jeudi 22 juin 2017

Civilisation, Décadence, Ecosophie.


Le problème qui se pose aujourd'hui n’est pas plus politique que social : il est cela sans doute, mais il est aussi beaucoup plus que cela. C'est un problème de civilisation. G. Bernanos

Une image "écosophique" par Elena Ray
En France, nous voici donc à la fin d'une très longue séquence électorale de plus d'un an qui aboutit simultanément à l'effondrement des partis traditionnels suite à une vague de "dégagisme", et à une recomposition de la vie politique exprimant en partie et en retard l'évolution des mentalités et des idéologies. Si l’on veut comprendre cette évolution, mieux vaut être à l’écoute des synchronicités qui signalent les mouvements de fond à l’œuvre dans la conscience collective : en quelques semaines, trois intellectuels français viennent de publier trois livres sur la nature des civilisations, de leurs décadences et de leurs métamorphoses. Décadence de Michel Onfray, Civilisation de Régis Debray et Ecosophie de Michel Maffesoli : trois titres qui, chacun en un seul mot, résume la vision du monde et de l’histoire propre à chacun de ces auteurs. 

Vision tragique chez Michel Onfray qui relate la genèse et la grandeur, le déclin et la dissolution de la civilisation judéo-chrétienne ; vision fataliste chez Régis Debray observant d’un œil ironique cette "joyeuse apocalypse" qu’est le transfert d’hégémonie de l’Europe en déclin à l’Empire américain ; vision phénoménologique et descriptive chez Michel Maffesoli, témoin inspiré des mutations socio-culturelles qui décrit avec minutie l’émergence d’une nouvelle vision du monde fondée sur une sagesse commune – l’Ecosophie – en même temps que s’achève dans une lente agonie le cycle abstrait et rationaliste d'une "vieille  modernité" âgée de cinq siècles. 

La parution simultanée de ces trois ouvrages est, en soi, un signe des temps à méditer et à décrypter. Les écrivains sont des sismographes dont la sensibilité enregistre le mouvement des plaques tectoniques de l’esprit qui fondent et défont les civilisations humaines. Comme l’écrivait Georges Bernanos : « Le problème qui se pose aujourd'hui n’est pas plus politique que social : il est cela sans doute, mais il est aussi beaucoup plus que cela. C'est un problème de civilisation. » Prisonnière de l'économisme dominant et de réflexes technocratiques d'un autre âge, la classe politique s'avère incapable de penser les enjeux  de civilisation au cœur de la crise systémique que nous devons affronter. 

Penser en terme de  civilisation c'est regarder la diversité des phénomènes sociaux et culturels à partir d'une perspective globale, elle-même inscrite dans la longue durée de l'histoire et de l'évolution humaines. Inspirés par des modèles développementaux nés de nombreuses recherches en sciences humaines, nous nous inscrivons pour notre part dans une vision évolutionnaire de l’histoire. Ces modèles développementaux décrivent un mouvement évolutif qui régit aussi bien les individus que ces organismes vivants que sont les sociétés humaines. Ces modèles nous permettent d’envisager l’histoire, à la manière d’Hegel, comme le déploiement de l’Esprit dans le temps. D’où la remarque de H.F Amiel à laquelle nous souscrivons : « Au fond, il n'y a qu'un seul objet d'études : les formes et les métamorphoses de l'esprit. Tous les autres objets reviennent à celui-là; toutes les autres études ramènent à cette étude. » 

Décadence

Si chacun de ces trois auteurs ressent et perçoit un changement d’époque, ils interprètent celui-ci à travers le filtre de leur tempérament et de leur psyché comme de leur filiation intellectuelle et culturelle. Ce filtre détermine leur vision de l’histoire et la façon dont ils imaginent le nouveau cycle en train d’advenir. 

