dimanche 27 mars 2011

Deux Penseurs Evolutionnaires

Le 8 Avril aura lieu à Paris, au Forum 104 à 19h30, une rencontre exceptionnelle entre deux figures de la "culture intégrale", Ervin Laszlo et Andrew Cohen, autour de la question suivante :
"Comment faire évoluer la conscience humaine pour créer un nouveau monde ?"




L’état d’urgence mondial
Ervin Laszlo est né en 1932 à Budapest en Hongrie. Ce philosophe des sciences, théoricien des systèmes, a publié plus de soixante dix livres dont le dernier est Science et champ akashique : une théorie intégrale du tout. Ervin Laszlo est l’éditeur de Worlds Futures : The Journal of General Evolution et le fondateur du Club de Budapest qu’il a crée pour "centrer l'attention sur l'évolution des valeurs humaines et de la conscience".
En pleine crise financière, il fait paraître le 30 Octobre 2008, une déclaration intitulé L’Etat d’Urgence Mondial qui est un appel aux dirigeants pour un changement de civilisation fondée sur une profonde transformation culturelle. Il y dit ceci : "La crise globale à laquelle l'humanité est confrontée affecte aujourd'hui toutes les personnes et toutes les sociétés... Les macro-tendances se confirment depuis plusieurs décennies et sont en train d’atteindre un palier irréversible...
La modélisation scientifique de systèmes complexes démontre que lorsque les systèmes atteignent un état critique d'instabilité, soit ils se décomposent, soit ils atteignent un niveau de meilleur fonctionnement. À partir de ces “points de non-retour”, il n'est plus possible maintenir le statu quo et ce mode d'organisation et de fonctionnement...
L'accélération de ces évolutions et le croisement de leurs implications indiquent que pour sortir de la présente crise globale et atteindre un monde plus pacifique et soutenable, nous ne disposons vraisemblablement qu’à peine trois ou quatre ans après 2008".
L’émergence d’un monde nouveau
Trois ans sont passés depuis la parution de ce texte et la catastrophe de Fukushima vient souligner la précision du constat. Cet évènement est un symptôme de plus de l'effondrement annoncé par Laszlo si l'humanité ne se saisit pas d'un tel évènement pour s’inscrire dans une profonde dynamique de régénération, telle qu'elle est décrite par Laszlo lui-même mais aussi Edgar Morin, notamment dans son dernier ouvrage La Voie, ou hier par Albert Einstein qui affirmait dès les années cinquante l’urgence d'un changement de niveau de conscience.
Dans L’Etat d’Urgence Mondial, Ervin Laszlo décrit ainsi cette régénération : « ... Bien que la majorité de la population du monde n'ait pas encore reconnu le risque d'un effondrement total à grande échelle, des millions d'individus et de groupes d’avant-garde ont depuis des années mentionné ces menaces et défis. Cet "éveil” est un signal positif de la vitalité de l'esprit humain et de sa capacité à répondre avec souplesse et créativité aux dangers qui menacent l'humanité.
Ceci doit être soutenu et facilité par tous les moyens appropriés, car l'échelle et l'urgence de la transformation requise sont largement supérieures à l'étendue des efforts actuels. Cela sera “trop peu, trop tard” sauf si la communauté humaine toute entière se mobilise rapidement pour renverser ces tendances macro-économiques avant qu'elles ne deviennent irréversibles
...
...Le mode de pensée dominant actuel ne peut être maintenu plus longtemps... Toute crise porte en elle une opportunité de changement et de transformation. Les idées et modèles nécessaires aux nouveaux systèmes existent déjà... Un mode de pensée et des outils différents peuvent accélérer l'émergence d'un monde nouveau pour échapper aux scénarii les plus pessimistes. Mais il faut agir maintenant. Le temps est compté et la tâche est sans précédent...»
Du Club de Budapest à l’Université Intégrale
Suite à son expérience avec le Club de Rome, Ervin Laszlo fonde en 1993 le Club de Budapest, une association internationale dédiée au développement d’une pensée et d’une éthique nouvelles aidant à résoudre les défis sociaux, politiques, économiques et écologiques du vingt et unième siècle. Sa philosophie est fondée sur le constat que ces défis gigantesques ne peuvent être relevés que par le développement d’une conscience culturelle globale.
Le Club de Budapest a donc pour mission d’être un catalyseur pour la transformation vers un monde durable en travaillant à l’émergence d’une conscience planétaire, à l’intégration de la spiritualité, des sciences et des arts ainsi qu’à l’interconnexion des générations et des cultures. Ce qui fait l'originalité de cette organisation c'est sa démarche systémique et intégrale qui opère la connexion entre l'évolution de la conscience, des modèles d'interprétation et d'organisation afin de mettre en oeuvre des stratégies créatrices pour le vingt et unième siècle.
C’est à l'initiative du Club de Budapest en France qu'est crée à Paris une Université Intégrale à en Février 2008. Une initiative qui met en lumière dans l’espace francophone l’émergence planétaire d’une nouvelle approche épistémologique qualifiée d’intégrale : « Une manière évolutionnaire d'envisager le monde, s'appuyant sur l'ensemble des sciences et connaissances existantes, modernes et traditionnelles, occidentales et orientales, scientifiques, artistiques et spirituelles. Cette démarche globale, inclusive, systémique et holistique donne un relief différent à chaque discipline et un autre regard sur la vie. Elle est indissociable de la nécessaire mutation en cours du modèle socio-organisationnel actuel du monde...
... Ervin Laszlo, le fondateur au niveau international du Club de Budapest, est reconnu comme un des initiateurs de l’évolution de la théorie des systèmes, la systémique, vers une approche plus intégrale. En créant l’Université Intégrale à Paris, notre souhait était premièrement de faire mieux connaître l’approche intégrale en France où elle était restée encore relativement méconnue et deuxièmement de mettre en perspective les travaux d’Ervin Laszlo en les replaçant dans le contexte plus large des autres chercheurs de ce domaine. »
On peut voir sur le site de Brian Van der Horst dont nous avons présenté ici l'itinéraire, une très intéressante présentation Powerpoint, en anglais, où l'auteur compare la théorie intégrale d'Ervin Laslzlo à celle de Ken Wilber.
Le 8 Avril, le dialogue s’annonce passionnant entre Ervin Laszlo, promoteur de "l'état d'urgence mondial" et Andrew Cohen initiateur d'une nouvelle forme - évolutive - de spiritualité. Ces deux penseurs évolutionnaires et visionnaires débattront autour des questions suivantes : "Comment faire évoluer la conscience humaine pour créer un nouveau monde ? Quels sont les modes de pensée et les outils différents qui peuvent accélérer son émergence ?"
Andrew Cohen
Né en 1955 à New York, Andrew Cohen est un enseignant spirituel américain qui transmet la vision originale de « l'Eveil évolutif », un éveil spirituel qui, au 21ème siècle, s’effectue dans le contexte d’une évolution cosmique de quatorze milliards d'années. N'hésitant pas à remettre en cause l'individualisme qui caractérise la plupart des approches spirituelles contemporaines, Andrew Cohen propose une vision novatrice qui transcende le narcissisme ambiant de la post-modernité en éveillant chez l’individu un énergie créatrice et spirituelle permettant de participer avec le plus d’intensité possible à l'évolution de la conscience et de la culture.
Écrivain, conférencier et aussi musicien, cette figure du mouvement intégral définit donc une nouvelle spiritualité évolutive, profondément originale, à travers ses écrits, retraites et dialogues avec des philosophes, des scientifiques, des mystiques et des religieux de toutes les grandes traditions.

