mardi 22 décembre 2015

Comment devenir Faiseurs de Pluie ?


Paradoxe de la verticalité : il nous faut prendre de la hauteur pour comprendre en profondeur. 


Attentats terroristes, état d’urgence, COP 21 sur le réchauffement climatique, succès électoral de l’extrême droite : en un mois - du 13 Novembre au 13 Décembre - nous avons été acteurs et témoins parfois sidérés de plusieurs évènements qui, au-delà de leur singularité, apparaissent comme autant de symptômes d’un même déséquilibre global. Dans la perspective intégrale qui est la nôtre, ces diverses crises sont effectivement l'expression diversifiée d’une même crise systémique impossible à résoudre avec le mode de pensée l’ayant générée. Par là même, elles incitent à un saut évolutif vers un nouveau stade de conscience et de développement.

Ce nouveau stade évolutif correspondant aux sociétés de l’information régies par un principe de complexité selon lequel « tout est lié ». Pour accompagner cette complexité, nous devons dépasser la logique dominante - technocratique et sectorielle - en développant une intelligence sensible et intuitive capable de participer, de l’intérieur, à la dynamique évolutive de la vie/esprit qui régit la nature en général et la nature humaine en particulier. C'est seulement ainsi que peut émerger une vision globale et synthétique qui, dans la profusion des informations à notre disposition, perçoit l’architecture profonde qui les hiérarchise et les organise. 

La tradition chinoise voyait dans la participation intuitive à cette harmonie dynamique - le Tao - le chemin même d’une sagesse intérieure capable d’influencer le monde phénoménal. Selon les approches énergétiques traditionnelles, une telle influence s’effectue à partir du continuum existant entre la vie/esprit et le monde formel/matériel à travers lequel elle se manifeste. Le saut évolutif à réaliser aujourd’hui nécessite de dépasser un mental abstrait, devenu hégémonique depuis la modernité inaugurée par Descartes, pour retrouver cette continuité intuitive et énergétique, synchronique et organique - au cœur des sagesses traditionnelles - entre le monde intérieur de la conscience et celui - extérieur - de la manifestation physique.

Le passage d'une abstraction rationnelle à une continuité opérationnelle permet l'émergence d'un nouvel esprit du temps que nous illustrerons, après une réflexion qui le contextualise, par le récit du sinologue Richard Wilhelm évoquant l’activité d’un faiseur de pluie chinois. Un récit par lequel Jung conseillait à ses élèves de commencer toutes leurs conférences sur la voie des profondeurs. Ce qui nous permettra ensuite de nous poser la question suivante : comment, dans le désert spirituel du monde contemporain, devenir nous-même aujourd’hui "Faiseurs de pluie" c’est-à-dire les promoteurs de cette continuité opérationnelle à travers une Vision dans laquelle peut se reconnaître la conscience collective en évolution ? 

Une Guerre du Sens


Il est des périodes de crise, comme celle que nous venons de vivre, où toutes sortes de symptômes manifestent, à un moment donné, un même déséquilibre global : symptôme géopolitique des attentats terroristes du 13 Novembre ; symptôme juridique de l’état d’urgence et son corollaire, la transgression de l’état de droit ; symptôme écologique de la COP 21 marquée par le refus des états d'enclencher une véritable révolution climatique (1) ; symptôme social enfin avec l’expression électorale d’une immense colère populaire contre la sécession des élites. Dans un article paru dans Libération et intitulé Partout des solutions existent, Cyril Dion, co-réalisateur du film Demain, pose bien le problème : "En l'espace d'un mois, nous avons vécu un petit concentré de que pourrait nous préserver l'avenir. Mais est-ce une fatalité ? Face au terrorisme, à l'extrémisme et au péril écologique, n'avons nous pas une réponse globale à apporter ?... Tout est lié comme dans un écosystème et il est désormais nécessaire d'envisager la transformation de nos sociétés de façon holistique, comme un tout ".