Dans "Décadence", paru fin février, Michel Onfray écrit l’épopée de la "civilisation judéo-chrétienne" qui a forgé l’Occident pendant deux mille ans. L’auteur présente ainsi son ouvrage : « Chacun connaît les pyramides égyptiennes, les temples grecs, le forum romain et convient que des traces de civilisation mortes prouvent… que les civilisations meurent – donc qu’elles sont mortelles ! Notre civilisation judéo-chrétienne vieille de deux mille ans n’échappe pas à cette loi. Du concept de Jésus, annoncé dans l’Ancien Testament et progressivement nourri d’images par des siècles d’art chrétien à Ben Laden qui déclare la guerre à mort à notre Occident épuisé, c’est la fresque épique de notre civilisation que je propose ici. » 

Voilà comment Marie Lemonnier rend compte de ce livre dans l’Obs : « Chacun sait que nos civilisations sont mortelles, disait déjà Valéry en 1919, et c'est bien la mort de l'Occident que ce livre crépusculaire et torrentiel entend annoncer: le judéo-christianisme est "en phase terminale". "L'Europe est à prendre, sinon à vendre", conclut Michel Onfray, après avoir fait le récit d'une civilisation "née d'une fiction", celle de Jésus, et décrit la Shoah comme le "terrible couronnement" de presque deux mille ans d'antisémitisme chrétien ! 

Pour avoir longtemps régné en maître, l'Occident d'Onfray, vu sous l'angle de ses exactions et inquisitions religieuses, s'avère en effet peu glorieux. Quels sont dès lors les candidats à la succession, qui précipiteraient le cadavre dans la tombe? Onfray en conçoit deux possibles: d'abord l'islam, que le philosophe essentialise conquérant, cruel, et voit «en pleine santé» ("nous avons le nihilisme, ils ont la ferveur") quand on pourrait, au contraire, en décrire la déliquescence; ensuite le trans-humanisme, propre à fabriquer la civilisation d'après les civilisations. » (Onfray décrète la "mort de l'Occident")

Civilisation

Dans "Civilisation. Comment nous sommes devenus américains", paru début Mai, Régis Debray tente de répondre à ces questions : « C’est quoi, une civilisation? Comment ça naît, comment ça meurt? L’effacement de la nôtre nous aide à répondre à ces questions vieilles comme le monde. De la CIA au rap, de House of Cards à Baron noir, des primaries à nos primaires, c’est cette imprégnation de notre culture nationale par la civilisation américaine que Régis Debray dévoile avec une gaieté frondeuse, en reliant les menus faits de notre quotidien à l’histoire longue de l’humanité. Illustrée par l’exemple de la Grèce antique face à l’Empire romain, l’invariable grammaire des transferts d’hégémonie éclaire notre présent d’une façon insolite et pénétrante. Une prise de recul qui, tout en abordant de plein fouet l’actualité, surprendra également pro- et anti-américains. » 

Dans un article de Libération intitulé Debray ou le déclin de l’empire européen, Laurent Joffrin évoque ainsi cet ouvrage : « Régis Debray, chroniqueur ironique du monde d’hier, adepte du pessimisme souriant, annonce notre décadence sans s’en émouvoir outre mesure, pariant qu’une civilisation nouvelle, venue de l’ouest, remplacera la nôtre et que l’humanité, somme toute, ne s’en portera pas plus mal. » 

Dans un article du Temps, Alain Campiotti évoque les lectures qui ont nourries la réflexion de Debray : « Paul Valéry, par exemple, constatant il y a près d’un siècle que l’Europe aspirait «à être gouvernée par une commission américaine». Ou Simone Weill, prévoyant en 1943 que l’humanité allait perdre son passé par l’américanisation de l’Europe puis du globe. Si Debray se replonge avec mélancolie dans ces écrits anciens, c’est qu’à ses yeux le désastre a eu lieu. Il y avait une civilisation, dit-il, définie par le temps, l’écrit, le drame de vivre, l’intérieur, l’être et la transmission. Elle s’est affaissée devant une autre, dominée par l’espace, l’image, le bonheur obligatoire, l’extérieur, l’avoir et la communication. Et c’est un grand malheur parce que nous y avons perdu «le sens de la durée et le goût des perspectives» … Mais il faut s’y faire, dit l’ancien guérilléro. Les civilisations durent grosso modo cinq siècles, et l’américaine n’en est qu’à son deuxième. » (Debray et les débrayeurs

