Travailler signifie anéantir le monde ou le maudire. Hegel
Inscription écrite à la craie sur un mur de la rue de Seine en 1953 par le situationniste Guy Debord, auteur de La société du spectacle. |
Dans une perspective intégrale, il est impossible d’avancer sur la voie évolutionnaire et libératrice de l'individuation sans comprendre et dépasser les limitations propres à chaque stade évolutif. C’est ainsi qu’on ne peut pas dépasser l'identification au paradigme abstrait de la modernité - lié au Mème Orange de la Spirale Dynamique - sans déconstruire les mécanismes de l’aliénation économique et ses justifications idéologiques.
C’est dans cet esprit que nous évoquions, dans notre avant-dernier billet, la critique morale et spirituelle du travail menée par Giuseppe Rensi dans son livre paru en 1932 et intitulé Contre le travail. Dans notre dernier billet, nous proposions un texte de Maria Wölflingseder intitulé Travail fétiche où cette philosophe évoque la façon dont le travail agit sur nos contemporains dans nos sociétés capitalistes, tel un fétiche doué de pouvoir magique, déterminant subjectivités, comportements, représentations et organisation sociale.
Maria Wölflingseder appartient au courant de la Critique de la Valeur qui, depuis la fin des années 80, propose une critique de l’économie politique et du travail à partir d’une relecture d’un Marx "ésotérique" et de son analyse du fétichisme de la marchandise. Après une rapide réflexion sur le contexte dans lequel a pu émerger un tel mouvement de pensée, nous vous proposons ci-dessous une passionnante vidéo de la chaîne Politikon sur You Tube intitulée Faut-il abolir le travail ? Pédagogique sans être ennuyeuse, cette vidéo de 15 minutes propose une réflexion concise et synthétique sur le travail en général et sur la Critique de la valeur en particulier.
Plusieurs auteurs y sont évoqués : Marx bien-sûr (valeur d'échange, valeur d'usage, travail abstrait/travail concret, fétichisme de la marchandise), mais aussi Aristote (différence praxis/poeisis), Locke (la propriété est fondée sur le travail), Adam Smith et David Ricardo (valeur travail dans l'économie classique). Un telle vidéo est à voir absolument (et à revoir) pour tous ceux qui voudraient s'initier à tout un courant de pensée qui ouvre de nouvelles perspectives à la critique sociale et, bien au-delà, à une "critique intégrale" prenant en compte l’évolution humaine dans sa totalité - individuelle, culturelle et socio-économique.
Rentrée dans l’atmosphère
Gabriela Manzoni. Comics retournés |
1er Septembre : voici donc venue l’heure de la rentrée et du blues qui toujours l'accompagne en fond sonore. La fête du travail ne devrait pas avoir lieu le 1er Mai, mais à la rentrée de Septembre quand chacun peut mesurer dans son âme et dans sa chair le pouvoir hypnotique de cette idole à laquelle nos contemporains sacrifient ce qu'ils ont de plus cher - leur liberté - contre une forme de plus en plus précaire de sécurité matérielle. Ce terme de rentrée évoque, par analogie, le processus de rentrée dans l’atmosphère après une sortie spatiale hors du champ de la gravitation terrestre. La gravitation sociale, dans nos sociétés marchandes, c'est l'économie et l’économie c’est le pseudonyme que prend le capitalisme quand il voyage incognito en se donnant une apparence naturelle et transhistorique.
La rentrée est donc cette période de l’année durant laquelle il nous faut rentrer dans notre coquille, en repliant les ailes entr’ouvertes par le corps et l’esprit durant le temps libre des vacances, pour retrouver le temps contraint et le rythme aliénant du travail. Cet "entre-deux" qu’est la rentrée permet de mesurer, quelques jours durant, l’abîme existant entre la plénitude d’une vie choisie et la misère d’une survie soumise aux mécanismes du capital... pardon... de l'économie. Face à un tel vertige et pour ne pas souffrir de notre résignation, on maquille celle-ci en pseudo "éthique du travail" ou en idéologie managériale qui cachent mal, en fait, la soumission volontaire aux lois impérieuses de l'économie... pardon... du capital. On peut donc essayer de faire taire cette souffrance en suivant de manière aveugle le conformisme dominant, quitte à le payer ensuite par un effroyable retour du refoulé, tant individuel que collectif, qui s'exprime à travers un profond malaise psychique et social.
