mardi 22 octobre 2013

Une Armée de Prophètes


Il n’y a qu’un problème, un seul : redécouvrir qu’il est une vie de l’esprit plus haute encore que la vie de l’intelligence, la seule qui satisfasse l’homme. Antoine de Saint-Exupéry 


Aux petits rentiers de l’agonie 

Aux fonctionnaires du désastre

Aux gestionnaires du renoncement 

Aux professeurs de désolation 

Aux experts qui, à force de savoir tout sur rien, ne connaissent absolument rien du Tout 

Aux technocrates qui prennent leur impuissance pour de la mesure et leur conformisme pour de la lucidité 

Aux religieux qui veulent faire de la transcendance une marque déposée dont ils revendiquent l’exclusivité

Aux politiciens dont la vision dépasse rarement la perspective de leur prochaine élection 

Aux réducteurs de têtes - nombreux dans la tribu des Psyvaros - qui enferment l’infini de l’esprit dans les limites abstraites de l’individu 

Aux démagogues qui surfent sur la haine, le doigt pointé vers des bouc-émissaires soumis à la vindicte populaire 

Aux conspirationnistes qui, inspirés par la connerie ambiante, imaginent des solutions simplistes et délirantes à des problèmes complexes nécessitant un saut créatif et conceptuel

Aux arriérés qui pensent aujourd’hui comme hier en qualifiant d’avant-garde ceux qui vivent au rythme créateur de l’évolution 

Aux sodomiseurs de dyptères qui qualifient d’illuminés les visionnaires et de visionnaires les désespérés 

Aux cyniques qui, identifiés à leur égo, traitent de mégalos tous ceux qui cherchent à le transcender 

Aux esthètes de nœud qui prennent la poésie pour une activité littéraire alors qu’elle est un état lyrique qui nous plonge au cœur de l’unité irréductible entre l’homme et le monde 

Aux écrivains qui, avec vanité, traitent leurs lecteurs comme des clients et non comme des poètes 

Aux cérébranleurs qui castrent l’imagination créatrice en réduisant un univers complexe et mystérieux à des idées claires et distinctes 

Aux normalisateurs qui réduisent la conscience à un mécanisme cérébral et la psyché à une mécanique dont les rouages chimiques peuvent être réparés à coup de molécules


Aux scientistes, prêtres de l’insignifiance, qui inventent un monde à leur mesure en réduisant le Réel multidimensionnel aux formes apparentes de la réalité

Aux familialistes qui ne reconnaissent comme seul miroir narcissique que la toute puissance de leur progéniture

A ceux qui, parmi les journalistes, nous font prendre pour de l’information la mise en scène du conformisme et de la résignation 

Aux milices de la pensée payées pour que leurs maîtres ne soient pas dérangés par des opinions déviantes c’est-à-dire novatrices

A l’oligarchie des nains qui spéculent sur la misère humaine pour chercher à remplir indéfiniment leur vacuité infinie

Aux poubellicitaires, ces mages noires qui colonisent l’imaginaire en faisant d’un produit le support d’un affect et d’un affect le support d’une aliénation 

A ceux qui, parmi les enseignants, vampirisent la présence d'esprit en destituant la souveraineté de l’intuition créatrice au profit d’un formalisme abstrait qui se retourne contre la vie pour former des absents à eux-même et au monde

Aux apparatchiks de la culture qui attendent d'une avant-garde auto-proclamée qu’elle défèque sur scène, sur un tableau ou dans un livre pour aller nettoyer ses crottes avec autant de respect que de volupté

Aux prédateurs qui, par leur inconscience quotidienne, détruisent leur milieu naturel et les espèces qui y vivent en violant les valeurs sacrées de la sensibilité et de la vie

Aux matérialistes qui, en se constituant prisonniers des apparences, se privent d'une cohérence enracinée dans la profondeur d'une transcendance

A tous ces paumés qui, ayant oubliés d’où ils viennent, ne savent plus où ils vont

Aux pseudo-révolutionnaires qui se font les alliés objectifs de la domination en utilisant le logiciel économique des dominants plutôt que d’inventer le logiciel éthonomique de la convivialité 

Aux déconomistes qui réduisent à un pouvoir d’achat la puissance créatrice de l'humanité

Aux marchands de bonheur qui profitent de la détresse humaine pour vendre l’illumination par mensualité 

A ceux qui savent 

A ceux qui croient savoir 

A ceux qui croient que le savoir les protège d’eux-mêmes 

Comme une armure 

A tous ceux-là et aux autres 

Il faut faire entendre l’écho assourdissant 

D’une voix qui se propage comme un incendie 

Annonçant l’insurrection des consciences 

Avec le Verbe pour seule arme 

Une armée d’enfants prophètes se lève de la nuit

Où les Techniciens du Sommeil l’avait endormie 


Les enfants prophètes vivent dans l’univers et l’univers vit en eux comme une source