L’Eveil Evolutif
Le site EnlightenNext France propose un certain nombre de citations d’Andrew Cohen qui permettent de se sensibiliser à l’"éveil évolutif " et que l'on peut recevoir régulièrement et gratuitement par courriel :
« - La clarté d'intention est le fondement de la vie spirituelle. Est-ce que je veux devenir un vaisseau libéré pour l'impulsion évolutive dans ce monde ? C’est à chacun de nous de décider : qu'est-ce qui est le plus important pour moi ? Dès que l’intention est claire, l'esprit devient focalisé. Quand l'esprit est focalisé, il n’y plus qu’un but. Lorsqu’il n’y plus qu’un but, l'impulsion évolutive nous guidera. En restant fidèle à notre intention la plus haute, encore et encore et encore, nous découvrirons la force d'âme, la force spirituelle - le courage inspiré de prendre responsabilité pour nous-même, pour notre culture, et finalement, pour le destin du processus évolutif lui-même.
- Un être humain qui essaie de catalyser l'émergence d'un plus haut niveau de conscience, est comme un vaisseau spatial qui cherche à se libérer de la gravité de l'atmosphère terrestre. La gravité dont nous nous efforçons de nous libérer est le poids historique de notre conditionnement, à la fois personnel et culturel. Si nous pouvons générer suffisamment d'élan vertical pour nous propulser au delà des frontières de qui nous avons été, nous nous trouverons en territoire inconnu.
- La tension évolutive est une intensité soutenue qui réveille l’âme et nous pousse à nous tenir droit, focalisé et attentif. C’est une traction verticale, un puissant sentiment d’urgence à rendre manifeste ce qui n’a pas encore eu lieu. C’est une exigence incessante de devenir plus, d’atteindre des niveaux de maturité philosophique, morale et spirituelles nouveaux et plus élevés. Cette tension positive crée un contexte pour les relations humaines puissant et spirituellement chargé car il est imprégné de la présence vivante du possible.
- L’Eveil Evolutif éclaire cette réalité que rien n’est statique, tout est en vibration et, plus important encore, nous allons tous quelque part. Nous sommes sur un train en marche. Ce train est l’impulsion évolutive et les rails sont ce processus qu’elle engendre à chaque instant
EnlightenNext
Autour d’une question centrale : "Qu'est-ce que l'éveil et qu’est-ce que cela signifie pour le monde d'aujourd'hui ? » Andrew Cohen fonde en 1991 un magazine qui fait écho à ses recherches : What Is Enligthenment ? ( Qu'est-ce que l'Eveil ?). Ce magazine a changé de nom récemment pour devenir EnlightenNext, du nom du réseau international constitué par tous ceux qui suivent ses recherches et ses enseignements dans de nombreux pays.
Tout au long de ces années, Cohen et son équipe de journalistes ont donc rencontré mystiques et matérialistes, physiciens et philosophes, militants, artistes ou athlètes avec la volonté de créer un forum de dialogue, d’enquête et de réflexion sur le sens de la vie humaine à notre époque. Eveil et Evolution est la version française de EnlightenNext. A travers les sept numéros déjà parus, ce magazine, à la fois philosophique, culturel et spirituel est un vecteur francophone de la culture intégrale qui propose des perspectives nouvelles dans de nombreux domaines : la pensée et la science, l’art et l'environnement, la politique et l’économie.
Andrew Cohen est un ami de Ken Wilber, un des principaux théoriciens de la vision intégrale. Le premier se définit plutôt comme un enseignant spirituel et le second comme un "pandit" c'est à dire un lettré dans la tradition indienne. Intitulés Le sage et l’érudit, leurs dialogues font l’objet d’articles renommés et passionnants, lisibles en français sur le site d'Eveil et Evolution et en anglais sur celui d'EnlightenmentNext. Le Journal Intégral propose ici un de ces entretiens dont le sujet est le dernier livre de Wilber : Integral Spirituality.
Un séminaire avec Andrew Cohen
Le 9 Avril, au lendemain de la rencontre entre Laszlo et Cohen, ce dernier propose à Lille un séminaire dont le thème est : Confiance en Soi Spirituelle. Un socle inébranlable pour le changement. « Changer est une aspiration que nous connaissons tous, mais celle-ci peut nous conduire à être confrontés à nos peurs, nos doutes ou à faire face à nos propres résistances au changement. Andrew Cohen développe depuis 25 ans un enseignement qui nous invite au changement.
La source de profonde inspiration, qu’il nomme Confiance en Soi Spirituelle, peut nous permettre de dépasser nos résistances. Cette confiance se cultive par l’éveil profond à Qui nous sommes vraiment et à Pourquoi nous sommes sur cette Terre. Lors de ce séminaire, nous découvrirons, concrètement en nous, cette Source spirituelle de confiance, ultime fondation pour transcender les réponses conditionnées issues de notre histoire et notre culture. Notre profonde aspiration pour le changement, une fois libérée, deviendra le moteur de notre évolution.
La Confiance en Soi Spirituelle comble le coeur d’un amour dont la plénitude ne dépend pas de circonstances extérieures. C’est un amour qui est inébranlable, immobile, et indestructible. Un tel amour, qui simultanément transcende et embrasse le monde, pousse les êtres humains à évoluer depuis leur profondeur et à devenir de meilleurs citoyens de notre monde et du cosmos. Connaître la source de cet amour revient à savoir avant toute pensée que la vie est bonne. Cette bonté inhérente est qui nous sommes réellement.” »
Renseignement Pratiques
Pour la rencontre entre Ervin Laszlo et Andrew Cohen, comme pour le Séminaire d'Andrew Cohen, tous les renseignements pratiques sont disponibles ici sur le site de EnlighnemntNext France.

samedi 19 mars 2011

Penser la Catastrophe


Où, dans le contexte de la catastrophe de Fukushima, nous voyons comment, dès les années 50, en affirmant l’urgence d'un changement de niveau de conscience pour se libérer de l’emprise exercée par la techno-science sur la société, Einstein avait anticipé la dynamique de l'évolution culturelle en posant les bases d'un nouveau mode de pensée, qualifié aujourd'hui d'intégral.

Il est plus difficile de désagréger un préjugé qu'un atome
. Einstein
La catastrophe nucléaire de Fukushima génère un flux continu d'images, d'informations et d'émotions qui tendent à submerger, de manière hystérique, toute forme de réflexion qui permettrait d'en saisir le sens véritable. Pour canaliser ce flux, il faut essayer de penser la catastrophe en contextualisant les faits et en les mettant en perspective afin de comprendre en quoi ils font évènement.
L'évènement est cette forme temporelle qui révèle de manière significative l'imaginaire et les logiques à l'oeuvre dans la conscience collective qui fonde nos sociétés. Donner un sens à l'évènement, c'est établir entre les faits bruts et notre subjectivité un pont symbolique qui permet de les interpréter dans toute leur profondeur sans se faire submerger par l'intensité émotionnelle et l'hystérie mimétique qu'ils provoquent.

Contre le catastrophisme ambiant qui instrumentalise les peurs collectives au service d’intérêts politiques, idéologiques ou économiques, il faut s'arracher de l'hypnose médiatique comme des analyses factuelles pour comprendre la signification de cet évènement en se posant une question toute simple : de quoi cette catastrophe est-elle le signe ?

Une crise systémique
Selon nous, cette catastrophe peut être interprétée comme le symptôme d'un délire prométhéen qui s'est emparé de l'espèce humaine en lui faisant prendre des risques inconsidérés, susceptibles de la détruire en détruisant son milieu naturel. Seul un tel délire peut conduire une nation ayant vécu les tragédies d'Hiroshima et de Nagasaki à construire cinquante quatre réacteurs nucléaires sur une faille sismique qui l'expose aux tsunamis.
Dans un article du Monde, intitulé : "Il faut sortir de la religion de l'atome" François Géal, maître de conférences à l'Ecole normale supérieure, explique que " Derrière les intérêts économiques et financiers colossaux en jeu, il y a plus fondamentalement l'attachement à un dogme. Le dogme de la quasi-perfection, en tout cas de l'inocuité de la technologie nucléaire, est en France l'objet d'une foi aveugle chez ses sectateurs... Que ce triste avatar du scientisme soit une sinistre caricature de la célèbre formule cartésienne : "Nous rendre comme maîtres et possesseurs de la nature", cela ne change rien à l'affaire."
Au Japon, les ingénieurs comme les autorités politiques en sont réduits à observer le développement d'un processus destructeur qu'il ne contrôle plus et sur lequel ils n'ont plus de moyens d'actions réels. Métaphore monstrueuse d'une humanité qui, sous l'emprise de la technique, a perdu le contrôle de son destin.

On ne comprend rien à la catastrophe de Fukushima si on la considère de manière isolée. Une catastrophe technologique comme celle-ci n'est qu'un élément - parmi d'autres - d'une crise systémique bien plus profonde qui comporte de nombreux autres aspects, économiques et financiers, écologiques et sociaux, psychiques et culturels.
Cette crise systémique n'est rien de moins q'une crise évolutive. Celle d'un modèle fondé sur l'hégémonie d'une pensée abstraite et de son bras armé, la technoscience. Ce modèle a fait son temps, celui de la modernité, mais il n'est plus en phase avec la dynamique de l'évolution culturelle qui fait émerger de nouvelles formes de pensée et de sensibilité adaptées au mouvement perpétuel du monde globalisé et interconnecté dans lequel nous vivons.

Un délire narcissique
A de nombreuses reprises, notamment ici et , le Journal Intégral a abordé le thème du profond déséquilibre entre science et conscience tragiquement illustré par les évènements actuels. Dans un billet, nous avions décrypté la figure du Savant Fou, chargée d’exprimer ce délire prométhéen de manière imagée et symbolique à travers les mythes modernes véhiculés par la science fiction. Nous écrivions alors ceci. :

" Fasciné par l’image que lui renvoie la technologie, l’homme moderne régresse au stade narcissique d’une toute puissance infantile. Se croyant immortel, cet enfant narcissique invente des armes de plus en plus sophistiquées, détruit les ressources naturelles au profit de ses seuls intérêts égoïstes tout en brisant les liens symboliques et immémoriaux qui le reliaient tant à sa communauté qu'à l'espèce humaine.

Ce qui fait dire à Pierre Rahbi
: " Probablement paralysés par l'ensorcellement qu'exercent sur nous nos prouesses technologiques non contrôlées, notre capacité à servir la mort par nos puissances de feu, nous négligeons le bien suprême que représente la vie". Le monde fou dans lequel nous vivons n’est donc rien d’autre que la conséquence d’une folie collective, celle d’un scientisme délirant qui a pris la culture moderne en otage.