Ecosophie 

Dans son dernier ouvrage intitulé "Ecosophie", paru en Janvier, Michel Maffesoli évoque, quant à lui, le basculement de la modernité vers la post-modernité avec l'émergence du paradigme écosophique : "nouvel équilibre entre la matière et l'esprit". Si on en a moins parlé de ce livre que des deux précédents, c’est que son auteur est moins médiatique et s’il est moins médiatique c’est que sa pensée, plus exigeante et nuancée, n’est réductible ni aux conformismes de pensée, ni aux slogans, ni aux polémiques qui font le « buzz » et le « clash » dont s’alimentent médias et réseaux sociaux. 

Ce livre est ainsi présenté par son éditeur : « Il est une nature des choses et on a eu la prétention de la changer. La dévastation du monde, naturel et social, en est la conséquence la plus évidente. Le refus des constructions sociales "contre-nature", abstraites et rationalistes, commence à se faire jour. D’où le besoin de fonder l’être-ensemble sur un sens (une sensibilité) commun, sur une accommodation collective à la nature des choses. C’est l’enjeu de ce livre que de repérer les courants qui silencieusement animent la nature en question. Ce que l’on nomme ici sensibilité écosophique. » 

Ceux qui s’intéressent, comme nous, à une telle réflexion inspirée peuvent se référer au précédent billet dans lequel l’auteur explicite sa pensée et sa conception de l’histoire qui rejoint, en partie, celle développée à partir d’une vision intégrale. Au progressisme abstrait et linéaire de la modernité, Maffesoli oppose « une philosophie «progressive» du devenir du monde. Non pas la ligne droite de l'histoire, allant vers un monde toujours meilleur, (ou supposé tel), mais plutôt un cheminement en spirale, dans lequel le passé n'est pas dépassé, mais intégré… Les sociétés construisent à chaque époque un rapport entre le monde matériel et le monde de l'esprit différent et, partant, dessinent un vivre ensemble basé sur des règles différentes. » 


Sombrer avec élégance

Le tempérament et le trajet intellectuel de chacun de ces auteurs va déterminer sa propre vision de l’histoire comme cette vision va elle-même déterminer sa perception du futur : décadence résultant d'une inéluctable entropie pour le premier, métabolisme produit par les échanges entre civilisations pour le second ou métamorphose qualitative pour le troisième. Ni optimiste, ni pessimiste, la vision de Michel Onfray, enracinée dans la pensée grecque, est tragique. Selon lui, "le tragique est celui qui ne craint pas de regarder le réel tel qu'il est et d'en soutenir la vue sans le secours des béquilles religieuses ou politiques qui permettent d'en nier l'existence". A partir de cette perspective les civilisations disparaissent et meurent en obéissant aux lois de l’entropie qui concernent aussi bien les êtres et les les choses que les sociétés.

« Qui, à ce jour, donnerait sa vie pour les gadgets du consumérisme devenus objets du culte de la religion du capital ? Personne. On ne donne pas sa vie pour un iPhone. L'islam est fort, lui, d'une armée planétaire faite d'innombrables croyants prêts à mourir pour leur religion, pour Dieu et son Prophète. Nous avons le nihilisme, ils ont la ferveur ; nous sommes épuisés, ils expérimentent la grande santé ; nous vivons englués dans l'instant pur, incapables d'autre chose que de nous y consumer doucement, ils tutoient l'éternité que leur donne, du moins le croient-ils, la mort offerte pour leur cause ; nous avons le passé pour nous ; ils ont l'avenir pour eux, car, pour eux, tout commence ; pour nous, tout finit. Chaque chose a son temps. Le judéo-christianisme a régné pendant presque deux millénaires. Une durée honorable pour une civilisation. La civilisation qui la remplacera sera elle aussi remplacée. Question de temps. Le bateau coule ; il nous reste à sombrer avec élégance. » 