La rentrée est donc cette période de l’année durant laquelle il nous faut rentrer dans notre coquille, en repliant les ailes entr’ouvertes par le corps et l’esprit durant le temps libre des vacances, pour retrouver le temps contraint et le rythme aliénant du travail. Cet "entre-deux" qu’est la rentrée permet de mesurer, quelques jours durant, l’abîme existant entre la plénitude d’une vie choisie et la misère d’une survie soumise aux mécanismes du capital... pardon... de l'économie. Face à un tel vertige et pour ne pas souffrir de notre résignation, on maquille celle-ci en pseudo "éthique du travail" ou en idéologie managériale qui cachent mal, en fait, la soumission volontaire aux lois impérieuses de l'économie... pardon... du capital. On peut donc essayer de faire taire cette souffrance en suivant de manière aveugle le conformisme dominant, quitte à le payer ensuite par un effroyable retour du refoulé, tant individuel que collectif, qui s'exprime à travers un profond malaise psychique et social.
Mais on peut aussi essayer de comprendre et déconstruire ce processus de déshumanisation qui exerce son emprise sur les esprits comme sur les corps.
Si de nombreux auteurs ont analysé l'exploitation et l'aliénation des travailleurs en système capitaliste, peu ont remis en question de manière radicale le rôle central du travail dans ce système, focalisant leur attention sur la circulation et la distribution inégale des richesses et non sur leur production. Au-delà de ces analyses, il existe une famille d’esprits visionnaires - de Marx à Raoul Vaneigem en passant notamment par Nietzsche et Paul Lafargue, Giuseppe Renzi et Bertrand Russel, Martin Heidegger et Hannah Arendt, Georg Luckacs et André Gorz, les plus connus parmi tant d’autres - qui, chacun à leur manière, ont opéré une critique du travail, devenu le mode de socialisation aliéné de nos sociétés marchandes. Cette famille de pensée pourrait se reconnaître dans le célèbre cri blasphématoire proféré par le situationniste Guy Debord contre la religion économique : "Ne travaillez jamais".
Sortir de l’économie
"Ne travaillez jamais" ne signifie pas refuser toute activité productive mais refuser de participer à un système qui met celle-ci au service exclusif de l’accumulation du capital. Selon Benoît Bohy-Bunel " Une critique du travail n'est pas une critique de l'activité humaine en vue de la survie, mais bien une critique qui cible la modernité capitaliste".
Adhérer à un tel slogan c’est refuser de jouer le rôle d'acteur inconscient dans la dynamique de valorisation définie par Marx comme le "sujet automate" qui anime le capitalisme en détruisant les milieux naturels, sociaux et symboliques.
"Ne travaillez jamais" c’est affirmer que l’activité productive doit être régie par une exigence fondamentale : répondre à des besoins concrets dans une perspective de solidarité et de justice sociale, de respect des équilibres écologiques, du bien commun et d'un sens partagé.
C'est aussi pointer le fait que l'activité productive n'est qu'une partie de l'activité humaine, celle-ci échappant le plus souvent à toute visée utilitaire à travers les dimensions du don et du jeu, du désir et des affects, du symbolique et du sacré, de la fête, de l'imaginaire et de la créativité. Réduire l'activité humaine à sa composante utilitaire et réduire cette dernière à une valorisation quantitative c'est castrer les individus de leur humanité en leur refusant toute forme de croissance autre que matérielle.
Adhérer à un tel slogan c’est refuser de jouer le rôle d'acteur inconscient dans la dynamique de valorisation définie par Marx comme le "sujet automate" qui anime le capitalisme en détruisant les milieux naturels, sociaux et symboliques.
"Ne travaillez jamais" c’est affirmer que l’activité productive doit être régie par une exigence fondamentale : répondre à des besoins concrets dans une perspective de solidarité et de justice sociale, de respect des équilibres écologiques, du bien commun et d'un sens partagé.
C'est aussi pointer le fait que l'activité productive n'est qu'une partie de l'activité humaine, celle-ci échappant le plus souvent à toute visée utilitaire à travers les dimensions du don et du jeu, du désir et des affects, du symbolique et du sacré, de la fête, de l'imaginaire et de la créativité. Réduire l'activité humaine à sa composante utilitaire et réduire cette dernière à une valorisation quantitative c'est castrer les individus de leur humanité en leur refusant toute forme de croissance autre que matérielle.
