remet en mouvement une pensée figée dans les rigueurs, les rigidités et les frigidités de l’abstraction. 
 
Au cœur de ce changement : la reconnaissance d'un processus de développement - à la fois humain, naturel et cosmique - animé par la dynamique évolutionnaire de la vie/esprit.

Parce qu’elle permet l’émergence d’une plus grande complexité, cette dynamique évolutionnaire apparait comme la matrice d’un saut qualitatif vers un nouveau stade de développement, porteur d'une vision novatrice dont notre époque en crise a tant besoin. 


Tout développement est un dévoilement. 
 
La dynamique du développement humain
est à l'origine d'un sauf évolutif
vers une plus grande complexité
qui remet  en question 
nos anciennes façons 
de vivre et de penser.
 
Loin d'être 
une certitude, 
ce saut évolutif 
est une possibilité.
 
Nous ne pourrons vivre ce saut évolutif que si une partie de l'humanité s'y engage en transcendant le paradigme abstrait de la séparation qui fût au cœur de la modernité pour accéder au paradigme concret de l'intégration qui fonde la Cosmodernité à partir d'une approche globale, à la fois dynamique et organique.
 
Le monde tourne autour des inventeurs de valeurs nouvelles : - il tourne invisiblement. Mais autour des comédiens se tournent et le peuple et la gloire : ainsi "va le monde". Nietzsche
 
Si tout développement est un dévoilement c'est que l'accès à un nouveau stade évolutif - fondé sur une plus grande complexité - dévoile les dynamiques (séparatrices) qui l'entravaient et les logiques (abstraites) qui lui résistaient.
 
C’est dans ce mouvement de développement/dévoilement qu’apparaît de nos jours une critique intégrale capable de mettre à jour les diverses formes de fétichisme, propres à notre époque, qui font système et qui doivent être dépassés. : fétichisme de l’égo au niveau psycho-spirituel, fétichisme de l’abstraction dans le champ de la culture et fétichisme de la marchandise dans le champ social. 

Le capitalisme sauvage, quel pléonasme !... La sauvagerie est au cœur même du capitalisme dans la mesure où celui-ci est fondé sur la destruction de la vie et de la sensibilité concrètes par l'hégémonie de cette abstraction qu’est la valeur marchande. 
 
Rien d'étonnant donc que la sauvagerie capitaliste 
conduise à l'ensauvagement des relations humaines.
 
Né de la rencontre entre un narcissisme prédateur sur le plan individuel et un processus de déliaison et d'atomisation sociales sur le plan collectif, cet ensauvagement a pour conséquence un climat de violence et de paranoïa profondément anxiogène.

Si le capitalisme apparaît de manière superficielle comme une forme d’économie, il est avant toute chose une économie des rapports sociaux fondée sur la médiation totalitaire de l’échange marchand. Cette médiation de la marchandise au cœur des rapports sociaux aliène et détruit aussi bien les relations naturelles et immédiates de don/contre-don que les médiations symboliques régissant toute vie communautaire. 

Comme la bêtise crasse aime à se parer des habits du bon sens, la sauvagerie se donne toujours des airs apostoliques de mission humanitaire. C’est ainsi que le capitalisme prend le masque féminin de l’économie pour ravager les milieux humains et naturels. Ne soyons pas dupes et osons soulever les jupes de l’économie pour découvrir les attributs virilistes, patriarcaux et dominateurs, d’un capitalisme dont la sauvagerie peut-être résumée dans les termes suivants : "L’infâme est l’avenir de l’homme."

Un système de domination se reconnaît aux diverses formes de persécution, de censure et d’ostracisme qu’il fait subir à ses opposants. Si cette violence répressive empêche les opposants de s’exprimer, elle s'accompagne d'une violence symbolique, bien plus perverse, qui conduit les dominés à réagir et à penser dans les catégories du système dont ils sont les victimes. 

C’est ainsi que nombre de mouvements dits "anti-capitalistes" ne se rendent pas compte qu’en contestant ce système à travers le langage dominant de l’économie, ils renforcent en fait l’emprise dont ils cherchent à se libérer. 
 

Quand chaque individu est soumis 
à un emploi du temps, 
le temps lui-même devient 
un employé de l’économie. 
 
Prenez donc votre temps 
avant qu’il ne vous prenne 
pour un simple rouage 
d’une machine inhumaine.

Prendre son temps 
c'est l'arracher à l'abstraction 
d'une mesure quantitative
pour en faire 
une offrande de qualité
 à la présence d'esprit
dont il provient.
 
Prendre son temps
c'est s'immerger dans
 le flux sensible
d'une durée concrète
dont la source est 
une présence à la fois
poétique et spirituelle.

Le temps est devenu un champ de bataille politique où la rentabilité abstraite de l’économie tend à anéantir l’expérience sensible de la durée vécue au sein d’une communauté concrète à travers une mémoire et une culture partagée. 

Libérer le temps de l’emprise économique pour retrouver la profondeur poétique et spirituelle de l'instant présent, telle est la lutte que chacun doit mener quotidiennement, dans chacune de ses actions et de ses pensées, sous peine d’être enrôlés de manière inconsciente dans l’armée des ombres au service du fétiche marchand. 

D’une crise sanitaire qui a pris la forme d’un confinement planétaire, nous devons tirer une synthèse en forme de leçon : si nous ne maîtrisons pas notre puissance d’extériorisation par un sens des limites, celles-ci nous seront imposées dans la contrainte et la souffrance par la régulation des lois immémoriales de la vie/esprit. 
 
Dans le champ social, la décroissance pourrait être un premier pas dans la quête de limites salutaires. Initiée à partir d'une critique intégrale, la "sortie de l'économie" serait un second pas qui devrait être accompagné d'un troisième pas : l'entrée dans l'écosophie. Cette sagesse concrète naît de la participation sensible et intuitive à un milieu multidimensionnel, à la fois humain, naturel et spirituel.

Retrouver aujourd'hui le sens des limites
c’est se libérer de l’alliance perverse 
entre l’égomanie sur le plan personnel 
et l’économie sur le plan collectif.
 
Autre leçon paradoxale à tirer de l’expérience d'un confinement planétaire : ce qui est bon pour l’homme est généralement mauvais pour l’économie. Par exemple le silence, l’introspection, la contemplation, la sobriété, la modération, la patience, la mesure, la gratuité, la générosité, la bienveillance, la solidarité, la fantaisie, le temps libre, la poésie. 
 
Plus que jamais, 
la pandémie
nous conduit à opérer 
un choix crucial :
L'Economie ou la Vie ?
 
Ressources
 
Dans le Journal Intégral
 
 
Lire les billets sélectionnés sous les libellés Incitations et Sortir de l'économie
 
A l'occasion des dix ans du Journal Intégral, nous avons consacré en début d'année cinq billets qui détaille le sommaire des billets diffusés dans le Journal Intégral. Sommaire (1) 2010... et suivants.