Malheureusement, si nous sommes loin d'une telle vision globale c'est, selon Edgar Morin, "parce qu'elle contredit des principes enracinés en nous dès l'école élémentaire où nous apprenons à faire des coupures et des disjonctions dans le tissus complexe du réel, à isoler des domaines du savoir sans pouvoir désormais les associer". Dans une perspective technocratique propre au paradigme dominant, les évènements que nous venons de vivre renvoient à une série de crises - écologique, économique, sociale et géopolitique - dûment répertoriées et analysées séparément. C'est à partir de ce paradigme dépassé qu'une armée d’experts s’est mobilisée spontanément dans une véritable "guerre du sens" pour donner des clés d'interprétation permettant de mieux comprendre chaque problème de manière séparé.  Dans les médias comme sur les réseaux sociaux, chacun de ces évènements a donné lieu à une pléthore d’analyses et de commentaires, parfois passionnants, souvent éclairants dans leurs champs spécifiques, pourvu que l’on sache sélectionner ses sources d’informations en écartant aussi bien les conformismes idéologiques et la communication officielle que les niaiseries abêtissantes et les délires complotistes.  

Sur le front d’une intelligence collective en mouvement, tous les champs du savoir ont donc été convoqués et mobilisés pour proposer leur interprétation et leurs divers points de vue : religieux, politique, géopolitique, culturel, historique, philosophique, anthropologique, économique, psychologique, psychiatrique, ethnologique spirituel, sociologique, etc… Hélas, trop d’intelligences tuent l’intelligibilité. Plus la réflexion s’engage et s’enferme dans une multiplicité de champs spécifiques et plus elle tend à s’éloigner d’une vision globale et synthétique susceptible de nous éclairer en profondeur sur la marche du temps. Faute de cette vision organique et organisatrice, la multiplication des informations et la diversification des perspectives tend à créer plus de confusion que de précision, plus de contradictions que de compréhension. 

Fondée sur une approche disciplinaire et symptomatique, la logique dominante ne fait que traiter les problèmes de manière superficielle et sectorielle sans cette vision d’ensemble qui permet une réelle intelligibilité. En suivant le mouvement dissolvant d'une pensée en miettes, le corps social se désintègre s'il n'est pas capable d'un sursaut évolutif. Comme l'écrit Edgar Morin : "Quand un système n'est pas capable de traiter ses problèmes vitaux, soit il se désintègre, soit il produit un métasystème plus riche, capable de les traiter : il se métamorphose... A une pensée qui isole et sépare, il faut substituer une pensée qui distingue et relie. A une pensée disjonctive et réductrice, il faut substituer une pensée du complexe, au sens originaire du terme complexus : ce qui est tissé ensemble. "

Infobésité 


Trop d’informations, souvent contradictoires, saturent nos facultés d’intégration et de synthèse en neutralisant ainsi nos capacités d’action. Arrivés à ce seuil de saturation cognitive, nous devenons les victimes souvent inconscientes de ce que l’on nomme l’infobésité, cette surcharge informationnelle qui est à la conscience ce que la surcharge pondérale est au corps. Comme une épidémie d’obésité menace effectivement le corps social des pays dits développés, l’infobésité est un phénomène qui atteint la conscience de nombreux contemporains, à la fois surinformés et incapables de digérer ces informations en les intégrant dans une vision cohérente et synthétique donnant à leur expérience un sens qui soit à la fois une orientation et une signification. 

L’infobésité conduit à la confusion, la confusion à l’impuissance, l’impuissance à l’inaction et l’inaction à un nihilisme qui fragmente le corps social faute d’une vision commune à laquelle s’identifier. 