Auteur de ce chef d'oeuvre qu'est
La Barbarie, à lire absolument pour comprendre les ressorts du processus de décivilisation que nous sommes en train de vivre, le philosophe Michel Henry écrit ceci au sujet de l’emprise de la technique : « Elle est la barbarie, la nouvelle barbarie de notre temps, en lieu et place de la culture. En tant qu’elle met hors jeu la vie, ses prescriptions et ses régulations, elle n’est pas seulement la barbarie sous sa forme extrême et la plus inhumaine qu’il ait été donné à l’homme de connaître, elle est la folie. Ce n’est que peu à peu que nous prendrons la mesure de ce qu’implique dans notre monde, c’est-à-dire dans la vie des hommes, la mise hors jeu de la vie elle-même


Notre dernier siècle ?
La catastrophe a déjà eu lieu depuis longtemps dans nos têtes avant de se manifester dans le monde des faits.
L'évènement n'est rien d'autre que le miroir où une société peut observer son état : une image qui fixe et illustre à un moment donné le courant souterrain animant la conscience collective. La catastrophe a été annoncée depuis des décennies, non par quelques illuminés en quête de visibilité, mais par des sages et des savants venus d’horizons divers auxquels nous avons donné la parole dans cet autre billet où nous écrivions :

« Dans un livre au titre évocateur – Notre dernier Siècle ?Martin Rees, professeur d'astronomie et de cosmologie à l'université de Cambridge estime que : « les chances de survie des humains sur la Terre d'ici la fin du siècle ne dépassent pas cinquante pour cent… Les sciences nouvelles donnent aux humains les moyens de perpétrer des actes terrifiants ou de commettre des erreurs apparemment anodines aux retombées dévastatrices ».

Ce constat ne doit ni nous paralyser, ni nous affoler mais nous donner l’énergie nécessaire pour relever le défi de ce qu’Albert Einstein nomme une nouvelle façon de penser d’autant plus indispensable que, selon lui : « Les problèmes auxquels nous sommes confrontés ne peuvent être résolus au niveau et avec la façon de penser qui les a engendrés. »

Depuis des décennies, de nombreuses voix – les plus éclairées – font écho à celles d’Einstein. Il faut avoir le courage et la lucidité non seulement d’écouter mais surtout d’entendre ces voix de sagesse qui brisent le consensus hypnotique menant tout droit sur les chemins de la facilité et de la fatalité. Toutes expriment le même constat : sans une évolution radicale de nos modes et de nos modèles de pensée, l’humanité court à sa perte. »

Un nouveau mode de pensée
Einstein n'était pas seulement un savant génial, c'était aussi un penseur visionnaire qui réfléchissait à ce qui était pour lui un grand sujet d'inquiétude : l'évolution de la science et de la technique. Selon lui "le progrès technique est comme une hache qu’on aurait mise dans les mains d’un psychopathe... Il est étrange que la science, qui jadis semblait inoffensive, se soit transformée en un cauchemar faisant trembler tout le monde... Il faut prévenir les hommes qu’ils sont en danger de mort, la science devient criminelle..."
Selon Einstein, le danger représenté par une science sans conscience nécessite l'émergence d'une autre forme de pensée : " Il devient indispensable que l'humanité formule un nouveau mode de pensée si elle veut survivre et atteindre un plan plus élevé ". Cette pensée novatrice nécessite de changer de niveau de conscience car "aucun problème ne peut être résolu sans changer le niveau de conscience qui l'a engendré."
Il serait fou de penser que l'on va résoudre les divers problèmes posés à l'homme par l'emprise de la technique avec les outils conceptuels qui les ont crées : "La folie est de toujours se comporter de la même manière et de s’attendre à un résultat différent. "

"Notre monde est menacé, dit-il, par une crise dont l'ampleur semble échapper à ceux qui ont le pouvoir de prendre de grandes décisions pour le bien ou pour le mal. La puissance déchaînée de l'homme a tout changé, sauf nos modes de pensées et nous glissons vers une catastrophe sans précédent. Une nouvelle façon de penser est essentielle si l'humanité veut vivre. Détourner cette menace est le problème le plus urgent de notre temps."


Une vision globale et évolutionniste
Ce nouveau mode de pensée doit redonner toute sa place à l'intuition : "Le mental intuitif est un don sacré et le mental rationnel son fidèle serviteur. Nous avons créé une société qui honore le serviteur et a oublié le don". En retrouvant le sens d'une globalité à laquelle participe la subjectivité humaine, l'intuition permet de dépasser l'illusion intellectuelle d'une séparation avec notre milieu social, naturel et cosmique :
"Un être humain fait partie d'un tout que nous appelons "l'Univers" ; il demeure limité dans l'espace et le temps. Il fait l'expérience de son être, de ses pensées et de ses sensations comme étant séparés du reste - une sorte d'illusion d'optique de sa conscience. Cette illusion est pour nous une prison, nous restreignant à nos désirs personnels et à une affection, réservée à nos proches. Notre tâche est de nous libérer de cette prison en élargissant le cercle de notre compassion afin qu'il embrasse tous les êtres vivants, et la nature entière, dans sa splendeur..."

L’évolution humaine apparaît alors comme un long processus de décentrement qui permet de se libérer de l'emprise des intérêts purement égoïstes pour se développer en intégrant des sphères de plus en plus larges qui sont celles du milieu humain et culturel, naturel et cosmique où nous évoluons.
Ce processus évolutif est la conséquence et l'effet d'une transformation intérieure : "N'essayez pas de devenir un homme qui a du succès mais un homme qui a de la valeur... La vraie valeur d'un homme se détermine en examinant dans quelle mesure il s'est libéré de son Moi".

La préscience d'une vision intégrale
Pour faire advenir ce nouveau mode de conscience, il faut sortir des ornières de la pensée réductionniste et de l'ultra-spécialisation en prenant en compte toutes les ressources cognitives - notamment celle de la subjectivité - et en tissant entre elles des liens qui permettent d’élaborer cette vision globale et multidimensionnelle. Pour ce faire, il faut absolument se libérer des limites de la pensée abstraite en redonnant toute sa place au pouvoir créateur de l'imaginaire : " L'imagination est plus importante que la connaissance. Inventer c'est penser à côté".
Einstein avait la préscience d'une vision intégrale fondée sur l'alliance entre raison et intuition, cerveau gauche et cerveau droit, science et sagesse car «La science sans religion est boiteuse, la religion sans science est aveugle.» Cette religion dont il est question n'est, bien-sûr, pas celle - fermée - du dogme mais celle d'une émotion qui ouvre sur un mystère étonnant :
"La plus belle chose que nous puissions éprouver, c'est le mystère des choses... L'émotion la plus magnifique et la plus profonde que nous puissions éprouver est la sensation mystique. Là est le germe de toute science véritable. Celui à qui cette émotion est étrangère, qui ne sait plus être saisi d'admiration, ni éperdu d'extase est un homme mort."

Extase, saisissement : ces mots du vocabulaire mystique utilisés pour qualifier les fondements de la démarche scientifique montrent bien à quel point toute connaissance véritable naît de l'intuition sensible avant d'être formalisée par la rigueur conceptuelle de la raison.

La dynamique de l'évolution culturelle
Face au constat d'une emprise techno-scientifique née du déséquilibre entre science et conscience, Einstein a anticipé, dès les années cinquante, tous les thèmes mis en avant par ces mouvements d'avant-garde que sont la contre culture des années soixante, le nouveau paradigme des années quatre vingt, les créatifs culturels des années deux mille et l'émergence d'une culture intégrale aujourd'hui.
Ces thèmes sont ceux de la nécessaire émergence d'un nouveau paradigme fondée sur une vision globale qui se libère du réductionnisme et de l'utilitarisme dominant, sur une évolution personnelle animée par la quête de sens, le retour aux sources de l'intériorité et le développement des facultés créatrices, sur une diversité cognitive permettant l'intégration de l'intuition et de la raison au sein d'une vision intégrale.
Savant rigoureux et visionnaire inspiré, Einstein est le prototype d'un penseur intégral qui décrit avec une extrême précision, soixante ans à l'avance, la crise évolutive affectant aujourd'hui une humanité qui n’est plus en phase avec la dynamique de l’évolution culturelle. Il fait partie de ces lanceurs d'alertes que nous n'avons pas su entendre, prisonniers que nous sommes de nos habitudes de vivre et de pensée. Tant il est vrai, comme il le disait lui-même, qu'"il est plus difficile de désagréger un préjugé qu’un atome".
Cette parole prend une résonance particulière en ces heures tragiques où une catastrophe nucléaire nous oblige à réviser nos préjugés dans la douleur et l'effarement Penser la catastrophe aujourd'hui c'est refuser de tomber dans le piège du catastrophisme pour donner à cet évènement la portée symbolique qui est la sienne afin d'en tirer les conséquences personnelles et collectives sur la façon dont nous menons notre vie et faisons société.

Une pédagogie des catastrophes
Que cet évènement dramatique soit un choc salutaire et salvateur qui remette en question nos cécités habituelles en nous réveillant de notre profond sommeil. Incapable d’évoluer dans un esprit de responsabilité, nous sommes devenus les adeptes de ce que Denis de Rougemont a nommé, le premier, une « pédagogie des catastrophes » :
« Je sens venir une série de catastrophes organisées par nos soins diligents quoique inconscients. Si elles sont assez grandes pour réveiller le monde, pas assez pour tout écraser, je les dirai pédagogiques, seules capables de surmonter notre inertie et l'invincible propension des chroniqueurs à taxer de “psychose d'Apocalypse” toute dénonciation d'un facteur de danger bien avéré mais qui rapporte ».