La Critique de la valeur reprend donc la réflexion sur le travail menée par cette famille de penseurs radicaux en la complétant par une critique globale des catégories pseudo-naturelles qui sont à la base de la socialisation capitaliste : la marchandise, l'argent, la valeur, le travail abstrait. Selon Anselm Jappe, ce courant de pensée met à jour « l'"inversion réelle" causée par la valeur : toute l'activité sociale prend la forme de son contraire, la valeur. »
De l'économie à l'écosophie
En nous libérant d'une hypnose économiciste présentée comme naturelle, une telle réflexion crée les conditions pour "sortir de l’économie", c'est à dire de rapports sociaux médiatisés par le travail et l'argent, en favorisant l’émergence de nouvelles formes sociales. Si la critique de la valeur s'arrête le plus souvent à ce constat, on ne peut s'empêcher de penser, dans une perspective évolutionnaire, que ces nouvelles formes sociales ne seraient plus indexées sur une valorisation quantitative mais sur les valeurs qualitatives qui naissent des relations entre l'homme et son milieu - naturel, social et spirituel. Ces relations qualitatives sont à l'origine d'une "écosophie", cette sagesse du milieu qui va progressivement remplacer une économie abstraite et quantitative suite à l'évolution des individus comme des sociétés.
De l'économie à l'écosophie
En nous libérant d'une hypnose économiciste présentée comme naturelle, une telle réflexion crée les conditions pour "sortir de l’économie", c'est à dire de rapports sociaux médiatisés par le travail et l'argent, en favorisant l’émergence de nouvelles formes sociales. Si la critique de la valeur s'arrête le plus souvent à ce constat, on ne peut s'empêcher de penser, dans une perspective évolutionnaire, que ces nouvelles formes sociales ne seraient plus indexées sur une valorisation quantitative mais sur les valeurs qualitatives qui naissent des relations entre l'homme et son milieu - naturel, social et spirituel. Ces relations qualitatives sont à l'origine d'une "écosophie", cette sagesse du milieu qui va progressivement remplacer une économie abstraite et quantitative suite à l'évolution des individus comme des sociétés.
Une telle mutation de l'économie à l'écosophie nécessite effectivement une évolution de la subjectivité individuelle, de l’intersubjectivité culturelle et de l’organisation socio-économique. D’où l'impérieuse nécessité de développer une "vision intégrale" à même de prendre en compte les interactions systémiques entre conscience, culture et société, dans la perspective d’une dynamique évolutionnaire. Une telle nécessité implique un engagement des acteurs du mouvement intégral qui devraient utiliser leurs connaissances et leur créativité pour accompagner les promoteurs de cette mutation. Pour cela il faut remettre en question l'imprégnation capitaliste propre à l'intégralisme américain, issue de l'histoire et de la culture protestante des États-Unis.
Nourris au lait de l'idéologie libérale, beaucoup d'intégralistes américains et de leurs épigones continentaux ont du mal à dépasser une forme d'économicisme qui leur apparaît naturel. D'où leur tendance à prospérer dans les activités de coaching et de conseil aux entreprises, vecteurs de l'ancienne vision économique du monde. Cette imprégnation capitaliste fait souvent obstacle au développement d'une "vision intégrale" dans un contexte européen qui est l'héritier d'une critique sociale provenant notamment d'une tradition catholique millénaire avec ses valeurs de justice, de charité et de fraternité.
Cette critique économique et sociale s'est élaborée progressivement au cours de l'histoire pour s'exprimer, suite au siècle des Lumières, à travers les mouvements socialiste, communiste, libertaire, situationniste et écologique quand ce dernier, à ses débuts, était encore anti-productiviste et non soumis au "greenwashing". D'où la nécessité de développer les spécificités d'un intégralisme européen qui assume cet héritage de critique économique et sociale en le réactualisant avec les outils théoriques et les intuitions véhiculées par une "vision intégrale". Ce que nous tâchons de faire dans Le Journal Intégral.
Le Goulag plus la Clim !...