Selon notre niveau de conscience et de maîtrise, les technologies de l’information et de la communication peuvent être les meilleurs des outils ou devenir les vecteurs de la pire aliénation. Internet n’échappe pas à l’injonction du Toujours Plus, ce principe fondateur de nos sociétés contemporaines qui n’est autre qu’un toujours moins de qualité, de profondeur et d’esprit. Animée par une forme de mimétisme grégaire et de réactivité immédiate, la Toile génère un courant centripète qui conduit bien souvent à la dispersion, l’addiction et à une perte de substance si on n'est pas structuré intellectuellement et équilibré psychiquement pour lui résister en conscience. 

Si on refuse de se perdre dans les voies de la facilité qui sont celle du grégarisme et du stéréotype, il faut donc aller à contre-courant de ce flux centripète pour retourner régulièrement aux sources d’un courant centrifuge - celui de l'intériorité - en se reconnectant à l’axe interne d’une verticalité où l’inspiration coule de source. A l’infobésité, il faut donc opposer une diététique informationnelle capable de sélectionner nos nourritures intellectuelles et psychiques en respectant les rythmes organiques nécessaires à leur intégration. 

Diététique informationnelle


Par sa méthodologie, l’approche intégrale nous aide dans cette diététique informationnelle. Elle permet notamment de hiérarchiser l’information selon différentes visions du monde et stades de développement à l’œuvre dans les interprétations proposées. C’est ainsi que, par exemple, nous avons interprétés les évènements de Janvier dernier à partir du modèle développemental de la Spirale Dynamique dans deux billets intitulés Charlie et la Spirale. L’approche intégrale permet aussi de comprendre l’information de manière systémique à partir des quatre quadrants fondamentaux qui sont ceux modèle AQAL de Ken Wilber. Ce modèle propose une nouvelle intelligibilité en mettant en rapport les mondes intérieurs de la conscience (subjectivité) et de la culture (intersubjectivité) avec leurs corrélats objectifs que sont les comportements personnels d'une part et de l'autre l'organisation socio-politique sous-tendue par le système technologique. C’est ainsi, par exemple, que nous avons proposé Une vision intégrale de la monnaie en utilisant ces quatre quadrants. 

Par-delà la diversité des perspectives, leur hétérogénéité et leurs contradictions, une vision intégrale met en perspective la cohérence d’une multiplicité de points de vue au sein d’une totalité à la fois complexe et évolutive. Une cohérence globale dont nous éloigne la déconstruction analytique, chaque élément considéré isolément perdant une signification profonde qu’elle ne trouve que dans sa relation aux autres éléments. Si une cartographie de ce type permet une conscience plus globale, c'est parce qu'elle est le support d'une intuition visionnaire directement connectée à la dynamique de la vie/esprit qui unit la conscience individuelle à la totalité vivante et multidimensionnelle à laquelle elle participe intimement, au-delà de l'égo.

Participer à cette dynamique c'est retrouver cet esprit de vacance qui est celui du « Wu Wei » chinois traduit en français par "non agir". Un non agir qui n’est pas passivité, inertie ou paresse mais participation vécue et intuitive à l’harmonie dynamique du Kosmos en évolution. Cette connexion de l’individu au milieu multidimensionnel où il évolue permet de dépasser la dualité du mental pour retrouver la profondeur organique d’un continuum entre esprit et matière, intérieur et extérieur. Accéder à cette profondeur c'est passer d'un champ rationnel fondé sur la dualité à un champ opérationnel fondé sur l’unité harmonique et holistique qui lie l’être humain à son milieu (humain, naturel et symbolique). Comme le dit le philosophe Abdenour Bidar : " Vivre spirituellement c'est vivre relié : à soi, aux autres, à la nature et à l'univers ".

Grâce à cette connexion, la conscience perçoit le monde phénoménal comme manifestation de la dynamique globale de la vie/esprit. Participer intuitivement à cette dynamique c’est influencer et transformer, de l’intérieur, son milieu comme ce milieu vous influence par rétroaction. Pour comprendre cette boucle systémique d'interaction entre l’intérieur et l’extérieur, je vous propose ci-dessous un extrait de l’article passionnant de Pierre Trigano - Le réel est synchronicité – où l’auteur évoque le récit fait par le sinologue Richard Wilhelm relatant l'activité un faiseur de pluie rencontré en Chine. 