Récemment on s'est beaucoup moqué de Nicolas Hulot à propos de son film Le Syndrome du Titanic qui dénonçait la direction suicidaire prise par la civilisation moderne. Qualifié hier d'apocalyptique, ce film apparaît aujourd'hui comme visionnaire. Nous l'avons souvent noté, notamment ici : l'Apocalypse doit être prise dans son sens étymologique de révélation. Dans la dynamique de l'évolution, le dévoilement d'un ordre supérieur est toujours accompagné d'une transformation de l'ordre ancien qui détruit les formes inadaptées au courant dynamique de l'évolution en reconfigurant les autres d'une nouvelle manière, dans un niveau supérieur, plus complexe et plus intégré.
C'est pourquoi l'apocalypse fait référence à un double mouvement qui est à la fois créateur de nouvelles perspectives et destructeur des structures inadaptées. C'est ce double mouvement qui permet à la conscience de participer pleinement à la formidable dynamique évolutive, pressentie par Einstein, qui est à l'origine de nouvelles formes de pensée et de sensibilité.


Un processus de regénération
Dans La Voie, son dernier livre, Edgar Morin perçoit cette dynamique évolutive comme un processus de régénération qu’il décrit ainsi : " Il existe déjà, sur tous continents, en toutes nations, un bouillonnement créatif, une multitude d'initiatives locales, dans le sens de la régénération économique, ou sociale, ou politique, ou cognitive, ou éducationnelle, ou éthique, ou de la réforme de vie. Mais leur dispersion est inouïe. (Tout ce qui devrait être relié est séparé, compartimenté, dispersé).

Ces initiatives ne se connaissent pas les unes les autres, nulle administration ne les dénombre, nul parti n'en prend connaissance. Mais elles sont le vivier du futur. Le salut commencera par la base. Il s'agit de les reconnaître, de les recenser, de les collationner, de les répertorier, et de les conjuguer en une pluralité de chemins réformateurs. En chacun et en tous, il s'agit de relier, améliorer, stimuler. Ce sont ces voies multiples qui pourront, en se développant conjointement, se conjuguer pour former la Voie nouvelle, laquelle altérerait et décomposerait la voie que nous suivons, et nous mènerait vers l'encore invisible et inconcevable Métamorphose


Cette Métamorphose dont parle Edgar Morin correspond tout à fait au nouveau mode de pensée évoqué par Einstein. Ce dernier estimait que :"Nous aurons le destin que nous aurons mérité". A nous de mériter un destin à la mesure de l'esprit qui nous anime et nous guide, au-delà de nos limitations et de nos habitudes, vers ce que nous sommes de plus essentiel : des entités en développement, intégrées de manière sensible et créatrice aux divers milieux dans lesquels nous évoluons.

dimanche 13 mars 2011

Table des Matières (1) Demandez le programme !...



Ce billet est le centième posté dans le Journal Intégral depuis le 4 Janvier 2010. Il correspond donc à la fin d’un cycle et au début d’un nouveau cycle dans la spirale d’une dynamique évolutive.

A l’occasion de ce centième billet, nous vous proposons donc de jeter un regard dans le rétroviseur sur les premières étapes de ce chemin initiatique que nous parcourons depuis plus d'un an avec des lecteurs venus d'un peu partout sur la planète.

Nous présentons donc ci-dessous un résumé synthétique des premiers billets du Journal Intégral avec des liens qui permettent de s'y référer. Ce billet initie une série, publiée sur le blog au fil du temps, qui fera office de Table des Matières en présentant le résumé de tous les billets publiés dans Le Journal Intégral.

Le puzzle d'une nouvelle culture

L’écriture d’un blog est une forme d'ascèse jubilatoire qui peut se révéler parfois frustrante. Une page remplace l’autre qui est bien souvent condamnée à l’oubli si elle n’est pas relayée par les lecteurs à travers les réseaux sociaux, et ce, malgré sa pertinence et son intérêt pour les lecteurs mais aussi malgré l'effort et le plaisir suscités par sa rédaction chez l'auteur.

Cette frustration est d’autant plus grande dans le cas d'un blog qui a pour fonction de sensibiliser aux nouvelles formes prises par la dynamique de l'évolution culturelle dans la mesure où tous ses billets se répondent en écho, s'explicitant, se complétant et s'enrichissant les uns, les autres.

Chaque page du Journal Intégral est une pièce d'un puzzle qui dessine la vision intégrale d’un homme réunifié dans un monde réenchanté. Ces résumés permettront aux lecteurs de reconstituer ce puzzle en allant se référer à telle ou telle pièce permettant de mieux comprendre et intégrer toutes les autres.

La Table des Esprits

Pour tous ceux qui désirent s'initier à la vision intégrale ou qui effectuent une recherche sur un thème particulier liés à l'émergence d'une culture intégrale, cette Table des Matières est un outil qui vient compléter le classement des textes par libellés, la recherche par mots sur Google, les archives du blog et Les pages les plus lues.

En faisant l’effort - c’en est un, mais aussi un jeu - de relier entre elles toutes les pièces du puzzle, on voit émerger la figure de l’homme intégral. Si on tend l'oreille, celle-ci nous souffle les idées créatrices et les comportements novateurs inspirés par l’Esprit du temps.

Par une étrange opération de transmutation alchimique, la Table des Matières se transforme alors en Table des Esprits : elle devient le support d'une régénération culturelle, nourrissant le lecteur d'intuitions et de réflexions qui le font grandir en humanité à travers les divers stades d'un développement intégral.

Table des Matières I Janvier – Mars 2010
 
 
Cet aphorisme de Francis Blanche qui définit bien l'esprit du Journal Intégral : proposer de nouveaux modèles pour penser le changement de civilisation que nous sommes en train de vivre, en dépassant les fausses solutions - issues de modèles à l'agonie - qui sont autant de pansements sur une jambe de bois. Car, comme le dit d’Albert Einstein : "Aucun problème ne peut être résolu sans changer le niveau de conscience qui l'a engendré."
 
 
Suite au fiasco de la conférence de Copenhague, quelques réflexions sur la dimension intégrale de l’écologie. Faute d'une vision globale, le sujet essentiel n'a pas été esquissé mais esquivé. Ce sujet est celui des relations entre le réchauffement climatique et les modèles - sociaux, économiques et culturels - à l'origine de la crise écologique. Se focaliser sur les symptômes et chercher à les éradiquer à partir des modèles qui les ont générés, est encore le meilleur moyen que l'on a trouvé pour s'enfoncer plus avant dans la crise.
 
 
Le Chemin de l’évolution traverse un espace existentiel défini par quatre points cardinaux : la responsabilité, la résistance, l'espérance et l'inspiration. La responsabilité pour gérer le poids de la matière. La résistance pour maîtriser l'expansion de l'espace. L'espérance pour s'accorder à l'air du temps. L'inspiration pour s'éveiller à l'Intemporel.



C’est le titre du livre de Franck Visser qui vient de paraître aux éditions Almora. Cet ouvrage est une présentation synthétique du cheminement intellectuel, personnel et spirituel qui a conduit Ken Wilber à élaborer sa théorie intégrale. Paru aux Pays-Bas en 2001, il a déjà été traduit en cinq langues. « Ken Wilber, surnommé l'"Einstein de la conscience" est le philosophe américain contemporain le plus traduit dans le monde. Auteur de plus de 25 livres, ayant déjà ses oeuvres complètes publiées au Etats-Unis, il est reconnu par beaucoup comme le philosophe le plus original de notre époque. »



En publiant le livre de Frank Visser, Ken Wilber, La pensée comme passion sur l'un des tous premiers penseurs des trente dernières années, les éditions Almora rendent peut-être un grand service à la France qui risque une nouvelle fois de passer à coté de Wilber comme elle est passée, il y a 60 ans à côté de la Sémantique Générale de Korzybski. Or les deux oeuvres sont aussi essentielles, aussi révolutionnaires. Wilber est déjà connu un peu partout dans le monde sauf dans l'hexagone, à l'exception de quelques milieux bien précis.



L’émergence d’une culture intégrale n’est pas le fruit du hasard mais la conséquence d’une profonde transformation des mentalités qui tient aux conditions particulières vécues par l’humanité en ce début du troisième millénaire. Dans un article paru dans le Monde - Eloge de la métamorphose - Edgar Morin décrit à la fois le processus de désintégration qui touche notre civilisation et le processus complémentaire, celui d’une régénération, dû à un bouillonnement créatif qui voit l’émergence de visions novatrices permettant cette réforme de la vie et de la pensée qu’il annonce depuis longtemps.