Le sociologue Michel Maffesoli décrit ainsi la mutation de l'économie vers l'écosophie : « Aujourd’hui, la valeur travail, la foi dans un progrès matériel et technique infini, la croyance en la démocratie représentative qui ont permis la cohésion de la population et des élites ne font plus sens. Il est donc urgent de repérer les valeurs post-modernes en train d’émerger… Une époque fondée sur le triptyque : "Individualisme, Rationalisme, Valeur travail" cède la place à un monde fondé plutôt sur un autre triptyque : "Tribalisme, Raison sensible, Créativité"…
Ce que je pointe quand je parle de la fin de la valeur travail, c’est le changement de rythme sociétal : la vie quotidienne n’est plus toute entière tournée vers la production, les activités domestiques ne sont plus ressenties comme de la pure reproduction de la force de travail, les identités individuelles ne sont plus déterminées par le statut professionnel. Et ce qui met en mouvement les jeunes générations, ce n’est plus tant la carrière, ni même la paye, que l’ambiance de l’entreprise, le copinage dans et hors temps de travail, la possibilité de participer à une aventure collective, bref la créativité commune. C’est cela la fin de la valeur travail et aussi de la valeur assistance. C’est de réciprocité qu’il s’agit, d’implication commune. » Les nouveaux bien-pensants
Le Travail c'est le goulag plus la clim ! |
Au moment même où cette mutation s’opère dans les profondeurs de la conscience collective, le peuple français se met "en marche" vers l’impasse d’un "libéralisme intégral " (à la française, c’est-à-dire jacobin et technocratique) associant libéralisme culturel de gauche et libéralisme économique de droite. A contre-courant historique, cette démarche est condamnée à moyen terme, tout comme le système capitaliste à laquelle elle s’adosse et qui ne survit plus que grâce à l’oxygène d’une bulle financière ne correspondant plus à rien dans l’économie réelle.
La limite interne du capitalisme
Les théoriciens de la critique de la valeur estiment que le capitalisme a atteint sa limite interne suite au grand remplacement du travail vivant par l'automatisation de la production. Anselme Jappe explique ainsi les origines de cette limite interne : "Dans sa critique de l'économie politique, Marx a déjà démontré que le remplacement de la force de travail humaine par l'emploi de la technologie diminue la "valeur" représentée dans chaque produit, ce qui pousse le capitalisme à augmenter en permanence sa production... Au-delà de la limite externe représentée par l'épuisement des ressources, le système capitaliste contenait dès le début une limite interne : devoir réduire - à cause de la concurrence - le travail vivant qui constitue la seule source de la valeur. Depuis quelques décennies, cette limite semble être atteinte, et la production de valeur "réelle" a été largement remplacée par sa simulation dans la sphère financière. D'ailleurs la limite externe et la limite interne ont commencé à apparaître au grand jour dans le même moment : vers 1970." (Décroissants encore un effort)
Gonflée à l'hélium du "capital fictif", cette bulle financière vise donc à compenser la perte de valeur, due à la raréfaction du travail vivant, par un pari spéculatif sur de futurs profits. Contrairement à ce que pensent de nombreux progressistes, le "capital fictif" généré par la sphère financière n'est pas ce qui vampirise le système capitaliste mais la drogue addictive qui lui permet de survivre encore quelques temps et qui prolonge son agonie en maintenant l'illusion de profits futurs totalement fantasmés vu la raréfaction du travail vivant et la perte de valeur entraînée par celle-ci.
Cette bulle n'a cessé de croître et son destin est d'éclater, tôt ou tard, en provoquant une crise majeure qui fera apparaître par comparaison celles que nous avons déjà vécues (1929, 2007) - avec toutes les conséquences que l'on sait - comme autant des crises mineures. La solution ne consiste donc pas à réformer la sphère financière comme nous y invite une critique tronquée du capitalisme mais à sortir de ce système en le dépassant par le haut pour accéder à un nouveau stade évolutif fondée sur une autre vision du monde. Sinon, sa destruction entraînera celle de nos structures collectives et l'on sait bien ce que peut entraîner une telle régression : la souffrance, la violence et la guerre.
L'analyse proposée par les théoriciens de la critique de la valeur s'est trouvée jusqu'ici confortée au fil des trente dernières années par l'évolution des nombreuses crises financières prédites et annoncées comme autant de conséquences naturelles d'un processus qu'ils ont décrit de manière détaillée. Dans son dernier ouvrage Notre ennemi, le Capital Jean-Claude Michéa reprend les analyses développées par deux membres éminents de la critique de la valeur, Ernst Lohoff et Norbert Trenkle, dans La Grande Dévalorisation. Il évoque la phase finale du capitalisme dans un entretien donné à la Repubblica et traduit en français par l'Obs sous un titre évocateur : "Nous entrons dans la période des catastrophes". Ceux qui s'intéressent à ces analyses théoriques sur la limite interne du capitalisme peuvent se référer au billet du Journal Intégral intitulé Théorie d'une catastrophe. Théorie loufoque d'intellectuels hallucinés ? Pour répondre à cette question, écoutez donc l'émission diffusée par ce média institutionnel qu'est France Culture le 30 Août dernier et intitulée 2007-2017 : vers une nouvelle crise financière mondiale ? en regardant sur le site de l'émission cinq vidéos, issues de diverses sources, éloquentes sur ce sujet.