Là où la vision de Michel Onfray se veut tragique, celle - fataliste - de Régis Debray observe le transfert d’hégémonie de l’Europe en déclin à l’Empire américain. Un transfert qui passe par la transmission et la dissémination des valeurs européennes au moment où, selon Max Weber, l'ère chrétienne prend fin avec l'abandon de l'économie du salut au profit du salut par l’économie. Debray écrit : « Le métabolisme est le propre d’une civilisation vivante : elle se transforme au fur et à mesure de ce qu’elle absorbe et stimule chez les autres. Qui la naturalise l’empaille, alors qu’elle se nourrit d’emprunts et d’échanges… Pourquoi les « décadences » sont-elles aimables et indispensables ? Parce que ces moments ne sont pas seulement les plus exquis mais les plus féconds. Parvenue au meilleur de sa fermentation, une civilisation peut alors en inséminer d’autres, auxquelles elle lèguera tout ou partie de ses caractères originaux. Décadence c’est transmission donc rebond, donc survie. Habit de deuil déconseillé. » 

Vitalisme versus Sinistrose

Alors que la vision d’Onfray participe au "Choc des civilisations" décrit notamment par Samuel Huntington, celle de Debray met en avant l'échange entre celles-ci et leurs interactions. Il n’empêche, au-delà de leurs différences, Onfray et Debray s’inscrivent dans une même tradition française - intellectuelle, matérialiste et profondément désenchantée - qui n’est plus à même de rendre compte d’un monde en évolution continue dont la complexité croissante nécessite de mobiliser d’autres modes de perception et de compréhension, plus agiles, plus fluides, plus intuitifs… et moins datés. On ne peut pas voir l'émergence d'un nouveau monde avec les lunettes de l'ancien car celles-ci, ayant fait, littéralement, leur temps sont impuissantes à imaginer le suivant. 


Ces deux auteurs ne font preuve ni d’une grande imagination, ni d’une profonde vision en reconduisant dans le futur les modèles du passé : la pré-modernité d’une religion hégémonique pour Onfray et la modernité d’un techno-capitalisme triomphant chez Debray. L’un et l’autre confondent trop souvent la décadence de notre société avec leur impuissance à imaginer ses métamorphoses alors même que l’approche phénoménologique de Maffesoli lui permet de participer, de l’intérieur, au saut qualitatif né de l’émergence d’un nouveau paradigme. Le réenchantement du monde dont il est le témoin se manifeste à travers une écosophie post-moderne, cette sagesse commune qui, à travers un nouveau rapport entre matière et esprit, intègre archaïsme et modernité en mêlant tribalisme, religiosité et technologie.

C’est ainsi que le processus de décadence apparaît à Maffesoli comme « une forme de transition d’un monde à l’autre. De la décadence de l'empire romain ont surgi les créations médiévales et byzantines… Ainsi, face à la sinistrose qui tend à prévoir, de nos jours, en France spécialement, il convient d'être attentif à la vitalité, au vitalisme des jeunes générations. Ce qui nous force à nous rappeler que la décadence d'une manière d'être est toujours suivie d'une indéniable renaissance. Ballanche nommait cela "palingénésie": une genèse toujours renouvelée. » 

La sinistrose contre laquelle s’érige Maffesoli est celle d’une idéologie décliniste, bien française, qui tend à justifier toutes les formes de résignation et d'impuissance en dévalorisant de manière systématique les expressions novatrices et transformatrices de cette "palingénésie" qui ressemble beaucoup à la dynamique de l'élan vital au cœur de l'évolution créatrice évoquée par Bergson. En effet, nous souffle le déclinisme dominant, si le monde est foutu à quoi bon agir et réagir ? Sombrons donc avec élégance dans la posture esthétique du dandy, comme le firent certains passagers du Titanic dansant nonchalamment au son de l'orchestre alors que le paquebot coulait.