Le chaman et le savant sont deux figures emblématiques qui renvoient à deux modes de connaissances qu’il n’y pas lieu d’opposer malgré leur profonde différence. C’est l’avis de Claude Lévi Strauss qui considère ces approches comme deux expressions d’une pensée correspondant à « deux niveaux stratégiques où la nature se laisse attaquer par la connaissance scientifique : l’un approximativement ajusté à celui de la perception et de l’imagination, et l’autre décalé ». Son expérience d’anthropologue lui fait considérer ces deux approches comme « valides », l’une « très proche de l’intuition sensible », « l’autre, plus éloignée ». La vision intégrale naît de l’association entre ces deux modes de pensée.



Le temps est venu de conjuguer deux types de profondeur, celles de la sensibilité et de l’intelligence, en réconciliant l’implication subjective de l’intuition et l’explication objective de la raison. Tel est le sens caché du film AVATAR et la raison de son phénoménal succès, le plus important de toute l'histoire du cinéma. A travers sa dramaturgie, Cameron a su mettre en scène et en spectacle une dynamique d'intégration entre raison et intuition qui s'avère fondamentale pour l'évolution humaine.



L'aphorisme tel que le pratique Char nous ramène vers une forme très ancienne de poésie : celle de l'oracle. A l'opposé de la maxime, dont le but est de condenser une idée abstraite, l'oracle diffuse un flux sémantique très ouvert, dont les significations ne sauraient être exhaustivement étalées en discours. Il unit impérieusement les contraires, obligeant la pensée à sortir de ses ornières, à surmonter les obstacles que lui imposent le langage et la logique, afin d'appréhender une cohérence supérieure. La poésie contribue ainsi à ouvrir le langage sur une méditation qui le dépasse.
 
 
04/02/10 - Vers une société post-capitaliste
Parce qu’elle est porteuse de valeurs spécifiques fondée sur nouveau mode de conscience, la culture intégrale inspire des réflexions politiques qui cherchent à promouvoir une organisation sociale fondée sur ces valeurs. La politique intégrale est la plate-forme ou le programme politique de ceux qui partagent les valeurs correspondant au niveau de conscience intégral. Chaque niveau de conscience et de culture a émergé, en partie, dans le creuset d’une forme politique. La politique aide à définir la vision du monde et la vision du monde définit la politique ou le type spécifique d’organisation politique qui lui correspond.


L’association suisse Politique Intégrale publie sur son site une déclaration d’intention dans laquelle elle explique ses buts : « Politique intégrale vise un renouvellement fondamental de notre culture et société sur la base d'un nouvel état de conscience. Elle souhaite ainsi contribuer à résoudre les problèmes sociaux, écologiques et psychiques profonds de l'humanité... Nous en sommes convaincus: le renouvellement profond de la société se fait à travers une nouvelle conscience, quasi spontanément, de l'intérieur vers l'extérieur. Ce sont des millions de personnes qui vont, fortes de leur nouvelle conscience, imaginer et construire les nouvelles structures extérieures. A leur tour celles-ci vont favoriser la transformation des consciences. »

14/02/10 - Que signifie « intégral » ?

L’association suisse Politique Intégrale publie sur son site un texte intitulé Fondement de la Politique Intégrale dont nous publions un extrait : « Politique Intégrale vise à aborder dans une conscience «intégrale» l'organisation de la société et sa relation avec la biosphère. Mais que signifie conscience «intégrale»? En simplifiant, on pourrait dire que c'est avoir conscience du lien fondamental entre tout ce qui existe, de l’amour universel ou, exprimé plus modestement, c'est avoir une attitude intérieure de bienveillance universelle. De là résultent un nouveau mode de vie et une nouvelle culture – une société dite «intégrale». De l'évolution de la conscience naît une nouvelle forme de pensée et de celle-ci, une nouvelle culture. »


Ce billet présente le livre fondateur de Christian Arnsperger qui applique la théorie intégrale de Wilber à la compréhension du champ économique. Cette réflexion permet d'analyser les sources existentielles et spirituelles de l’aliénation propre au système capitaliste qui - autant qu'un mode de production - est une culture répondant à nos angoisses existentielles en terme de consommation et d'appropriation. Selon l’auteur, nous avons besoin de « militants existentiels » capables de s'arracher spirituellement à une logique économique qui a cessé de tenir ses promesses.


Recensions du livre de Christian Arnsperger. Dans un article paru dans Politique et intitulé Le capitalisme est une culture, Pierre Ansay écrit ceci : « Pour Arnsperger « les questions les plus profondes de l’économie ne sont pas en elles-mêmes des questions économiques » et « si la logique en place est si tenace, c’est que quelque chose dans le tréfonds de nous-mêmes y consent ». La leçon, et Arnsperger ne manque pas de le tracer dans un livre qui devrait faire date, est qu’il convient de construire un autre monde... Je tiens le livre d’Arnsperger pour une avancée extraordinaire de la cause révolutionnaire. »


Nous proposons dans ce billet deux entretiens donnés par Christian Arnsperger, le premier à France-Culture et le second au journal Le Monde. Dans ce dernier, intitulé "Le capitalisme est une forme de spiritualité dangereuse". Christian Arnsperger dit ceci : "Le libéralisme prône la libération humaine dans toutes ses dimensions. L'idéal moderne de liberté est le bon, mais le capitalisme a fini par aller à son encontre. Il nous empêche de réfléchir sur le sens même de notre libération. La logique actuelle étouffe d'immenses potentiels humains. C'est pour libérer ces potentiels que nous devrions remplacer la croissance par l'approfondissement, la surconsommation par la simplicité choisie, la rentabilisation du savoir par la quête de soi."

8/03/10 - Incitations (1)

L’incitation est le langage mystérieux et vibrant de l’Intention. Sous formes d’aphorismes, de maximes ou de fragments, ces incitations sont des citations inspirées à l’auteur par l’esprit du temps pour l’inciter, avec ses lecteurs, à la méditation, à la réflexion... et à l’action.
 
- Les sociétés en déclin sont des mondes en italique où celui qui reste droit apparaît comme une exception suspecte à éliminer.
 
- Seules les lèvres salées qui ont traversé le désert connaissent les milles et une saveurs sucrées des fruits de l’oasis.
 
- Ce qui me détourne de l’Esprit, me distrait de ce que je suis et m’éloigne des autres.
 
- La bêtise réduit la connaissance à son pré carré et le bonheur à l’herbe qu’elle broute.

mercredi 9 mars 2011

Développement Intégral (3) La Voie d'Eros

Photo Pascal Renoux
Le corps et l’esprit

Héritière d’une longue tradition judéo-chrétienne et grecque, notre culture occidentale - profondément dualiste, idéaliste et intellectuelle - est fondée sur la séparation du corps et de l’esprit : d’un côté l’esprit à cultiver – sa transcendance, ses oeuvres et ses hauteurs – et de l’autre le corps – ses pulsions, ses bassesses et sa concupiscence – dont il faut se détourner et qu’il faut combattre à travers une ascèse vertueuse.
Venant tout juste d'écrire ceci, je tombe "par hasard" sur un article de Michel Onfray sur le site du journal Le Monde qui commence ainsi : " Notre Occident a été formaté par plus d'un millénaire de christianisme, autrement dit d'idéal ascétique, de refus du corps, de mépris de la chair, d'invitation pour les femmes à imiter la virginité de Marie tout en ayant des enfants et, pour les hommes, à s'inspirer du corps de Jésus, corps d'un ange sans désir qui ne mange ni ne boit que du symbole, qui n'a pas de sexualité, ou du corps du même, mais crucifié, troué par une lance, percé par une couronne d'épines, supplicié sur la croix, sanguinolent, mort".

Notre vision du monde est donc hantée par ces modèles corporels, sublimés ou dévitalisés, que sont l'ange, la vierge ou le cadavre. Pas étonnant que notre perception de la sexualité soit brouillée par le filtre de cet imaginaire désincarné ou mortifère, fruit de l'abstraction intellectuelle et de la culpabilité, d’un moralisme et d"une "moraline" chère à Nietzsche, instrumentalisant le sentiment moral. Ces filtres empêchent de reconnaître et de célébrer le mouvement créateur et la dimension sacrée de la vie qui s’expriment à travers la sexualité.

Cette stratégie de ré-pulsion est à l’origine d’un refoulement, violemment compensé par ce retour de refoulé qu’est la fascination obsessionnelle pour la pornographie et la perversion. L’exploitation commerciale de cette obsession pornographique conduit à une sexualité marchande qui réduit la relation sexuelle à un objet de consommation. Puritanisme et perversion sont les deux facettes d’une même attitude ambivalente de répulsion/fascination pour le sexe, née du dualisme entre le corps et l’esprit.


Une culture énergétique

D’autres cultures qui ne connaissent pas cette séparation entre l’esprit et le corps ont une toute autre approche de la sexualité. Fondées sur une sensibilité énergétique antérieure au processus d’abstraction intellectuelle, de grandes traditions orientales comme le Taoïsme ou le Tantrisme - issues du chamanisme, du paganisme et du polythéisme - permettent de comprendre et d’expérimenter les relations harmonieuses et complémentaires entre les deux pôles, charnels et spirituels, de la nature humaine.
Ces cultures ont la perception concrète d'une humanité qui participe intimement à une totalité organique souvent, mais pas toujours, identifiée à un Esprit transcendant. Cette totalité se manifeste à travers une dynamique énergétique et vitale qu'il convient d'honorer comme une médiation sacrée.
Dans un culture comme la nôtre, tellement abstraite qu'elle en est devenue insensée, il devient indispensable de retrouver le sens de cette participation concrète et sensible de l'homme à son milieu. Quand elle retrouve le sens du sacré, c'est-à-dire celui d’une vie connectée à la sensibilité qui la transmue, au mental qui la canalise et à l’esprit qui la transcende, la sexualité peut être vécue comme un puissant processus d’intégration du corps, du cœur et de la conscience.