La limite interne du capitalisme
Les théoriciens de la critique de la valeur estiment que le capitalisme a atteint sa limite interne suite au grand remplacement du travail vivant par l'automatisation de la production. Anselme Jappe explique ainsi les origines de cette limite interne : "Dans sa critique de l'économie politique, Marx a déjà démontré que le remplacement de la force de travail humaine par l'emploi de la technologie diminue la "valeur" représentée dans chaque produit, ce qui pousse le capitalisme à augmenter en permanence sa production... Au-delà de la limite externe représentée par l'épuisement des ressources, le système capitaliste contenait dès le début une limite interne : devoir réduire - à cause de la concurrence - le travail vivant qui constitue la seule source de la valeur. Depuis quelques décennies, cette limite semble être atteinte, et la production de valeur "réelle" a été largement remplacée par sa simulation dans la sphère financière. D'ailleurs la limite externe et la limite interne ont commencé à apparaître au grand jour dans le même moment : vers 1970." (Décroissants encore un effort)
Gonflée à l'hélium du "capital fictif", cette bulle financière vise donc à compenser la perte de valeur, due à la raréfaction du travail vivant, par un pari spéculatif sur de futurs profits. Contrairement à ce que pensent de nombreux progressistes, le "capital fictif" généré par la sphère financière n'est pas ce qui vampirise le système capitaliste mais la drogue addictive qui lui permet de survivre encore quelques temps et qui prolonge son agonie en maintenant l'illusion de profits futurs totalement fantasmés vu la raréfaction du travail vivant et la perte de valeur entraînée par celle-ci.
Cette bulle n'a cessé de croître et son destin est d'éclater, tôt ou tard, en provoquant une crise majeure qui fera apparaître par comparaison celles que nous avons déjà vécues (1929, 2007) - avec toutes les conséquences que l'on sait - comme autant des crises mineures. La solution ne consiste donc pas à réformer la sphère financière comme nous y invite une critique tronquée du capitalisme mais à sortir de ce système en le dépassant par le haut pour accéder à un nouveau stade évolutif fondée sur une autre vision du monde. Sinon, sa destruction entraînera celle de nos structures collectives et l'on sait bien ce que peut entraîner une telle régression : la souffrance, la violence et la guerre.
L'analyse proposée par les théoriciens de la critique de la valeur s'est trouvée jusqu'ici confortée au fil des trente dernières années par l'évolution des nombreuses crises financières prédites et annoncées comme autant de conséquences naturelles d'un processus qu'ils ont décrit de manière détaillée. Dans son dernier ouvrage Notre ennemi, le Capital Jean-Claude Michéa reprend les analyses développées par deux membres éminents de la critique de la valeur, Ernst Lohoff et Norbert Trenkle, dans La Grande Dévalorisation. Il évoque la phase finale du capitalisme dans un entretien donné à la Repubblica et traduit en français par l'Obs sous un titre évocateur : "Nous entrons dans la période des catastrophes". Ceux qui s'intéressent à ces analyses théoriques sur la limite interne du capitalisme peuvent se référer au billet du Journal Intégral intitulé Théorie d'une catastrophe. Théorie loufoque d'intellectuels hallucinés ? Pour répondre à cette question, écoutez donc l'émission diffusée par ce média institutionnel qu'est France Culture le 30 Août dernier et intitulée 2007-2017 : vers une nouvelle crise financière mondiale ? en regardant sur le site de l'émission cinq vidéos, issues de diverses sources, éloquentes sur ce sujet.
Faut-il abolir le travail ?