Une telle attitude, profondément régressive, ne tient pas compte des éléments de régénération et de création qui accompagnent toute décadence. Comme l'écrit Pascal Bacqué dans La Règle du Jeu : "C'est qu'on nous donne à écouter ceux qui n'ont rien à nous faire entendre. Ceux qui racontent le monde, ce sont Hegel ou Dante. Ceux qu'il faut écouter ce sont les créateurs. Parce que le monde n'est monde que s'il s'invente. Le monde crève de leur absence. Qu'on installe à leur place Onfray et Debray, et leur rabâchage doxographique : le monde n'est plus que le bégaiement de lui-même. " (La fondation de Régis Seldon)

L'humeur décliniste ressemble fort à celle des vieillards plus ou moins séniles qui regrettent le bon vieux temps. C'est ainsi que, sans en percevoir la vitalité créatrice, ceux-ci critiquent l'insolence de la jeunesse vis à vis des conformismes, des académismes et des préjugés hérités. C'est ainsi que, sans en percevoir l'intuition radicale, ils ironisent sur les idées nouvelles, toujours étranges à leurs yeux. "Après moi le déluge, maugréent-ils dans leur barbe, c'était mieux avant. Quelle décadence ! " C’est ainsi que certains prophètes de malheur confondent l’épuisement de leur énergie vitale et créatrice avec une fin du monde proclamée haut et fort sur le tombeau de leur jeunesse rebelle. 

Décadence et Métamorphose

Forme symptomatique du nihilisme contemporain, le déclinisme passe totalement à côté de la dialectique évolutive unissant, de manière organique, effondrement et refondation, décadence et émergence, décomposition et recomposition. Selon Satprem : " Nous avons parfois l'impression, dans l'histoire, que les périodes d'épreuve et de destruction précèdent la naissance d'un monde nouveau, mais c'est peut-être une erreur, peut-être est-ce parce que la semence nouvelle est déjà née que les forces de subversion (ou de déblayage) vont s'acharner." Ce pourrait bien être une belle définition de la vague "dégagiste" et "destituante" qui n'en a pas fini de submerger les représentants comme les institutions du "vieux monde".

Dans un récent billet écrit en Mars, intitulé Décadence et Métamorphose, nous réagissions à ce déclinisme ambiant en précisant notre vision évolutionnaire de l’histoire. En fait, pour un regard évolutionnaire, décadence et renaissance sont deux expressions à la fois complémentaires et contradictoires d'une même dynamique créatrice qui se manifeste à travers le mouvement imperceptible et continu de la vie et de ses métamorphoses. Mais aveuglés par les apparences et fascinés par les formes, nous avons perdu l'intuition du mouvement créateur qui les a produit et nous vivons, comme le dit si justement le poète Paul Eluard, dans "l'oubli de nos métamorphoses". 

Nous défendons, pour notre part, une autre philosophie de l’histoire qui, loin du relativisme ambiant, considère celle-ci non pas comme une suite hétéroclite de formes sociales hasardeuses mais comme un continuum évolutif entre ces divers types de sociétés humaines que l’on nomme civilisations. La décomposition d’une civilisation annonce et préfigure des recompositions qui se manifestent au cours de l'histoire à travers l’émergence de nouvelles formes sociales et culturelles. C'est parce que la décadence d'une civilisation est aussi messagère de ces métamorphoses que la présentation du Journal Intégral est ainsi rédigée : " Chroniques de la fin d'un monde, avec ses diverses crises, le Journal Intégral observe l'avènement d'un nouvel "Esprit du temps" qui inspire penseurs, créateurs et communautés en faisant émerger des formes innovantes de réflexion et de sensibilité". 