C’est en ce sens que, dans sa version contemporaine adaptée à la mentalité moderne, le Tantra est une voie de développement intégral qui nous invite à nous connecter à notre dimension supérieure au travers de pratiques qui mettent en jeu la méditation, la conscience, la danse, la sensualité, la respiration, les mantras et la relation masculin/féminin pour transmuter l’énergie de vie (et notamment l’énergie sexuelle) en amour inconditionnel et en extase divine.


Une érotique intégrale

Une sexualité devient intégrale quand elle met en rapport le microcosme de l'élan érotique propre à chaque être humain et le macrocosme d’une dynamique évolutive concernant tous les règnes depuis des milliards d’années. La dynamique de l’évolution n’est pas une abstraction. Elle s’exprime en chaque humain de manière concrète et incarnée à travers un élan érotique à la fois sexuel et émotionnel, cognitif et spirituel. La dimension érotique n'est pas réductible à la sexualité. Multidimensionnelle, elle permet de participer en totalité, ici et maintenant, au mouvement de l’évolution créatrice dans l’athanor du continuum corps/esprit.

La sensibilité énergétique est, à la fine pointe de la sensibilité, un lien intime et vibratoire à travers lequel nous entrons en résonance avec la dynamique créatrice et intégrative de l’évolution. Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si on retrouve dans la tradition tantrique les premières cartographies de l’évolution humaine correspondant à la transmutation de l’énergie à travers l’échelle des différents chakras, ces plexus énergétiques dont les corrélats psycho-physiologiques ont été attestés par la science occidentale.

Toute processus d’intégration est l’expression manifeste d’une dynamique. A travers la sensibilité énergétique, l’être humain participe dans son corps, ses émotions, ses idées, ses inspirations et ses états de conscience aux divers milieux, naturels et cosmiques, relationnels et spirituels, dans lequel il évolue. C'est à travers cette résonance intime que se manifeste en nous cette force intégrative de la vie, l'amour et la conscience qu'est Eros.

C’est pourquoi, dans la perspective d’un développement intégral, l’éveil de la sensibilité énergétique et son amplification sont tout aussi fondamentaux que le sont l’épistémologie intégrative ou les cartographies développementales. Dans un prochain billet, nous aurons l’occasion de préciser les modalités d’une véritable « énergétique intégrale » à travers laquelle la sensibilité énergétique participe de manière vivante et vibrante à la dynamique intégrative de l’évolution.


Une sexualité redimensionnée

L’énergétique sexuelle
est une dimension particulière d’une sensibilité énergétique plus globale. La prise de conscience et le développement de cette énergétique sexuelle redimensionne la sexualité en retrouvant le caractère sacré qui la fonde, tout en libérant la psyché moderne de l’ambivalence fascination/répulsion vis-à-vis du sexe propre à la culture occidentale.

Nous proposons ci-dessous un article de Jacques Ferber où l’animateur du site Développement Intégral présente la singularité de la voie tantrique comme la Voie d’Eros. Formé au tantra par Jacques Lucas et Marisa Ortolan, Margot Anand et Sudheer Roche, Jacques Ferber est l’auteur de L’amant tantrique. L’homme sur la voie de la sexualité sacrée. A partir de son propre cheminement vers la sexualité sacrée, il y décrit les transformations intérieures qui mènent progressivement vers une nouvelle relation à la femme. Il apporte ainsi un éclairage novateur et profond sur la sexualité de l'homme.

L'ouvrage présente aussi un ensemble de techniques permettant d'atteindre au multi-orgasme et à l'extase grâce à la rétention de l'éjaculation et la diffusion de l'énergie sexuelle. Ce livre s'adresse aux hommes en quête d'une sexualité plus satisfaisante qui intègre sensualité, authenticité et spiritualité. Il est également destiné aux femmes en leur faisant partager de l'intérieur les désirs et appréhensions de l'homme face au féminin.


La Voie d’Eros. Jacques Ferber

Qu’est ce qui est le plus près de l’élan spirituel, qui nous fait oublier nous-mêmes pour nous pousser à nous tourner vers quelque chose qui est au delà de nous mêmes? Qu’est ce qui nous fait peur, nous attire, nous inspire et nous impulse dans une grande part (pour ne pas dire la totalité) des activités de notre vie? L’élan sexuel tout simplement.

Le sexe est une pulsion de vie qui a besoin de la relation pour exister. Cela n’est pas vrai pour la faim ou la soif par exemple que l’on peut épancher seul. Mais le sexe n’existe pas sans la relation à autrui. Même la masturbation met en jeu l’autre dans le fantasme ou la vision d’images érotiques. Le sexe n’est pas non plus un besoin: on n’a pas besoin d’avoir de relations sexuelles pour vivre. Même si une sexualité épanouie transforme n’importe quel être triste et gris en une personne joyeuse et colorée, elle n’est pas nécessaire à notre survie. Sans le sexe, les moines et les nonnes vivent.

Et pourtant, sans la sexualité de nos ancêtres, sans toutes les relations complexes qui ont existé – certaines dures, d’autres tendres – entre nos parents, nos grands-parents, nos arrières-grands-parents, nous n’existerions pas. Sans le désir sexuel qui a amené nos aïeuls les uns vers les autres, nous ne serions pas de ce monde. Nous sommes le fruit du désir entre un homme et une femme.

Cette attirance est complexe, car elle est à la fois le résultat d’une différenciation, un homme est attiré par une femme et réciproquement (je me consacrerai ici à la sexualité hétérosexuelle), et d’une union. De ce fait, la sexualité procède d’un double mouvement, un mouvement de distinction suivi d’une union.


Un mouvement de distinction

Le sexe est d’abord affaire de séparation et de différenciation… La sexualité ne met pas en jeu deux individus, mais un homme et une femme, c’est à dire des personnes typées dans leur genre sexuel (le gender anglais). Dans le tantra, cette séparation est poussée jusqu’à son extrême puisque l’homme devient Shiva et la femme Shakti, c’est à dire le Dieu et la Déesse. Evidemment personne ne vient à penser que l’on devient réellement des dieux ou des déesses, mais cela permet d’aller dans les profondeurs de la psyché, là où nous rencontrons les puissances de l’inconscient collectif. En fait, c’est l’archétype du dieu, ou celui de la déesse, qui vient nous habiter lors d’une rencontre tantrique sacrée.

Cette reconnaissance du divin à l’intérieur de nous a deux fonctions: d’une part cela nous fait sortir de nos petites habitudes quotidiennes en nous plongeant dans un espace sacré, et d’autre part cela nous aide à transcender notre identité égotique et nous faire accéder à une perception plus fine de l’autre, de soi et du Kosmos. On peut dire que la sexualité nous polarise dans notre genre, qu’elle nous rend encore plus homme ou femme que nous ne le sommes dans la vie de tous les jours.
Si au travail et dans grand nombre d’activités de la vie civile nous pouvons faire en sorte de nous côtoyer en mettant à l’écart notre genre, en laissant croire que nous sommes “unisexe”, provenant d’une sorte de genre “gris” ni homme ni femme, cela n’est pas vrai dans la sexualité où la rencontre repose justement sur cette différence.


Un mouvement d’union

Mais la sexualité ne s’arrête pas à la distinction et à la polarisation sexuée, car elle est suivie d’un mouvement contraire qui pousse à l’union: dans l’acte d’amour, l’homme et la femme s’unissent et se fondent l’un dans l’autre pour ne faire plus qu’un. Ils étaient deux, ils ne sont plus qu’un. Mais dans cette rencontre, les deux partenaires ne sont pas le symétrique l’un de l’autre: la femme n’est pas un homme inversé. Ils ne jouent pas le même rôle, ils ne tiennent pas la même place dans cette danse de la vie.
En effet, l’étreinte charnelle, le coït, ne s’effectue pas à mi chemin entre l’homme et la femme, mais dans la femme. La femme accueille l’homme en elle et, dans sa polarité yin, s’ouvre à la puissance de l’homme. Son sexe est la coupe, le Graal des chevaliers, celle qui appelle et reçoit l’autre en elle.

Le sexe de l’homme est un bâton qui vit à l’extérieur, et en tant que tel constitue le trait d’union entre les deux. La coupe appelle le bâton, le bâton a besoin de la coupe. Lorsque l’union s’accomplit la femme reçoit et l’homme donne par son sexe. On croit souvent que l’homme “prend” la femme, et c’est souvent ce qui se passe. Mais lorsque l’union est véritable, lorsque l’acte d’amour constitue la rencontre totale des corps, des coeurs et des âmes, l’homme ne prend plus la femme: il lui fait don de sa puissance. Et son sexe est alors l’émetteur de cette énergie sexuelle, qui passe dans le sexe de la femme et qui allume la poudre du désir chez la femme.