Le réel est synchronicité. Pierre Trigano 


Dans son introduction au Yi King (traduction française d’Etienne Perrot), Jung rapporte un témoignage de son ami sinologue Richard Wilhelm : la région de Chine où il séjournait fut frappée d’une sécheresse catastrophique. Au comble du désespoir, les chinois firent appel aux services «paranormaux» d’un faiseur de pluie, un vieil homme émacié qui ne souhaita qu’une chose pour accomplir son office : qu’on mette à sa disposition une maison isolée et tranquille. Il s’y enferma trois jours, et le quatrième, les nuages se firent denses, et il y eut une forte chute de neige, en grande quantité, à une saison qui n’était pas pourtant celle de la neige. 

Émerveillé et fortement impressionné, Richard Wilhelm demanda au vieil homme comment il avait ‘‘fait’’ la neige. Celui-ci lui répondit contre toute attente qu’il n’en était pas responsable. Il avait simplement constaté que le pays tout entier était en désordre intérieur et qu’il se retrouvait dès lors lui-même affecté par ce désordre. ‘‘Aussi la seule chose que j’avais à faire était d’attendre trois jours jusqu’à ce que je me retrouve en Tao, et alors, naturellement, le Tao fit la neige’’. C-G Jung 

Comprenez que, pour Jung, cette histoire qu’il nous raconte n’est pas une jolie fable, mais un fait réel dont son ami sinologue, Richard Wilhelm a été le témoin objectif, dans la Chine encore traditionnelle du début du XX ème siècle, bien que notre science rationnelle occidentale n’y puisse rien comprendre. Et c’est la réalité, pour Jung, de cette histoire qui fait précisément à ses yeux, toute son importance, au point qu’il conseillait toujours à ses élèves de commencer par son récit lorsqu’ils devaient faire des conférences pour présenter la voie des profondeurs. Jung découvre en effet dans cette histoire un témoignage saisissant de la synchronicité qu’il définit comme une relation a-causale entre des phénomènes qui n’appartiennent pas au même registre du réel. 

Le faiseur de pluie – figure haute en couleur de la Chine taoïste traditionnelle que la chape de plomb rationaliste du maoïsme a fait totalement disparaître – vit manifestement l’univers (y compris dans sa réalité physique) comme un ‘‘unus mundus’’, comme disent les alchimistes, c’est-à-dire comme un monde UN. Il y a un seul monde : tous les registres du réel sont en synchronicité, c’est à dire les uns AVEC les autres, la sécheresse qui est un état physique de la matière, AVEC le désordre du pays qui ici est manifestement pour le faiseur de pluie un état psychique.

Mais qu’est-ce que l’ordre ? C’est précisément la situation dans laquelle le monde et les êtres sont dans l’AVEC. 

Le Tao est en effet fondamentalement le principe de l’Avec selon la pensée chinoise : il est le Yin, le féminin, avec le Yang, masculin, le Yang avec le Yin. Toutes les relations sont harmonieuses lorsque les deux énergies féminine et masculine sont dans l’Avec, en communion. Le Tao est analogue à la notion jungienne du Soi, conjonction du féminin et du masculin, centre de l’être à partir duquel tout se réunit et s’harmonise. Notre civilisation moderniste occidentale qui sépare radicalement les registres extérieur et intérieur, la matière et la psyché, ne peut tout simplement pas penser ce principe. Et dès lors celui-ci ne peut lui apparaître dans son opérationnalité. 