Ils n’ont rien à dire et tout à inventer 

Du fond de leur mémoire pulse un rythme souverain

Ils sont enfants de l’univers et l’univers est leur enfant 

Les petites vies s’enflamment à leur passage, les grandes s’illuminent 

Ils appartiennent à un ordre qui se métamorphose à chacun de leur souffle 

Ils sont visionnaires comme on était conscients

Leurs mots sont des graines d’avenir plantées à même le soleil

L’infini les habite comme un locataire bienheureux

« Loué soit l’infini » chantent-ils en aimantant la jeunesse de leur trop plein de bleu 

Ils ont beaucoup voyagé entre les mondes et sont témoins d’histoires inouïes 

Ils regardent les hommes comme les traces mortelles de ce qu’ils furent 

L’immortalité se donne à celui qui sait la chanter

Rien n’a d’importance comme de célébrer le mystère 

A travers les danses du désir et les rythmes de l’incarnation 

Ils interprètent le monde, inspirés par un souffle millénaire 

Ils sont libres comme on est visionnaire

Ils sont présents comme on est libre 

« Osez libérer le prophète qui vibre en vous » disent-ils 

En libérant la conscience de la peur et la peur du temps passé 

« Oser libérer le génie qui vous inspire » disent-ils encore 

La réalité est une femme qui se donne à celui qui saura l’enchanter 

Elle enfantera un monde qui ressemble au souffle créateur 

Acteurs d’un flux instantané qu’ils font circuler en eux et à travers eux 

L’étoile de leur énergie rayonne d’intensité 

Ils donnent et reçoivent en échange 

Éléments solidaires d’un même organisme vibrant 

Ils ne sont plus ce qu’ils furent car ils ont osé le futur 

Ils l’ont généré en méditant 

Ils ont imaginé ses couleurs et ses formes dans l’athanor de leur conscience 

Ils l’ont appelé de tous leurs chants 

Ils ont renoué les fils du visible et de l’invisible 


Rien ne sera plus comme avant 

Ceux qui vous jugeaient du haut de leur égo 

Voilà qu’ils s’effondrent dans les limbes de leurs intérêts

Incapables d’inscrire leur vie dans un récit qui les grandit 

Ils disparaissent à force de devenir minuscule. 

Ils étaient morts mais ne le savaient pas 

Votre présence leur en apporte la preuve 

Et dans cette épreuve, ils font le deuil de leur inhumanité 

Il manque des prophètes à la liste des hommes 

La prophétie est une profession d’avenir 

Osez quitter les rives de la résignation 

Où échouent ceux qui pensent avoir réussi 

Osez le premier pas : celui qui initie tous les autres 

Osez servir l’infini et l’ineffable 

Osez être plus que ce que vous êtes 

Et vous verrez venir à vous l’armée des prophètes 

Enfant rieurs aux paroles d’or et de diamant 

Qui, de leur rire et de leur chant, ensemencent le champ du sens

Tout est nouveau sous le soleil depuis qu’ils se sont éveillés 

A l’harmonie secrète où s’origine la puissance créatrice de la pensée 


Les prophètes ne sont pas des vieillards de légende 

Mais les enfants du nouveau monde 

Qui ont à cœur de servir et de perpétuer le Grand Lien 

Osez ruser avec les masques de la mort 

Collés sur les vivants par l’esprit de sérieux

Quelqu’un quelque part vous attend

Qui vous ressemble comme un frère 

Pour la bonne raison que c’est vous-même 

Réinventé aux couleurs de l’éternité

Il vous faudra assumer l’infini comme une épreuve

Face à tous ceux qui ont fait un tombeau de leur vie 

N’attendez rien d’eux qui ne savent que se vendre 

L’avenir appartient à tous ceux qui osent se donner à lui 

Ne fais rien si chacun de tes pas, de tes pensées, de tes actions n’est pas animé du Souffle 

Attends qu’il te revienne comme on attend sa bien-aimée 

Celui qui n’est pas capable de se réinventer sans cesse 

Comment pourrait-il transformer le monde ? 

Le silence est le temple du sens comme le secret est celui de la présence 

Ne confie pas de perles aux pourceaux 

Ils seraient capables de les confondre avec ces excréments dont ils sont si friands 

Confie-toi à la Présence d'Esprit

Elle seule à le pouvoir de te réinventer au-delà des affres du temps et des sortilèges de l’incarnation

3 commentaires:

  1. Magnifique, vivant, ... merci pour ces mots Olivier, ils sonnent justes et forts... :) Ca fait du bien... merci :)

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  2. Magnifique ! Ça pulse, ça vibre, ça résonne, ça inspire !
    L'incandescence du verbe calcine les scories du vieil homme et réveille le prophète.
    Merci.

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