Dans ce contexte de fin de cycle et en évitant toute forme de catastrophisme, l'utopie ne consiste pas à imaginer et à construire collectivement un autre système mais à croire de manière aveugle à la pérennité de celui qui est en train de s'effondrer suite au franchissement de ses limites tant internes qu'externes. Parce-que l'urgence de cette mutation est ressentie par les jeunes générations et les avant-gardes culturelles, celles-ci imaginent des formes innovantes de réflexion et de socialisation fondées sur la participation sensible et créative de l’être humain à son milieu. L'émergence de cette nouvelle "vision du monde" nécessite de redéfinir l’activité humaine en la libérant des contraintes du "travail abstrait" propre à la valorisation capitaliste. La vidéo de la chaîne Polikiton proposée ci-dessous participe de cette prise conscience en posant de manière frontale la question Faut-il abolir le travail ? Une question à laquelle chacun répondra à partir de sa réflexion individuelle mais surtout de la vision du monde à laquelle il s’identifie sur la spirale évolutive d’un développement intégral.
Dans ce contexte de fin de cycle et en évitant toute forme de catastrophisme, l'utopie ne consiste pas à imaginer et à construire collectivement un autre système mais à croire de manière aveugle à la pérennité de celui qui est en train de s'effondrer suite au franchissement de ses limites tant internes qu'externes. Parce-que l'urgence de cette mutation est ressentie par les jeunes générations et les avant-gardes culturelles, celles-ci imaginent des formes innovantes de réflexion et de socialisation fondées sur la participation sensible et créative de l’être humain à son milieu. L'émergence de cette nouvelle "vision du monde" nécessite de redéfinir l’activité humaine en la libérant des contraintes du "travail abstrait" propre à la valorisation capitaliste. La vidéo de la chaîne Polikiton proposée ci-dessous participe de cette prise conscience en posant de manière frontale la question Faut-il abolir le travail ? Une question à laquelle chacun répondra à partir de sa réflexion individuelle mais surtout de la vision du monde à laquelle il s’identifie sur la spirale évolutive d’un développement intégral.
Ressources
Faut-il abolir le travail ? Vidéo de la chaîne Politikon sur You Tube.
Autres vidéos de la chaîne Politikon sur le thème du travail : Arnaque ou révolution ? L’allocation universelle - Hannah Arendt. Condition de l’homme moderne
Éloge de la Sainte Paresse Eric Sablé éd. Almora L'état d'illumination est un état de paresse absolue, de parfaite détente, d'abandon au flux de la vie.
Les nouveaux bien pensants Michel Maffesoli Ed. du Moment
Nous entrons dans la période des catastrophes Entretien avec Jean-Claude Michéa donné à la Repubbica et traduit par l'Obs.
Notre ennemi, le Capital Jean-Claude Michéa Ed. Climats
La Grande Dévalorisation Pourquoi la spéculation et le dette de l’État ne sont pas à l'origine de la crise. Ernst Lohoff et Norbert Trenkle. Post-éditions 2014
Présentation du livre La Grande Dévalorisation. Exposé de Ernst Lohoff lu par Gérard Briche sur la chaîne You Tube de la Critique de la valeur (1h).
2007-2017 : vers une nouvelle crise financière mondiale France Culture. Les Enjeux internationaux. Sur le site de l'émission, cinq vidéos issues de diverses sources explorent ce thème.
Décroissants encore un effort Anselm Jappe site Critique de la Valeur
Les Aventures de la marchandise Anselm Jappe Réédition en livre de poche de cet ouvrage incontournable qui présente la critique de la valeur. 350pages, 12 euros.
La Société Autophage Capitalisme, démesure et autodestruction. Le nouveau livre d'Anselm Jappe à paraître en Septembre.
Un XXI ème siècle à la bougie Débat sur la décroissance entre Anselme Jappe et Laurence Boone Émission TV. 30' Arte
Comics retournés Gabriella Manzoni Editions Séguier
Dans Le Journal Intégral : Dans la rubrique Ressources des deux précédents billets nous avons proposé de nombreuses références en ligne et dans Le Journal Intégral concernant la critique du travail et de l’économie.
L’Esprit de Vacance (8) Contre le Travail - L’Esprit de Vacance (9) Travail Fétiche
L’Esprit de Vacance (8) Contre le Travail - L’Esprit de Vacance (9) Travail Fétiche
Devoir de Vacance Une présentation synthétique des six premiers billets de la série L'Esprit de Vacance : L'Esprit de Vacance, L'Otium du peuple, Changer d'ère, L'Art de ne rien faire, Se libérer de l'horreur économique, La Cigale et la Fourmi 2.0.
Merci beaucoup pour cet article une de fois de plus passionnant. Bruno Marion
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