Inversement, quand l’union est vraiment réalisée, le coeur de l’homme, qui est de polarité yin, peut recevoir l’amour de la femme qui donne naturellement son amour à l’homme, et l’énergie relationnelle de la femme passe de son coeur à celui de l’homme qui est ainsi rempli de l’amour de la femme, comme celle-ci l’est de l’énergie sexuelle de l’homme. Il s’ensuit une boucle énergétique qui unit les deux êtres, ouvre leur âme et leur fait accéder à la transcendance.


Un acte de création

Pendant un moment, parfois long, souvent trop court :- ), deux êtres vont alors au delà de leur personne, de leur individualité pour aller justement dans leur être profond, et s’unir en revivant et recréant les origines. L’acte d’amour est un acte de création, car il est potentiellement à l’origine d’une autre vie, et de re-création car il accomplit ce que tous nos ancêtres ont toujours fait depuis des millénaires. C’est en cela que l’acte sexuel est sacré: il rejoue la création du monde (lire Mircea Eliade à ce sujet), il rejoue la Vie qui se cherche dans cette différenciation/union.

Faire l’amour intensément, ce n’est pas jouer les jeux olympiques du sexe en contrôlant ce que l’on fait pour être plus “performant”, mais s’unir au niveau des énergies du corps, du coeur et de l’esprit. Lorsque l’union est intense, les gestes ne sont plus contrôlés. Le rythme est variable, parfois frénétique, parfois aussi lent et léger qu’une plume. Tout se passe comme si les corps n’étaient plus contrôlés, comme s’il n’y avait plus de “moi” pour maîtriser et comme si les corps étaient “agi” de l’intérieur par cette pulsion de vie liée au mouvement énergétique qui relie l’homme et la femme en une danse cosmique.

Les mots alors ne peuvent plus décrire ce qui se passe. On entre dans le domaine de l’ineffable, ce qu’on traduit par les qualificatifs de “magique” ou “cosmique” tout simplement parce que les mots n’arrivent plus à rendre compte de l’expérience vécue. Dans cette union, c’est la pénétration qui transforme si on sait accueillir l’énergie pénétrante de l’autre, si la femme sait accueillir la puissance sexuelle de l’homme et l’homme la puissance d’amour de la femme.
A ce moment là, le circuit énergétique se met en place, le sexe de la femme appelle et le coeur de l’homme s’ouvre, les plongeant l’un et l’autre dans l’extase. La rencontre amoureuse, si elle est ainsi faite en conscience, dans le sacré et l’ouverture à l’autre est alors l’une des voie les plus puissantes d’éveil… C’est la voie d’Eros…


Ateliers de tantra et méditations tantriques

On peut consulter le programme des ateliers de tantra et de méditations tantriques organisés par Jacques Ferber sur le site Développement Intégral. Ces ateliers portent sur la partie méditative, contemplative et énergétique du tantra, en mettant l’accent sur notre relation au divin, seul ou avec quelqu’un d’autre. Il s’agit d’aller au fond de « qui nous sommes vraiment » indépendamment de notre personnalité et de notre histoire de vie.

Le tantra est un anti-stress, anti-dépresseur naturel. Il s’agit de travailler plus particulièrement sur la respiration, le mouvement, la circulation des énergies, mais aussi sur la conscience, la sensualité, la rencontre à l’autre dans un contexte non sexuel. C’est ainsi que l’on peut avancer sur la voie extatique de la connexion au divin.
On peut se connecter à notre essence au travers de méditations et d’exercices simples, ludiques et profonds, afin d’acquérir un ensemble d’outils pratiques pour nous permettre d‘incarner plus souvent la Joie au quotidien. Au delà des exercices et du bien être local qu’ils peuvent amener, il sera proposé des « outils » méditatifs qui pourront ensuite être utilisés chez soi.

samedi 5 mars 2011

Développement Intégral (2) Introduction à la Spirale Dynamique


Les Modèles Développementaux
Le développement intégral est fondé à la fois sur une épistémologie intégrative et sur des modèles qui cartographient avec précision les diverses étapes du développement humain tant sur le plan personnel que sur le plan collectif. Autrement dit : une boussole et des cartes.

A partir des recherches en sciences humaines – notamment en psychologie, en sociologie ou en anthropologie – les penseurs du développement humain estiment que la culture, comme la conscience individuelle, évolue à travers des stades spécifiques et selon un ordre hiérarchique qui est celui d’une complexité et d’une intégration croissantes.

La société, à chaque période historique, et l’individu, à chaque âge de la vie, s’adaptent à leurs conditions d’existence en évoluant à travers ces divers stades. A chaque stade de l’évolution correspond une vision du monde et un système de valeurs qui déterminent un type de relations spécifiques au sein de la société et avec l’environnement. Les stades du développement individuel récapitulent ceux de l’évolution culturelle vécue par l’espèce humaine au cours du temps.

A l’émergence d’une vision du monde plus évoluée sur l’échelle de l’évolution culturelle correspond celle d'un nouveau paradigme, plus complexe et intégré. Ce modèle implicite va s’exprimer à travers des perspectives épistémologiques, anthropologiques et sociales novatrices.

Dans ces modèles développementaux, un stade évolutif supérieur n’est pas « meilleur » qu’un autre. Chacun de ces stades correspond à la façon dont un individu ou une collectivité s’adapte à ses conditions de vie à un moment donné. Ces modèles développementaux permettent de contextualiser l’expérience humaine, les visions du monde et les représentations dans le niveau évolutif auquel elles participent et où elles se situent.

Les Pionniers

En 1953, Jean Gebser publia The Ever-Present Origin où il proposait la classification suivante des différents stades de l'évolution culturelle : archaïque-instinctif, magique-égocentrique, mythique-traditionnel, mental-rationnel, intégral. Les penseurs de la théorie intégrale, dont Ken Wilber, ont repris cette classification en distinguant deux niveaux dans le stade évolutif que Gebser qualifie d'intégral : le stade pluraliste-post-moderne et le stade intégral proprement dit.

Dans le même esprit, c’est dans les années1950 que le Professeur Clare Graves a conçu une «théorie de l’émergence cyclique des niveaux d’existence » et une cartographie de l’évolution humaine qui rend compte de cette théorie. Dans les années 80, ses élèves Don Beck et Chris Cowan ont repris et complété ces travaux à travers un modèle qu’ils ont nommé Spirale Dynamique que nous avons notamment présenté ici et là.

Si ce modèle est figuré par une spirale c'est que la dynamique de l’évolution ressemble à une courbe, enroulée autour d’un axe central, qui se recentre progressivement autour de cet axe à travers des cycles de plus en plus courts qui synthétise les anciens tours de spirale dans un niveau supérieur.

Une anthropologie évolutionnaire

Nous proposons ci-dessous la présentation synthétique et illustrée de la Spirale Dynamique effectuée par Jacques Ferber, animateur du site Développement Intégral, pour le cours qu’il donne à des étudiants de Master dans le module Cognition Individuelle et Collective à l’Université de Montpellier II.

Même s’il existe de légères différences entre le modèle de la Spirale Dynamique et la Vision Intégrale de Wilber, ils sont étroitement liés et c’est en ce sens que Jacques Ferber a conçu sa présentation à partir d’une perspective intégrale.

Au cœur de la culture intégrale, une anthropologie évolutionnaire envisage l’être humain comme l’expression la plus complexe d’une dynamique évolutive de plusieurs milliards d’années concernant les formes biologiques et psychiques, sociales et culturelles, cognitives et spirituelles.

Cette anthropologie évolutionnaire trouve un écho chez les avant-gardes culturelles, notamment dans les pays anglo-saxons, alors qu’elle reste encore très marginale en France où elle va à l’encontre du modèle dominant, celui d’un universalisme dont l’abstraction est incapable de prendre en compte la dynamique évolutive.

Approches conceptuelles et contextuelles
Là où l'anthropologie évolutionnaire est contextuelle et dynamique, l'universalisme abstrait, au coeur du paradigme moderne, est conceptuel et statique. L'approche contextuelle prend en compte la complexité des relations qui unissent la subjectivité vivante au divers milieux où elle évolue alors que l'approche conceptuelle tend à objectiver l'être humain en le réduisant à une entité abstraite et immuable, essence universelle à laquelle tous les être humains se référent de manière uniforme.
Dans le premier cas, on considère l'être humain comme participant à un ensemble complexe de relations dont l'organisation dépend d'une dynamique évolutive alors que dans le second, il est considéré comme une entité objective et idéale, création hors sol d'une rationnalité abstraite, sans appartenance sociale, sans filiation culturelle, sans milieu naturel. Ce déni abstrait du contexte évolutif est l’expression d’un ethnocentrisme occidental qui impose l'abstraction de sa visée instrumentale en occultant la vie concrète et sensible telle qu'elle s'exprime notamment à travers la diversité des cultures.
Hegel, un des pères de l'anthropologie évolutionnaire  écrivait ceci : " Chaque individu est le fils de son peuple à une certaine étape du développement de ce peuple. Personne ne peut sauter par-dessus l'esprit de son peuple, comme personne ne peut sauter par-dessus la terre". La subjectivité ne se développe effectivement que dans le contexte d'une intersubjectivité culturelle. Et c'est pourquoi l'anthropologie évolutionnaire met au coeur de sa démarche cette intersubjectivité culturelle - A.D.N de toute subjectivité - qui évolue au fil du temps à travers des stades définis de complexité et d'intégration croissants.