Lorsque le terrible tsunami est venu frapper l’Asie en décembre 2004, le moins que l’on puisse dire est que les discours occidentaux n’ont pu spontanément l’associer à un désordre dans le psychisme de nos contemporains. Certes, on a pu très vite comprendre qu’il existait un rapport physique de cause à effet entre ce phénomène naturel et le réchauffement climatique de la planète, et reconnaître que celui-ci est lui-même l’effet écologique désastreux du développement économique exponentiel du capitalisme mondialisé. 

Mais la science occidentale répugnerait à lier cet événement avec le désordre psychique qui affecterait l’humanité, car la psyché et les problèmes psychologiques des individus relève d’un autre registre du réel que celui de l’écologie. Le logos scientifique occidental ne peut en effet approcher le réel que sur le mode d’un principe de causalité linéaire selon lequel un phénomène serait toujours mécaniquement produit par un enchaînement d’autres qui sont tous sur le même registre que lui : dans l’exemple que j’ai choisi le registre est écologique, concerne la façon dont la «matière» en quelque sorte écologique de la Terre est affectée. 

‘‘Comment avez-vous produit la neige ?’’, demande ainsi Richard Wilhelm en bon européen causaliste ! Le Chinois répond qu’il ne peut pas être responsable de la neige, mais seulement de l’ordre qui existe à l’intérieur de lui-même : si, dans un univers en désordre, je me mets en ordre à l’intérieur de moi (en me centrant sur le Tao, le Soi), synchronistiquement, c’est à dire sans lien causal, cela peut favoriser l’émergence d’un ordre harmonieux dans ma réalité extérieure

Entendons bien ce que signifie «sans lien causal» : quoique je fasse, je ne suis pas maître de cette évolution ; ce n’est pas moi qui la produit, qui la contrôle ou qui peut la programmer. Elle est le fait du Tout Autre, du Tao qui lui seul, pour ainsi dire, sait le chemin que je dois suivre pour approcher de l’harmonisation de toute chose. (Fin de l’extrait de l’article de Pierre Trigano

Une Continuité Organique

Que peut signifier aujourd’hui ce récit du faiseur de pluie dans le contexte de la crise systémique que nous traversons ? Une des principales leçon à en tirer est cette continuité organique entre l'intérieur et l'extérieur, bien loin de la dualité cartésienne fondatrice de l'objectivisme moderne. De la même manière que le monde extérieur reflète nos états intérieurs, la transformation de notre conscience influence notre milieu d'évolution. En évoquant ce récit sur son blog – Fabulo - La Licorne écrit ceci : « Ne serait-il pas temps de se demander si les désordres climatiques extérieurs ne sont pas le parfait reflet de nos désordres "intérieurs" ? Ne serait-il pas temps de se pencher sur notre "pollution psychique"...? Cette pollution "intérieure" fruit de nos peurs, de nos haines et de nos pensées négatives, n'est-elle pas celle qui, réellement, fait grimper la "température mondiale", au sens propre comme au sens figuré, et n'est-elle pas aussi en rapport direct avec toutes sortes de "catastrophes" humaines et écologiques ? »  (Histoire de changement climatique : le Faiseur de pluie)

Les propos de Pacôme Thiellement sur le réchauffement climatique de l’âme lui font écho : « C’est en nous-mêmes que nous devons observer la présence de l’effet de serre, l’accumulation du gaz dans l’atmosphère, l’augmentation de la température terrestre, l’élévation du niveau de la mer, l’acidification des océans et la fonte des glaciers. Comment ? En comprenant que le phénomène du réchauffement climatique est absolument connexe de celui de l’inflation de l’ego de l’individu contemporain jusqu’à la démence. » (Le réchauffement climatique de l'âme)

Une telle inflation de l’égo ne doit pas nous faire interpréter le récit du faiseur de pluie comme l'apologie d'une régression vers une pensée magique qui donne à l'individu, inspiré par une toute puissance infantile, l’illusion d’un pouvoir total sur son environnement. Dans ce récit ce n'est pas l'individu qui agit : il est suffisamment transparent pour être animé par une dynamique interne dont il devient l'agent opérationnel. Cette histoire évoque un saut évolutif au-delà de l’ego qui permet de synchroniser la conscience avec le rythme interne de cette totalité harmonique qui nous transcende et nous constitue. Il s'agit de dépasser une pensée causale et explicative qui peut avoir son sens dans un champ spécifique, pour accéder à une vision globale et organique qui transforme notre milieu en remettant tous les éléments du puzzle informationnel à leur place. 