Une dynamique évolutionnaire 

La Spirale Dynamique : un modèle développemental
Ce qui manque à Onfray comme à Debray, c’est la compréhension de cette "palingénésie", élan vital qui se manifeste à travers l'évolution créatrice. Une évolution documentée par les nombreux modèles développementaux proposés par les chercheurs en sciences humaines.

Ces modèles définissent les principaux stades de développement régissant aussi bien les individus que les sociétés humaines. A partir de ces modèles développementaux, certains chercheurs ont pu observer comment la dynamique évolutionnaire de la vie/esprit se manifeste au cours de l’histoire à travers diverses formes de civilisation.

Les civilisations archaïques naissent d’une fusion - magique - entre une subjectivité et sa communauté d’appartenance, comme entre cette communauté et son milieu (naturel et invisible) perçu comme une totalité indivisible à la fois cosmique, statique et close sur elle-même. 

Les civilisations traditionnelles ont remplacé cette fusion archaïque par une domination hiérarchique qui institue la soumission de la subjectivité au groupe et du groupe à une transcendance.

En réaction à cette domination hiérarchique, la civilisation moderne est fondée sur l’émergence de l’individu, l’usage de la rationalité abstraite et la croyance au progrès.

Contre le fétichisme de l’abstraction propre à la modernité finissante, la civilisation cosmoderne - celle qui advient - est fondée sur la participation créatrice de l’individu à une totalité complexe et évolutive. 

Cette cartographie des modèles développementaux nous conduit à penser que le futur de l’Occident ne ressemblera ni à l’hégémonie d’une religion pré-moderne (style Onfray), ni à celle d’une modernité techno-économique (style Debray), mais plutôt à cette forme d’écosophie post-moderne annoncée par Maffesoli : sagesse commune qui naît de la participation de chacun à une totalité organique en développement.

Cette écosophie post-moderne est la matrice à partir de laquelle pourra émerger la civilisation "cosmoderne" annoncée par les penseurs visionnaires de l'évolution humaine. Mais ceci est une autre histoire !... Celle d'une évolution créatrice de la vie/esprit dont nous essayons de faire  la chronique contemporaine au fil des évènements et des phénomènes qui sont autant de signes des temps à travers lesquels elle se manifeste. 

Ressources 

Décadence de Michel Onfray - Civilisation de Régis Debray - Ecosophie de Michel Maffesoli 

Entretien avec Michel Onfray dans Le Point au sujet du livre Décadence. Site Michel Onfray

Extraits de Décadence  Site Michel Onfray

Onfray décrète la "mort de l'occident"  Marie Lemonnier Site de L'Obs

Monsieur Onfray au pays des Mythes  Réponses sur Jésus et le Christianisme. Jean-Marie Salamito éd. Saltvator.  Entretien avec Jean-Marie Salamito  Radio Sputnik sur You Tube.

Dr Onfray et Mr Homais Laurent Dandrieu Site Valeurs Actuelles

Michel Onfray, le raisonneur du vide de Matthieu Baumier Site Causeur. Un article au sujet de Michel Onfray, la raison du vide de Rémy Lélian.

Debray et les débrayeurs  Alain Campiotti Site Le Temps

Debray ou le déclin de l'empire européen  Laurent Joffrin Site de Libération

La fondation de Régis Seldon Pascal Bacqué. La Règle du Jeu

2 commentaires:

  1. Magnifique article Oliver ... comme toujours. Je suis impressionné par l'ampleur et la qualité du travail que tu accomplis à travers ton blog. J'avais juste envie de te faire part de mon enthousiasme .. mais je reviendrai avec un commentaire sur le fond .. encore besoin de métaboliser un peu ta réflexion !

    RépondreSupprimer
  2. Salut Philippe et merci pour cette résonance. L’enthousiasme dont tu témoignes fait écho à celui qui m’anime et me donne de l’énergie pour continuer à avancer dans cette voix…

    RépondreSupprimer