Introduction à la Spirale Dynamique

Pour voir la présentation en plein écran appuyer sur Menu en bas à gauche.

mardi 1 mars 2011

Développement Intégral (1)


Dans le billet précédent où nous nous interrogions sur la spiritualité du vingt et unième siècle, Arnaud Desjardins faisait part, pour l’être humain, d’une "possibilité de développement intrinsèque, intime, immense"

Nous ajoutions que la spiritualité intégrale, celle du vingt et unième siècle, est foncièrement non-duelle : elle perçoit la dynamique de l’évolution - non seulement biologique mais aussi psychique et cognitive, sociale et culturelle - comme la manifestation même de l’Esprit transcendant.
Dans cette perspective novatrice, l’être humain se doit donc d’explorer, d’expérimenter et d’exprimer toutes les possibilités d’un développement intégral.


Devenez le changement que vous souhaitez pour le monde

C’est dans cet esprit que Jacques Ferber (ci-contre) vient de créer le site Développement Intégral afin de permettre à ceux qui le souhaitent de se familiariser avec les outils et les modèles nécessaires à cette exploration, cette expérimentation et cette expression.

Ce site est destiné à offrir des informations sur le développement individuel, relationnel, sexuel, spirituel et social, à partir d’une vision intégrale, dans le courant de l’approche intégrale de Ken Wilber et de la Spirale Dynamique issue des travaux de Clare Graves.

Jacques Ferber résume ainsi son intention : « Gandhi disait : "Devenez le changement que vous souhaitez pour le monde", pour nous enjoindre de nous mettre en mouvement au service de l’évolution du monde, afin que tous les cheminements individuels influencent l’évolution du monde.

Il s’agit de se transformer soi-même pour transformer le monde, en faisant évoluer son regard, en élargissant sa conscience et sa relation au monde, afin de percevoir ce qui auparavant était inconscient, et ainsi entrer en relation différemment avec sa propre intériorité, ses proches, et son environnement, en alignant toutes les facettes de son être afin d’agir dans le sens d’une plus grande union de tous les humains et de tous les règnes sur la planète." En évoluant soi-même en totalité, le développement intégral fait ainsi évoluer notre milieu, par résonance, tout comme cette évolution du milieu de vie influence et intensifie la transformation de l'individu.


Une démarche d’intégration

Les lecteurs du Journal Intégral connaissent Jacques Ferber, co-auteur avec Véronique Guérin d’un livre passionnant sur le développement relationnel Le monde change... et nous ? Clés et enjeux du développement relationnel auquel nous avons consacré plusieurs billets. Ces derniers permettent de mieux comprendre la démarche originale d’intégration de Jacques Ferber qui enrichit les pratiques spirituelles par sa connaissance des sciences cognitives.

Côté Hémisphère Gauche du cerveau, Jacques Ferber est professeur à l'Université de Montpellier, spécialiste en sciences cognitives et en intelligence collective. Il travaille notamment sur la modélisation des processus sociaux. Il est l’auteur d’un ouvrage intitulé Les systèmes multi-agents. Vers une intelligence collective. Actuellement épuisé, à télécharger ici pour ceux que cela intéresse. On peut lire aussi en ligne ses cours universitaires sur la mémétique ou sur la cognition individuelle et collective.

Côté Hémisphère Droit, Jacques Ferber a été formé au tantra, au reiki, à l’analyse symbolique des rêves et des mythes, au yoga, à la méditation et à différentes traditions spirituelles, au cours de son parcours psycho-spirituel depuis plus de 20 ans. Il est aussi l’auteur de L'amant tantrique: l"homme sur la voie de la sexualité sacrée où il présente une vision de la sexualité de l'homme fondée sur un double mouvement de puissance masculine et de rencontre avec la femme, pour une union joyeuse et sacrée des corps, des coeurs et des âmes, dans la conscience et la présence.

Depuis quelques années, il anime des stages de tantra, de méditations tantriques et de développement de conscience dans la mouvance intégrale. Cette année, il a organisé une série d’ateliers rencontres et de méditations tantriques dans la région parisienne.


Conceptions et Relations


Jusqu’à présent, Jacques Ferber animait deux blogs. Le premier Visions Intégrales était plutôt dédié à l’hémisphère gauche et à la réflexion conceptuelle tandis que le second, Sexualité et Spiritualité concernait plutôt l’hémisphère droit et la dimension relationnelle, notamment celle concernant l’intégration de la sexualité et de la spiritualité.

Dans la mesure où les recouvrements entre ces deux blogs se faisaient de plus en plus nombreux, il devenait nécessaire de passer à un site plus puissant, permettant de publier des articles à plusieurs et de constituer ainsi une plaque tournante sur l'approche intégrale, qui intègre les domaines individuels et collectifs, les dimensions conceptuelles et pratiques, en abordant les aspects relationnels, sexuels et spirituels.

Les deux anciens sites sont maintenant fermés mais leur contenu se trouve sur le nouveau site Développement Intégral qui fait la synthèse entre les deux.


La Carte et le Territoire

Et le bébé qui vient de naître a bien du charme. La présentation, très dynamique, m’apparaît comme une réussite. Sur le fond, cette intégration des aspects conceptuels et relationnels permet d’aborder les modèles de la théorie intégrale qui sont autant de cartes du développement humain tout en prenant en compte la pratique vécue sur le terrain d’une expérience subjective ou d’une relation intersubjective.

Car la culture intégrale c’est une pensée novatrice fondée sur une épistémologie intégrative et des modèles développementaux mais c'est aussi une subjectivité en mouvement - un corps vivant et vibrant, un imaginaire, une intuition et une sensibilité - qui participe de manière créatrice aux divers milieux - naturels, culturels, sociaux - de son évolution.

Une originalité : ce site peut être le support d’une intelligence collective dans la mesure où il est possible de publier des textes qui s’inscrivent dans sa ligne éditoriale définie par Jacques Ferber dans le texte ci-dessous.


Notre Vision. Jacques Ferber

Dans ces temps où la complexité règne, où il est parfois difficile de trouver du sens dans les événements du monde, il existe un ensemble de courants psychologiques, spirituels, philosophiques, écologiques et sociaux qui se réclament d’une vision intégrale (parfois aussi appelée intégrative en français) qui montre l’articulation du développement individuel, relationnel, social et spirituel.

Il s’agit notamment de l’approche intégrale de Ken Wilber et la Spirale Dynamique, les spiritualités dans leur vision évolutionnaire et intégrative (bouddhisme, chamanisme, approches christiques, Teilhard de Chardin, Gnose chrétienne, soufisme, kabbale, tantrisme, yoga integral de Sri Aurobindo, etc..), de la psychologie des profondeurs (C. G. Jung, M. Eliade), des sciences de la complexité (et notamment la mémétique, les théories autopoïétiques de Maturana et Varela, les systèmes multi-agents,..), des sciences cognitives et sociales (N. Elias, Damasio,..) de certaines formes d’écologie intégrales, etc.

Comme si tous ces courants nous parlaient de la même chose: de l’intégration du masculin et du féminin, de la science et de la spiritualité, de la sexualité et du divin, du corps et de l’esprit, de la raison et des émotions, du Ciel et de la Terre, de la Lumière et de l’Ombre. Comme si tout cela nous montrait une évolution issue à la fois d’une émergence issue de mécanismes élémentaires (forces physique, sélection darwinienne, etc..) et d’un cheminement pré-établi vers une plus grande Conscience.

Une perspective spirituelle particulièrement développée est celle du tantra, qui est la seule voie que nous connaissions qui prenne en compte la sexualité et l’énergie d’Eros dans la relation au divin. De ce fait, ce site offre une perspective pour un « tantra intégral », reliant l’individu dans sa quête spirituelle, la relation à l’autre dans les dimensions de Conscience, d’Amour et d’énergie de Désir, les archétypes qui nous animent, les formes de pensées et leur évolution ainsi que les structures sociales qui en résultent.

Vous trouverez sur ce site :

- Des enseignements pratiques, des outils, “méthodes” ou “moyens habiles” permettant à chacun d’évoluer et de se développer sur tous les plans de l’être: physique, émotionnel, psychique, sexuel, cognitif, relationnel et spirituel.

- Des regards sur le monde, point de vue ponctuels permettant de comprendre l’évolution individuelle et collective, ainsi que des manières d’appliquer dans la vie quotidienne, dans son métier, dans ses relations ces outils, et de mettre la Conscience au service du monde.

- Des cadres conceptuels, issus de visions intégrales, permettant de comprendre l’articulation de ces outils, leur place, leur fondement et les pensées qui les animent.

- Des présentations d’écoles, de praticiens, de guides et enseignants qui ont mis leur énergie et leur temps au service de cette évolution de Conscience du monde.

On peut s’abonner gratuitement au site pour recevoir les nouveaux articles dès qu’ils sont en ligne.