Devenir des "Faiseurs de pluie"


Comme l’écrit Pierre Trigano : « La prise de conscience des synchronicités nous permet de comprendre que ce n’est pas la cause formelle d’un évènement qui fonde son sens profond, mais bien l’unité invisible qui le traverse et l’associe à d’autres évènements et tout en même temps au monde intérieur de notre psyché. Notre conception du réel s’en trouve considérablement amplifiée. L’expérience de la synchronicité le révèle à nous comme une ‘‘association’’ multidimensionnelle et universelle. » (Le Réel est synchronicité) 

Pour comprendre en profondeur, il nous faut donc, plus que jamais, prendre de la hauteur en refusant de s’enferrer et de s’enfermer dans les labyrinthes abstraits d'un mental disjonctif. Le principe de complexité qui régit nos sociétés de l'information est ce principe relationnel de l’Avec que l'on retrouve dans le préfixe Syn (avec en grec) à travers les approches synthétique et synchronique, systémique et synergique, symbolique et symbiotique, liées à l'émergence du nouveau paradigme. Cette intelligence relationnelle, au cœur de toutes les grandes traditions, est une pensée organique qui complète et dépasse le mécanisme abstrait de la causalité pour faire émerger une vision globale et opérationnelle. 

La crise évolutive qui s’est exprimée ces derniers temps à travers la conjonction de divers évènements nous met en face de nos errements et de nos erreurs, de notre démesure comme de nos limitations, pour nous apprendre à les dépasser à travers un saut qualitatif.  C'est ainsi que nous pouvons nous libérer de l'hégémonie du mental par un saut évolutif qui permet d'associer raisonnement intellectuel et résonance intuitive, abstraction rationnelle et sensibilité relationnelle, causalité mécanique et vision organique, pensée analytique et inspiration créatrice. 

Comme le dit Serge Durand, co-auteur du Guide Almora de la Spiritualité, dans son commentaire à notre billet récent sur Le Syndrome de Copenhague : « Une évolution authentique ne peut être qu'une évolution de la conscience au-delà de la conscience ordinaire réduite à un moi mental, émotionnel, logeant dans un corps et étendu matériellement avec des artefacts pensés mentalement. » Devenir aujourd’hui un faiseur de pluie dans le désert spirituel du monde contemporain, c’est retrouver le rôle fondamental de l'être humain, celui de lien vivant et vibrant entre terre et ciel, matière et esprit, en passant d'une conscience rationnelle à une conscience opérationnelle qui agit de l'intérieur sur son milieu par la puissance créatrice de son intention et de sa vision. Retrouver ce rôle passe par le chemin d'une Écologie intérieure évoquée notamment dans notre dernier billet.


Ressources 

Le Réel est synchronicité  Pierre Trigano 


Le Sel des Rêves, une lecture nouvelle de CG Jung de Pierre Trigano et Agnès Vincent


Le réchauffement climatique de l’âme  Pacôme Thiellement. Site Vents Contraires

Partout des solutions existent  Cyril Dion. Libération

Pensée écologisée  Edgar Morin in blog Fabulo de La Licorne

Dans Le Journal Intégral : Charlie et la Spirale (1) et (2L'Approche Intégrale de Ken Wilber

Une vision intégrale de la monnaie     Intuition et Complexité

Devoir de Vacance : présentation des sept billets sur l'Esprit de Vacance

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